Codex Mortis - Tales Of Woe
Chronique
Codex Mortis Tales Of Woe
S’il n’est clairement pas le nom le plus connu de la pléthorique scène des Pays-Bas CODEX MORTIS a pourtant nombre d’arguments à faire valoir, et en premier lieu la qualité de ses membres particulièrement expérimentés... vu qu’on y trouve en son sein des vieux briscards ayant fait leurs armes notamment dans IZEGRIM, BLOODPHEMY et BODYFARM... signe d’une certaine qualité. Après un premier album sympathique il y a un peu plus de trois ans la formation revient avec son successeur sous le bras et un line-up renouvelé qui ne va pas dépareiller par rapport au précédent, tout en proposant toujours un Black classique et affûté où la violence n’hésite pas à s’effacer légèrement au profit d’une mélodie agréable et bienvenue. Du coup si nulle surprise n’est à l’ordre du jour il faut néanmoins reconnaître que tout ici est parfaitement exécuté et bien en place, même si ça reste encore un peu juste pour espérer passer un cap et grimper dans la hiérarchie. Néanmoins les mecs s’en foutent visiblement un peu tant ici leur seule envie est de proposer une musique sincère, authentique et qui rend hommage aux années 90 durant six morceaux qui vont filer à vive allure sans qu’on ait le temps de s’ennuyer.
Car au départ les bataves vont miser sur la brutalité exacerbée comme « Forsaken » va le prouver en jouant à fond la caisse de façon pratiquement continue, tout en proposant une vision simple et directe du côté de l’écriture avec de longues plages où le vent et le froid ne laissent aucune chance de survie. Misant plus sur les ambiances neigeuses que nocturnes l’entité ralentit heureusement l’allure par la suite afin de clôturer ce titre par un accent plus mélodique et mélancolique, comme si la fureur hivernale se calmait quelque peu tout en lorgnant aisément du côté de la Suède et en particulier du grand DISSECTION. En effet si ici tout était relativement prévisible et répétitif la suite va gagner en accroche au fur et à mesure, et tout d’abord sur le très bon « Capricious Disembodied Villain » qui va miser sur un grand-écart permanent pour densifier son propos, tout en mettant en avant des passages en mid-tempo bien troussés pour gagner en dynamisme qui donnent la sensation d’être paumé au milieu de nulle part, tout en ajoutant quelques relents épiques imparables. Ces derniers vont d’ailleurs apparaître encore plus fermement sur le redoutable « Chosen » aux délicieux accents Heavy et qui va mettre en avant le mid-tempo de façon plus prononcée, tout en accentuant le côté guerrier et viking – joué en alternance avec les parties débridées vindicatives, et dont le rendu est absolument impeccable où là-encore ressort une certaine nostalgie et tristesse tant le combat a été âpre et rude pour les corps comme les esprits.
Clôturant idéalement une première partie sans faute de goût et qui s’écoute très facilement (vu qu’il n’y a aucune trace d’excès techniques ainsi qu’une une fluidité permanente) cette plage ne va pas dépareiller par rapport au reste, vu que la seconde moitié va être du même niveau... preuve en est l’impeccable « Trenched In Blood » qui malgré sa courte durée et son écriture rudimentaire va parfaitement passer l’épreuve du feu. Jouant ici massivement sur l’explosivité comme le tabassage ça voit cependant de courtes cassures pour aérer tout ça, et montrer surtout que dans cet exercice le combo sait garder sa force de frappe sans être redondant ou linéaire. Du coup après ce retour aux fondamentaux il va densifier son propos sur le magnifique « Fire Screams And Death » où l’ombre du regretté Jon Nödtveidt est ici plus que présente, tant ici la fureur se calme pour laisser agir ainsi les harmonies propices à la mélancolie dès que la rythmique se pose sur le frein. Mettant ainsi en avant les deux facettes extrêmes de leur répertoire les Néerlandais montrent une fois encore qu’ils sont autant à l’aise dans la radicalité que dans un travail plus fourni et dense, où les émotions trouvent facilement leur place... un ressenti qui apparaîtra une dernière fois avec « It Dies With Me » où l’ensemble des rythmes vont se mettre sur un pied d’égalité. Car histoire de parfaitement terminer les débats tout ici va osciller entre accélérations débridées et lourdeur pachydermique ponctuées de variations et de ralentissements réguliers, afin que tout cela soit dense au maximum avec un équilibre sans failles, qui clôt ainsi un long-format réussi et agréable à défaut d’être incontournable et mémorable.
Car si tout cela est bien en place et très professionnel (vu le pedigree des musiciens on s’en doutait un peu) il manque clairement des éléments marquants pour arriver à se démarquer de la redoutable concurrence locale comme internationale, malgré un vrai savoir-faire et pas de défauts marquants à l’ensemble... hormis un côté prévisible et interchangeable à force. Si le blanc prend régulièrement le dessus sur le noir on est cependant loin d’une musique solaire et pleine de vie, tant ici tout est gelé et pris dans les glaces des longs et rugueux hivers scandinaves et il suffit de peu pour que la vie décline autant qu’elle ne reparte une fois le printemps en ligne de mire. Bonne sortie de deuxième division ce second chapitre de ses auteurs ne changera néanmoins en rien le statut de cette entité qui devra faire encore mieux à l’avenir pour espérer connaître une notoriété plus marquée. Pour l’instant elle semble en effet condamnée à assurer les premières parties d’autres formations plus marquantes et mémorables... tout en arrivant cependant à capter suffisamment l’attention de l’auditoire qui passera un bon moment en sa compagnie, en faisant un voyage agréable vers les immenses contrées du nord toujours aussi inspirantes et énigmatiques... et pour lesquelles on se laisse ici aisément embarquer.
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