Decrepit Birth - ...And Time Begins
Chronique
Decrepit Birth ...And Time Begins
Que les choses soient claires dès le départ, si le death metal n’est pas votre tasse de thé, si vous trouvez que des groupes tels que Obituary ou Six Feet Under sont trop brutaux, si vous n’aimez pas les blast-beats dans le metal, si pour vous groupe technique rime avec chiantissime, passez votre chemin. Bien, j’en vois encore qui restent. Vous n’aimez pas les cds qui durent à peine une demi-heure ? Pas la peine de rester, ce qui va suivre est réservé au cercle des amis de l’extrême brutalité. Et oui le brutal death c’est, surtout dans ce cas précis, une musique élitiste réservé à un public averti (pas la peine de chercher des photos douteuses dans le livret).
Deuxième point qui a besoin d’être clarifié avant d’attaquer les choses sérieuses, les premières écoutes. Si vous êtes toujours là après la lecture du premier paragraphe, c’est déjà bon signe. Si vous avez déjà l’oreille exercée, si le fait de dire un nom comme Unique Leader provoque chez vous une intense érection, vous allez être aux anges. Mais il est nécessaire de préciser qu’il faut quelques écoutes attentives pour digérer la monstrueuse tambouille produite par Decrepit Birth.
Avec un tel line up que celui qui nous est proposé, on peut s’attendre à coup sûr à ce qu’il y ait du sport. En effet, en ce temps là, Decrepit Birth comptait dans ses rangs Derek Boyer, bassiste de Suffocation (retenez bien ce nom, on en reparlera) et Tim Yeung, batteur intérimaire de luxe ayant joué avec entre autres Hate Eternal, Agiel, Aurora Borealis et j’en passe. Avec tout ce beau monde, il est clair que ça fait beaucoup de bruit. Aux premiers abords, on peut dire trop de bruit.
Résumé de ma première écoute du cd : « Bon, la première s’appelle Prelude To The Apocalypse, voyons v… Mais où est le prélude ? Quoi, on est déjà à la 2eme chanson ? Oulala c’est brutal ! Hein ! Déjà à la 4 ?! Mais c’est une boite à rythme derrière c’est pas possible ? Quoi c’est déjà fini ? Vite une aspirine ».
Voila en gros ce que peut donner la première expérience avec Decrepit Birth. Autant dire que j’aurais pu m’arrêter là et mettre une note immonde en restant sur mes premières fausses impressions.
Or certains cds révèlent leurs richesses au bout de plusieurs écoutes attentives. Et c’est précisément ce qui se passe avec Decrepit Birth. …And Time Begins peut se révéler très indigeste au début car on a affaire à un death metal d’une brutalité peu commune. Les titres sont courts, dévastateurs et ça ne dure qu’une petite demi-heure. Mais c’est très bien comme ça car Decrepit Birth joue non seulement une musique extrêmement brutale mais aussi très technique. Le premier morceau « Prelude To The Apocalypse », porte très mal son nom, du fait de sa durée, on pourrait s’attendre à une intro instrumentale qui prépare le terrain mais il n’en est rien. La batterie bloquée en cinquième vitesse matraque l’auditeur, les riffs assassins et tranchants achèvent ce qui reste de sa carcasse encore fumante. Et surtout ne vous fiez pas à la ressemblance du chanteur avec Corbier du Club Dorothée. Ici, point de « Sans Ma Barbe », c’est du growl caverneux classique qui vient des trippes. Et c’est comme ça pendant tout le reste du cd.
A son habitude, Tim Yeung est une véritable machine à roulements, blasts foudroyants et autres joyeusetés. Toujours précis, ultra rapide, son jeu est impressionnant. Le groupe prend un malin plaisir à aligner break sur break, casser le rythme pour repartir de plus bel, ce qui rend l’écoute particulièrement éprouvante. Mais une fois familiarisé avec ce cataclysme sonore, on prend plaisir à disséquer les schémas rythmiques mais surtout les riffs particulièrement bien trouvés qui fourmillent sur ce …And Time Begins. Ils sont très variés, ultra-rapides et incisifs, ou « pesants » (ne vous attendez pas à du doom non plus) et efficaces. Les structures des titres sont pour le moins très complexes et à certains moments, il est plutôt difficile de suivre la machine. Alors forcément il y a quelques passages (minimes) durs à encaisser voire même lourds. Mais un morceau comme « The Infestation » reste un pur régal une fois correctement assimilé. Une première véritable intro, des riffs tourbillonnants, le tout mené par une orgie de blast-beats. C’est un titre pour le moins intéressant car plus aéré et un peu moins chargé que le début.
La suite est quant à elle beaucoup plus mélodique avec des claviers et même des passages aux saxophones. Que ceux qui ont fait une crise cardiaque en lisant la phrase précédente se rassurent, ce n’est heureusement pas vrai et c’est même encore plus bourrin. « Shroud Of Impurity » avec son intro d’une violence difficilement descriptible, une batterie épileptique et quelques ralentissements salvateurs mais toujours aussi brutaux, « Concepting The Era », gavée de riffs de tueurs. C’est toujours aussi technique et détonant le passage à 1’30 est jouissif de rapidité et d’efficacité. Le temps de suffoquer (ahah) avec « Of Genocide », titre apocalyptique et faussement calme, le cd s’achève déjà avec un morceau durant 9 minutes (!!). C’est reparti, on prend toujours plein la figure, quelque mosh-parts écrasantes, pour aérer le tout et rendre le titre plus contrôlé et viennent 5 minutes de bruits de destruction, de tempête tourbillonnante, semant la mort et le chaos derrière elle.
Ce qui saute aux oreilles c’est qu’on a l’impression d’écouter un clone de Suffocation mais en accéléré. On y retrouve en gros les mêmes ingrédients, la technicité en plus. Une technicité appuyée par une production correcte, mais sans plus. Le chant est surmixé, la guitare est un peu trop en retrait et le son très synthétique de la batterie peut exaspérer à long terme. Mais qu’importe, la musique de Decrepit Birth est un tourbillon de brutalité qui nous emporte et nous malmène. C’est la bande son qui conviendrait à merveille pour la pire des dévastations, car cette infâme mixture a pour seul et ultime but de créer l’ambiance la plus apocalyptique qu’il soit musicalement possible de créer (ambiance illustrée par la pochette magnifique de Dan Seagrave, dessinateur entre autre de la pochette de Souls To Deny de Suffocation). Et on peut dire que ce …And Time Begins remplit à merveille son contrat.
Bien entendu, on peut reprocher beaucoup de choses à un groupe tel que Decrepit Birth. Certains trouveront que c’est toujours pareil, que c’est trop brutal et se demanderont même comment des musiciens aussi doués arrivent à faire des titres aussi lourdingues. Alors oui, certaines fois on peut avoir l’impression d’écouter le même titre pendant 30 minutes, que c’est par moment pas très original, etc.… Mais comme précisé au tout début, ce disque est réservé aux fans de brutal death pur jus. Et encore, il faut plusieurs tentatives avant d’apprivoiser la bête. Mais ceci étant fait, on découvre un groupe mettant une extrême brutalité au service de compos assassines et foudroyantes, gavées de blasts et de breaks destructeurs. Ce …And Time Begins marque la naissance de la tempête la plus dévastatrice qui soit, une tempête nommée Decrepit Birth.
| Scum 28 Octobre 2005 - 2964 lectures |
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