Estatic Fear - Somnium Obmutum
Chronique
Estatic Fear Somnium Obmutum
Reflet de l’âme d’un seul homme, Matthias Kogler, le projet autrichien Estatic Fear se forme en 1994, alors composé de quatre membres à part entière. Le premier album ici présent, Somnium Obmutum, ne sort qu’en 1998. Un second album verra le jour en 1999, avant que le groupe ne donne plus aucune nouvelle. Ce qui est d’autant plus dommage que ce groupe, en plus de me tenir tout particulièrement à cœur et dêtre absolument magnifique, est unique en son genre…
A la croisée d’influence doom/death, black et gothique, le tout teinté d’une aura folklorique et médiévale (un peu à la manière des premiers Empyrium, comparaison inévitable vu la proximité stylistique des deux groupes), Estatic Fear développe tout ce qu’il peut y avoir de plus beau dans la mélancolie, la tristesse et la solitude.
Ce qui est très fort aussi dans la musique d’Estatic Fear, c’est cette capacité à faire ressortir une aura baroque autour de soi ; une ambiance mélancolique, noble, apaisante, un peu que ce que l’on peut ressentir en se promenant dans le parc d’un château de la Rennaissance, dans un cloître ou dans tout endroit un peu secret et mystique possédant une âme. Âme que l’on retrouve tout au long de ces 56 minutes de beauté, de solitude, de mélancolie pure. Un peu comme si Somnium Obmutum était un fin mélange de doom metal, de musique classique, d’art baroque et de nature…
Du haut de ses 32 minutes 13 secondes, le second morceau éponyme représente le coeur de l’album et toute la magie d’Estatic Fear. Précédé d’une petite introduction joué au luth, on s’immisce tout doucement dans ce monde si particulier, dans ce coin de nature qui n’a de valeur que pour nous-même, où l’on aime à se réfugier, las du monde qui nous entoure. Le morceau commence, laissant apparaître une mélodie si sublime qu’on croirait que la guitare pleure ses notes délicates. Une légère nappe de synthé nous accompagne tout au long du disque, discrète, accentuant cette ambiance baroque.
Tout au long de ces 32 minutes, Matthias (c’est lui qui écrit paroles et musiques) développe autant de mélodies totalement divines et fabuleuse que d’ambiances reposantes et méditatives ; alternant passages typiquement doom mélodique, accélérations blastées avec un ressenti épique tout autant évocateur et passages plus posées, avec juste de jolies nappes de synthé, la batterie d’instruments folkloriques tels que luth, piano, flûte, guitare acoustiques. Le panel des vocaux étant assez riches aussi, allant des growls teinté de souffrance aux hurlements black emplis de détresse et vomissant un trop-plein d’émotions et de tristesses. Un chant féminin assez joli mais un peu niaiseux cependant (dommage) apporte une contrepartie onirique à cette sincérité doomesque. Les textes (très jolis) vont de l’anglais à l’allemand en passant par le latin.Quelques passages joués à l’orgue rendent le tout encore plus mystique et accentuent pour de bon l’aspect hors du temps de cette musique si belle.
Seul petit reproche que je ferai à ce morceau, les blancs entre les différent passages, qui malheureusement cassent le côté progressif de la pièce et donnent l’impression une dizaine de petits morceaux de 2 ou 3 minutes qu’un seul d’une demi heure. Mais cela n’enlève rien à la majesté et à la beauté des compositions, fort heureusement…
L’interlude bien nommé As Autumn Calls sert de transition avec la seconde grosse partie de l’album, les 18 minutes de Ode To Solitude, tout aussi bien nommée, à grand renfort de claviers, de mélodies cristallines, de flûtes et de mélopées enchanteresses…
D’une structure différente du morceau titre car conservant une ligne mélodique directrice, Ode To Solitude est aussi légèrement plus sombre et désespéré. Du clavecin et du violon font leur apparition, amenant le côté médiéval de l’album à son paroxysme. Tour à tour émouvante dans ses parties doom et reposante dans ses accalmies, la pièce nous conduit, à l’aide de mélodies tout aussi variée que somptueuse, vers la fin du disque.
Les mots manquent pour décrire ce qui se passe tout au long de ces album, et l’impression qu’on a quand le disque termine. On croirait avoir traversé tout les âges de ce monde passés, en explorant la part la plus mélancolique et désespérée de notre être. Assimilable à une errance désabusée dans les plus beaux coins de nature (à l’image de sa pochette), la musique d’Estatic Fear, de part sa sincérité, sa beauté et sa richesse, reste une des choses les plus touchantes qu’il m’a été donné d’entendre.
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