Fuck The Facts - Die Miserable
Chronique
Fuck The Facts Die Miserable
« Disgorge Mexico » nous avait laissé exsangues au fond d’un canyon façon « 127 heures » du père Danny Boyle, pris au piège d’un grindcore assez inhospitalier pour qui n’a jamais potassé le plus élémentaire guide de survie en territoire postcore. Au vu de l’intitulé du nouveau full length des Canadiens (« Die Miserable », que les choses soient dites !), on pensait enfin pouvoir mettre un point final à cette ballade sauvage et tourmentée à laquelle ne manquait qu’une étape par le Titty Twister, une cerveza tiédasse et une mise à mort en bonne et due forme par Santanico Pandemonium en personne. Une virée aussi intrigante et (souvent) jouissive ne pouvait décemment se finir que dans la sacro-sainte hémoglobine, pas sur un clap de fin aussi déroutant qu’une sortie de route Lynchienne conférant au flou le plus artistique. So what ? Quid de ce déjà 9ème full length ? « Lost Highway » ou « Mad Max 2 » ?
Le lointain split avec LENG TCH’E ayant entretenu le mystère sur les intentions de FUCK THE FACTS -
et vas-y qu’on te balance sans coup férir du pur grind bruitiste sans une once de mélodie ! - , bien malin qui aurait anticipé sur la teneur de la dite séquelle, laquelle prend un sacré contre-pied en proposant un contenu nettement plus traditionnel. Ô bien sûr, FUCK THE FACTS ne serait plus FUCK THE FACTS sans son goût affiché pour les bizarreries en tous genres et autres croisements hybrides entre salves extrêmes et fausses pistes bruitistes, une composante essentielle à l’avant-gardisme de la bête, mise quelque peu sous l’éteignoir ici au profit d’un bon gros death metal des familles ! Suintant le retour aux sources à plein pif, « Die Miserable » se permet donc de couper son mullet-core/bastardized grindcore avec quelques plans death identifiables entre mille, comme le démarrage rampant d’une « Cold Hearted » empruntant fortement à la trademark MORBID ANGEL, guitares lead malsaines à l’appui. FUCK THE FACTS qui vous prend aux tripes à l’ancienne en délaissant les dissonances pour un contenu plus normé, c’est pour mieux vous ensevelir sous une tonne de blasts délivrée avec maestria par un Mathieu Vilandré en grande forme sur « Drift », « Alone » ou encore « Census Blank ». Du total brutal couplé à des passages thrashy aussi amicaux qu’une série de droites dans les côtes signée Jean Marc Mormeck, non sans accroître la sensation de malaise avec ces relents de fin de civilisation qui faisaient toute la morgue de
« Disgorge Mexico » ; aliénation patonienne sur un title-track proche du FANTOMAS lugubre de « Delirium Cordia » avant le déluge sonore d’une « A Coward’s Existence » renvoyant BRUTAL TRUTH et son pénible « Endtime » dans les cordes, le must restant cette charge finale héroïque inattendue, avec force leads et adjuvants mélodiques entre deux parties de baston death/grind de rang.
Boosté par une production testéronnée au possible (Alan Douches, au rapport !), « Die Miserable », non content d’être plus accessible que ses devanciers, peut s’appuyer sur les qualités naturelles du combo d’Ottawa : à savoir une Mel Mongeon déchaînée dont le registre
over the edge fait souffler un vent de changement salvateur, un sens particulièrement aiguisé de la variation et du break qui tombe à pic (sans que jamais les compos ne se départissent de leur sauvage efficacité, bravo !) et bien sûr l’essentiel, une sacrée volonté d’en découdre de tous les instants ! S’appuyant sur une technique supérieure à la moyenne du genre, FUCK THE FACTS livre donc une grosse réussite qui aurait aisément pu figurer dans mon bilan 2011 si j’avais pu l’écouter à temps. Comme on dit, jamais trop tôt pour ratrapper une connerie et je ne résiste pas à la tentation de boucler cette chronique par quelques vibrants extraits de « 95 », qui rappelera quelques bons souvenirs aux vieux de la vieille :
J’aimerais y être encore. Ecouter mon walkman dans le tapis, ma vieille cassette tapée de fyp, que j’ai probablement reculée manuellement avec mon crayon mine, pendant la dernière période de classe. Pour sauver sur les batteries. Et le son du punk garage me rendre l’écho. Donner la réplique à ce qui m’anime. Et le marathon pour aller voir le plus de shows possible. Collectionner les billets et les flyers comme s’ils contenaient une partie de la soirée passée. (…) Sentir que le monde est devant toi. La certitude d’être unique. Perdre la notion du temps, qui a de toute façon de valeur que ce qu’on lui donnait. Sans pression, sans horaire, se laisser aller à travers. La journée, la semaine le temps, jamais mesuré. C’est sur un son de nostalgie que la porte s’ouvre sur les souvenirs d’une époque perdue, maintenant loin mais toujours perceptible. Une probable idéalisation du passé, dont les sons plaisants rebondissent au présent et se conjuguent avec ce moment, ce moment même où nous arrêtons. DONNEZ VOTRE AVIS
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