Temple - Structures In Chaos

Alors celle-là, je ne l'ai pas vue venir! Elle fait donc d'autant plus mal. Elle, c'est la première grosse claque de 2012. Suite à une proposition de chronique, je me connecte comme d'habitude sur Metal Archives pour savoir de quoi il retourne. Rien! Un groupe signé non référencé sur la Bible virtuelle du metal, voilà qui n'est pas banal (l'erreur est désormais réparée)! Heureusement, le fichier zip de la plateforme Haulix renferme une page pdf documentant la biographie du groupe. Et là, on comprend mieux pourquoi ça bute. Temple est un groupe néerlandais (premier gage de qualité) formé par A.J. van Drenth (ex-Beyond Belief) et Rachel Heyzer (ex-Sinister, Infinited Hate, Occult). La petite Rachel s'en est allée depuis mais A.J. est resté et complète le line-up par deux poids lourds de la scène extrême batave, Michiel Dekker (The Monolith Deathcult, ex-Beyond Belief et Dead Head) à la basse et Eric de Windt (Supreme Pain, ex-Deströyer 666, Inhume, Prostitute Disfigurement, Severe Torture, Sinister). Un joli trio de bœufs qui nous sort fin février sur Non Serviam Records son premier full-length, Structures In Chaos, dont la pochette ornée d'une pyramide maya rappelle celle du dernier Calm Hatchery en version bleue.

Bel artwork loin des clichés habituels du genre, line-up de luxe, ça commence bien. Et la musique dans tout ça? Du lourd, du très lourd! Temple pratique un brutal death de haute volée rappelant justement un des groupes du bassiste Michiel Dekker, The Monolith Deathcult, période The White Crematorium. Autant dire que ça charcute à tout va! Eric de Windt nous y dévoile sa face la plus extrémiste en ne lâchant jamais la double pédale et en blastant 90% du temps. Avec derrière une puissance de feu considérable générée par une production ultra dense. Intense, vous avez dit intense? Cette vélocité rythmique s'accompagne d'une tornade jouissive de riffs sombres en tremolo démontrant l'agilité technique de ses vétérans expérimentés qui en rajoutent une couche par le biais de brefs solos chaotiques comme sur l'introduction de "Higher Perfection". Impressionnant de puissance et de maîtrise!

Lassant? Même pas! Car à la différence d'autres combos modernes comme Hour Of Penance qui blastent dans le vent, Temple a toujours des riffs intéressants à délivrer, nous proposant des motifs bien dark et méchants jamais dénués de mélodies. La brutalité sans ambiance derrière ne sert à rien, les Néerlandais l'ont bien compris. Et puis si la musique du trio tend très souvent vers le pilonnage intensif, il s'accorde aussi des moments de répit qui ne cassent pas le rythme mais enrichissent les morceaux. Entre autres des "mid-tempos" evil et assez groovy sur fond de double rapide ("Higher Perfection" à 1'44, "Cover Her In Blood" à 3'19, "Among Ravens" à 1'44, "Matagatsubi" à 2'59...) et des breaks plus "calmes" ("Rituals Of Marduk" à 3'37, "The Algol Planet" à 0'42 lent mais imposant et à 2'42 où l'on peut respirer un peu, "Among Raven" à 3'28 sur une bonne lead mélodique et à 4'27 plus menaçant, le début de "Matagatsubi" avec quelques nappes de claviers, etc.). Comme quoi les morceaux s'avèrent bien plus variés qu'à première vue. Temple nous sort même un titre instrumental entièrement mid-tempo, le très réussi "Dead Sun Festival". Un riff écrasant répété en boucle avant qu'une chape de plomb vienne alourdir et assombrir davantage un horizon déjà bien chargé. Une putain d'ambiance prenante qui prouve le savoir-faire étendu de la formation.

Temple cache également d'autres talents qui le démarquent de la masse. Sous leurs airs de brutes épaisses, les Bataves offrent en effet sur ce Structures In Chaos une denrée rare de nos jours: de la personnalité. Au delà de la qualité intrinsèque de la musique du groupe très supérieure à la moyenne, on ressent en effet une véritable patte personnelle. Les thématiques mystiques nous changent des ritournelles satanistes et gores mais il n'y a pas que ça. Une grande part de la touche Temple tient ainsi dans le chant. Des vocaux originaux dans le death? Il fallait le faire! Pourtant, ce sont bien des growls qu'éructe le chanteur/guitariste A.J. van Drenth mais des growls puissants et imposants dont l'intonation forcée, exagérée et compréhensible les rend atypiques. Le combo s'est également fait plaisir en invitant au micro pas mal de potes plus ou moins connus de sa scène nationale: Marloes (Izegrim), Stephan Gebédi (Hail Of Bullets, Thanatos), Masae Dausend (Debt Of Nature), Sonja Schuringa et Sven van Dijk (Dictated). Michiel Dekker contribue également à cette diversité vocale bienvenue, les growls jouissifs de van Drenth laissant ainsi régulièrement la place à des shrieks/screams fort sympathiques. Sur la très romantique "Cover Her In Blood", c'est même du chant clair féminin qui fait son apparition. On a entendu mieux à ce niveau mais ça ne sonne pas du tout déplacé dans ce déluge de brutalité. Outre le chant, on a aussi le droit à quelques surprises au rayon purement musical. Notamment deux passages acoustiques à l'espagnol sur l'ouverture "The Algol Planet" et le final du dernier titre "Multiverse (Another Time And Space)", histoire de terminer sur une note raffinée. Et je ne terminerai pas sans évoquer le début de "Rituals Of Marduk". Pas de guitare sur ces premières secondes mais de la double grosse caisse ostentatoire et une façon de "chanter" qui me font penser à du hip-hop! Une comparaison peut-être incongrue mais il fallait que je le dise!

Quand je vous dis que la scène death metal néerlandaise est l'une des meilleures d'Europe! Temple en est une nouvelle preuve. Structures In Chaos porte bien son nom en nous bombardant de blast-beats et de riffs bouillonnants dans un chaos intense et maîtrisé jubilatoire. Et le pire c'est que l'on en redemande! D'autant que les Bataves aèrent leurs morceaux de breaks salvateurs et réussissent à leur insuffler une réelle personnalité, notamment vocale. Une réussite pour un album qui va marquer l'année 2012 de son empreinte... brutale!

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