Si j'ai du mal à concevoir Nevermore sans Jeff Loomis, je ne me fais aucun souci pour l'ancien guitariste du combo de Seattle. Car avant même la séparation, l'Américain aux doigts magiques avait sorti en 2008 un premier album solo,
Zero Order Phase, chef-d'œuvre absolu de metal instrumental qui m'avait envoûté au point de recevoir la plus haute note dont j'ai gratifié un album post-2000 avec
The Blackening de Machine Head. Pas vraiment désemparé par son split avec Warrel Dane, Loomis en a profité pour donner enfin un successeur à l'incroyable
Zero Order Phase en avril dernier, toujours chez Century Media. Pour ce deuxième chapitre, le sept-cordiste s'est entouré d'une équipe différente, laissant la basse à Shane Lentz que Jeff avait découvert par YouTube et remplaçant le batteur Mark Arrington par le belge Dirk Verbeuren de Soilwork que Warrel Dane avait déjà embauché pour son propre album solo
Praises To The War Machine.
Nouveau personnel mais pas nouvelle direction artistique. Jeff Loomis reste le seul maître à bord et fait sur
Plains Of Oblivion ce qu'il sait faire de mieux, avec quelques variations ici ou là. Les fans de Nevermore et du premier album solo du bonhomme ne seront donc pas dépaysés. On retrouve ainsi avec plaisir les rythmiques typiques de Nevermore entre groove moderne accrocheur, élans thrash bourrins et passages posés plus émotionnels. Petite nouveauté, on a aussi le droit à quelques séquences à blast-beats (quelques traces sur "The Ultimatum" et "Surrender" mais surtout sur le jouissif "Escape Velocity", morceau le plus rapide de l'opus). Une très bonne surprise mais après tout, est-il besoin de rappeler que Verbeuren a notamment fait partie d'Aborted? Sur ces différentes rythmiques, Jeff enchaîne les solos et autres leads dans son style caractéristique parfaitement mis en valeur par une production cristalline. Soit du shred véloce et démonstratif qui illustre une maîtrise technique sans faille mais qui n'en oublie pas pour autant les mélodies intéressantes, prouvant le talent de composition et le feeling de l'artiste. Un artiste qui aujourd'hui ne ressemble à aucun autre et dont on reconnaît la patte sur chaque note. Les trois premiers morceaux ("Mercurial","The Ultimatum","Escape Velocity") en sont la signature la plus convaincante. Quel début d'album, ça shredde, ça sweepe, ça gazouille sur des putain de riffs et des rythmiques ultra dynamiques. Jeff Loomis y tutoie la perfection et on se dit que le gus a réussi l'incroyable pari d'égaler voire surpasser son précédent monument.
Ce qui ne sera finalement pas le cas.
Plains Of Oblivion est un très bon album, excellent même sur tout un tas de passages à vous faire baver, mais non, il n'atteint pas la majestuosité de son prédécesseur. Et ce pour plusieurs raisons. On note d'abord une petite baisse d'émotions dans le jeu de Loomis qui se fait sur ce nouveau disque plus direct. Attention, le grand blond sait très bien faire parler sa guitare et véhiculer des émotions, s'accommodant sans souci de l'absence de chanteur, mais il n'y a pas de moments poignants à vous tirer la larme à l'œil comme l'était "Sacristy" sur
Zero Order Phase. Deuxième "problème", l'absence de réelles prises de risque. Jeff Loomis fait du Jeff Loomis et on ne l'en blâmera pas tant le nouveau quadragénaire domine sa catégorie mais il pourrait expérimenter davantage comme sur l'excellent "Continuum Drift" et ses sonorités plus originales et son feeling bluesy ou le formidable interlude acoustique "Rapture" et son intro à l'espagnole fort sympathique. Il serait sans doute bon d'élargir plus souvent ses horizons pour un éventuel troisième album sous peine de ressentir une routine désagréable malgré la qualité de jeu exceptionnelle. Dernière remontrance, le titre "Surrender". Le seul morceau véritablement mauvais de l'ex-Nevermore sur ce
Plains Of Oblivion. Si les riffs et les solos restent très corrects, il n'en va pas de même pour l'invité, Ihsahn, au chant. Contrairement à
Zero Order Phase,
Plains Of Oblivion n'est en effet pas un album entièrement instrumental puisque deux chanteurs sont conviés à la fête. Outre les guests guitaristes prestigieux que constituent Marty Friedman (si ce dernier a fait partie de Megadeth, c'est un peu grâce au jeune Jeff qui lui n'avait pas été pris mais l'a poussé à postuler) sur "Mercurial", Tony MacAlpine ("The Ultimatum"), Attila Vörös de Nevermore ("Requiem For The Living") et l'ex-Megadeth (décidément!) Chris Poland sur "Continuum Drift", Loomis a également fait appel à des chanteurs sur trois pistes: Ihsahn donc et Christine Rhoades. Si cette dernière, dont on avait pu entendre le timbre enchanteur sur "Dreaming Neon Black" de Nevermore, régale sur "Tragedy And Harmony" et "Chosen Time" sans toutefois émouvoir comme elle avait pu le faire sur le morceau-titre du très gothique
Dreaming Neon Black en 1999, ce n'est pas le cas de l'ex-Emperor dont les gueulements inopportuns irritent. Son chant clair passe mieux mais ce n'est pas encore ça. Je ne connais pas la carrière solo du bonhomme mais ce featuring raté ne me donne pas du tout envie de m'y plonger!
Malgré ce faux pas, inclure des vocaux sur quelques titres reste un choix judicieux et permet, outre de s'imposer comme la seule grosse différence avec le premier album, de rompre la routine et de donner une nouvelle dimension aux compositions. Et malgré les quelques critiques émises par un chroniqueur fan mais exigeant, je ne suis pas déçu par
Plains Of Oblivion, nouvelle réussite pour Jeff Loomis qui s'érige définitivement comme l'archétype du guitariste moderne et l'un des guitar heroes les plus doués de sa génération, utilisant l'influence de ses modèles (Becker, Friedman, Satriani, Malmsteen...) pour les transcender et créer une musique personnelle aux mélodies efficaces, à la technique instrumentale classieuse et aux rythmiques catchies qui n'aura aucune peine à convaincre les fans de shred et de Nevermore. La grande classe, quoi!
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