Jeff Loomis - Zero Order Phase
Chronique
Jeff Loomis Zero Order Phase
Putain quel con! Quel con de ne pas avoir écouté l'album solo de Jeff Loomis en temps et en heure. J'aurais pu ainsi le mettre tout en haut de mon bilan 2008. Parce que oui, cet opus est énorme, monumental, jouissif, divin et tout ce que vous voulez. Mes réticences initiales envers un album instrumental m'ont malheureusement freiné, malgré l'amour que je porte à Nevermore. Mais l'erreur est enfin réparée et je me réjouis de vous conter enfin les qualités de ce Zero Order Phase qui fait d'ors et déjà partie de mes albums cultes.
Après Warrel Dane et son très sympathique Praises To The War Machine, c'est donc le génial guitariste de Nevermore, Jeff Loomis, qui se lance en solo et qui du coup retarde d'autant plus la sortie d'un nouvel album de Plus Jamais, prévu seulement pour début 2010. Mais si Dane avait fait du bon boulot, Zero Order Phase l'enterre six pieds sous terre, de quoi attendre plus patiemment l'arrivée du successeur de This Godless Endeavor.
Aidé par Mark Arrington, tout premier batteur de Nevermore, Jeff Loomis nous offre un pur joyau. Ma première écoute se verra pourtant moins enthousiaste. Nevermore en tête, je trouve que la voix magique de Warrel Dane manque pour faire décoller les compos. N'importe quoi évidemment car les guitares de Loomis remplacent à merveille le chanteur: elles crient, pleurent, se font plaintives, nous bercent de mélancolie, bref elles nous font voyager à travers le panel d'émotions chères à Dane, ce qui rend d'ailleurs Zero Order Phase proche d'un album de Nevermore. L'ambiance sombre qui se dégage de l'ensemble ne faisant qu'accentuer le rapprochement. Mais la comparaison la plus évidente se fait avec la rythmique, typiquement nevermorienne. Arrington possède le même jeu groovy et léché que Williams et la guitare rythmique moderne, puissante, entraînante et parfois saccadée ne trompe pas.
Zero Order Phase peut dès lors se résumer de la sorte: une rythmique à la Nevermore le plus souvent mid-tempo plus ou moins rapide sur laquelle le chant de Dane est remplacé par une orgie de shred, de soli et de leads. Ah oui, avant de continuer, si le shred endiablé et les soli de manière générale vous donnent des boutons, quittez de suite cette page, cet album n'est pas fait pour vous. Essayez le gaz aussi d'ailleurs. Au bout du compte, on ne s'écarte jamais trop du groupe principal de Loomis. Seul "Cashmere Shiv" et ses soli de basse (par un certain Michael Manring) et de guitare fretless (signé Neil Kernon) aux sonorités orientales surprennent vraiment. Et en parlant d'invités, notez un solo de Pat O'Brien (encore un ancien de la maison Nevermore) sur "Rage Against Disaster" qui fait peine à entendre comparé à la démonstration de Loomis, ainsi que quelques échappées solitaires de Ron Jarzombek sur "Jato Unit" autrement plus convaincantes. Pour le reste, on est en terrain connu. Sauf que je ne soupçonnais pas Loomis d'un tel talent de guitar hero, surtout sur près d'une heure.
Parce que nom d'un foutre, qu'est-ce que c'est jouissif! Contrairement à d'autres shredders invétérés masturbant leur manche sans aucune poésie, Loomis titille son membre avec un doigté, un touché et un feeling classe, somptueux et ce sans nous exposer la liste des différentes techniques instrumentales. L'Américain, même s'il se fait plaisir, garde toujours comme objectif l'efficacité et l'accroche mélodique. Jamais redondant, jamais indigeste, jamais trop démonstratif malgré du shred de folie, c'est un exploit que réalise le bonhomme, surtout sur cette durée, dix morceaux pour pratiquement une heure de jeu. Tout ici est fluide, coule de source. Jamais à court d'idées, les soli sont tous non seulement impressionnants de maîtrise mais complètement addictifs grâce à un sens de la mélodie sans pareil. La semi-ballade "Sacristy", pièce majeure de l'oeuvre et un des meilleurs morceaux de metal que j'ai pu entendre, en est l'exemple le plus frappant. La mélodie d'intro, qui me donne des frissons à chaque écoute, y est à tomber par terre. L'outro "Departure", aux lignes acoustiques rappelant "Sentient 6", n'est pas mal non plus dans le genre grandiose. Je pourrais de toute façon citer tous les morceaux tant la richesse de Zero Order Phase est grande.
Vous excuserez ce panégyrique de fan boy mais c'est que cet opus a un dangereux pouvoir d'accoutumance. C'est bien simple, Zero Order Phase est pour moi le meilleur album de metal instrumental jamais composé. Pourtant, l'exercice est extrêmement périlleux car il est en effet difficile d'accrocher l'auditeur sans aucune ligne de chant, surtout s'il ne joue pas d'un instrument. Mais c'est auréolé d'un tout nouveau statut que s'en sort le prodigieux musicien. J'espère quand même qu'il restera à Loomis assez d'inspiration pour le prochain Nevermore. Oubliez Satriani, Malmsteen, Batio et Rusty Cooley, le shred a trouvé son nouveau maître!
| Keyser 17 Juin 2009 - 2745 lectures |
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