[ A propos de cette chronique ] Il y a, dans l'étagère à disques (ou dans le disque dur, c'est selon) de chacun d'entre nous un album que l'on ne se lasse pas de ressortir, que l'on sait intemporel car d'une qualité indéniable. Une galette qui nous emporte ailleurs, et que l'on défend corps et âme face à ses détracteurs. Passé à la postérité plus pour son imagerie et ses idées sulfureuses que pour son art, Fanisk a fait son petit bonhomme de chemin dans l'underground depuis la sortie de "To Die and Become", en 2002, qui présentait à l'auditeur un Black Metal atmosphérique, aux relents symphoniques et martiaux de très haute-volée. Le duo, composé de Vitholf et d'Eldrig (qui poursuit dans son projet solo personnel l'oeuvre de Fanisk, de manière assez quelconque) a splitté l'année dernière suite à une très longue pause, peu après la sortie de leur
"Insularum", album assez misérable qui aura bénéficié de la réputation de ses deux géniteurs. Séduisant les néophytes mais laissant les véritables amateurs de marbre face à tant de démesure et de facilité. Le phœnix n'aura pas su renaître de ses cendres, consumé par la majesté de l'album que je m'apprête à encenser.
"Noontide" représente, à mon sens, le sommet de la discographie du duo. C'est une perle de l'underground quasi-impossible à trouver en dur, le premier tirage ayant été limité à 18 copies (ben voyons), et le second étant épuisé depuis belle lurette (certains spéculateurs véreux faisant péter les prix pour l'objet de temps à autres). Cristallisant l'essence même de ce qu'est Fanisk, un Black Metal solaire, lumineux et majestueux, bourré de claviers, de cassures de rythmes et de riffs grandioses, l'album réussit à ne jamais être boursouflé, quoique constamment en équilibre sur la corde raide séparant la beauté du kitsch. Le duo y dévoile en soixante minutes et six titres son univers, son envie de puissance. Ces six titres, construits comme de véritables pièces de musique classique (le spectre de Wagner hante chaque note et chaque changement de rythme), s'enchaînent merveilleusement bien car suivant le même fil conducteur. Dôté d'un son assez correct, entre les débuts un peu plus crus et le son en plastique lisse de
"Insularum", "Noontide" brille par un son de guitare abrasif, des leads cristallins et une voix fantomatique, étouffée par l'ensemble, ce qui ne nuit en rien à l'opus en général. Seule ombre au tableau, cette boîte à rythme au son proprement infect, injuste quand la plupart des compositions s'articulent autour de sa rythmique sèche et inhumaine.
Tous très longs, les titres évoluent entre envolées complètement épiques et hallucinées (le titre "III" et sa dernière partie), introductions martiales nous ramenant soixante-dix ans en arrière ("IV") et parties véloces couplant blast-beats et tremolo-picking ("II"), plus classiques mais Ô combien efficaces ! Sans parler de ces cassures rythmiques, ces roulements écrasants (en témoigne "IV" et ses dernières minutes) qui viennent tordre le cou au schéma linéaire couplet/refrain auquel on pouvait s'attendre. Fanisk ne rentre dans aucun cadre, et c'est tant mieux. Tout ceci permet à ce "Noontide" de ne jamais lasser l'auditeur, chaque nouvelle écoute permettant la découverte d'un nouvel élément, d'une nouvelle tournure qui était passée inaperçue à ses oreilles jusqu'alors. La véritable puissance de Fanisk est indéniablement celle de faire naître chez celui qui s'y trempe un sentiment de puissance, et de transcender ce dernier une heure durant. Sans aucun autre répit que les interludes épiques au sein des compositions.
A mi-chemin entre la superbe d'un Limbonic Art et d'un Emperor, "Noontide" est un album unique, qui s'inspire de ses aïeux sans jamais les copier, s'appropriant les codes d'un Black Metal pour mieux les transformer, en y ajoutant instrumentations variées et synthétiseurs parfois un peu grotesques ("III", ou "La chevauchée des Valkyries" passée à la moulinette Bontempi). Non, je ne suis pas objectif et je loue intégralement ce disque, car, malgré quelques défauts évidents qui pourront gêner les prudes et les puristes, il reste l'un des rares albums à ne jamais m'avoir lassé ces dernières années. Epique, lumineux, véhiculant une idéologie (heureusement) morte et enterrée (ce qui, ne nous leurrons pas, peut contribuer à l'atmosphère de l'ensemble), "Noontide" est fait de cette même lumière baignant les albums cultes. A vous de vous faire votre propre idée de la chose, à présent.
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