« Changer d'avis n'est pas sale » m'a-t-on rappelé récemment. Donc non, ni douche, ni détour au confessionnal cette fois, malgré un retournement de veste en bonne et due forme concernant Nightslug de ma part. Il faut dire que ma première véritable rencontre avec les Allemands n'avait pas été des plus convaincantes, leur venue sur les planches du Molodoï (salle de concert bien connue des Strasbourgeois) m'ayant laissé une impression de bordel mal organisé, où le sludge typique de Grief côtoyait des élans entre stoner et crust arrivant sans trop savoir pourquoi. Un sentiment d'incohérence qui, mêlé à l'esthétique snuff outrancière de ses pochettes d'albums, m'avait fait ranger la bande parmi les « fakes » du sludge (remarque bête, on en conviendra, mais qui n'a jamais eu quelques mots stupides me jette la première pierre – Aïe ! Qui a fait ça ?).
Quelques semaines à écouter
Loathe m'ont fait ré-envisager la chose. Certes, les Allemands paraissent toujours capitaliser sur le malade pour présenter leur sludge, comme son artwork plus adapté pour un groupe de grind/powerviolence DIY le montre. Mais son caractère implacable, dérangé comme un serial killer obnubilé par ses meurtres au point d'en faire un album de coupures de journaux à leurs sujets se retrouve parfaitement dans ces nouvelles trente-deux minutes. Avec une production qui bande encore plus dure que celle du
Deteriorate des Italiens de Grime (Mmmh, cette basse qui grignote l'espace), une rigueur aux cheveux plaqués en arrière rappelant la scène industrielle la moins avenante et ce groove entre
It's Not Jazz, It's Blues de Daggers et
Idiopathic de Fistula, il est clair que ce deuxième longue-durée a de sévères arguments pour faire valoir son obsession pour les modus operandi de tueurs, maniaques jusque dans leurs coups de couteaux tournés et retournés avec contrôle.
Mais la grande victoire de Nightslug est ici de ne pas en faire trop dans le sado-maso s'apitoyant sur lui-même pour mieux se concentrer sur la pleine jouissance que contiennent ses riffs. On l'oublie souvent, amateurs que nous sommes des métaphores urbaines et égocentrées (nous avons tous été beaucoup trop fascinés par Taxi Driver, n'est-ce pas ?), mais un bon disque de sludge est avant tout de bonnes compositions de sludge, connement :
Loathe sait en distribuer par roustes entières, à commencer par un morceau-titre survolté, acide et rock, où la voix de J. Slug prend des allures de gargouillis satisfaits et assurés, loin des images d’Épinal de loser habituellement accolées au sludge. Une musique de gagnant, pleine de force et consciente de ses compétences dans ce qu'elle fait, son domaine d'expertise étant simplement le jeu à la Saw (cf. « Vile Pigs » et « Tainted Throne », début et fin s'appuyant sur quelques accords répétés inlassablement, prenants et impressionnants dans le même temps). Clairement, Broken Limbs, Dry Cough et Lost Pilgrims ne s'y sont pas trompés en signant le trio, tant il surpasse ici en tout point son premier longue-durée, le déjà convaincant
Dismal Fucker.
Avec son pressage à cinq-cent exemplaires prévus en version vinyle (précommandable en France à
cette adresse),
Loathe se destine clairement aux initiés sachant apprécier la sauvagerie sans détours marquant les meilleures œuvres underground. Un peu à la manière d'
Indian, Nightslug profite d'ailleurs de son format serré pour acculer de ses bruits parfois proches de Godflesh (« Pure » : plus qu'un clin d’œil). Sans ajouts superflus, il n'ennuie qu'à de très courts moments, que seuls les pointilleux regretteront (quelques prolongations en trop sur « Disease », selon moi). Manque juste à l'ensemble la petite dose supplémentaire pour dépasser la stade de la très bonne surprise. Enfin ! Un disque de sludge qui réussit sur tous les tableaux à la manière d'un golden boy ne serait pas totalement un disque de sludge !
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