2015 n'a pas fini de m'étonner. Après m'avoir poussé à des choses peu avouables (comme
aimer un disque de heavy metal), le voici à m'obliger une nouvelle fois à un exercice de courbettes et d'excuses, pratique que je déteste. Et donc, oui, j'avais tort de ne pas écouter plus tôt ce premier album de Cult Leader, désolé papa Cursed, pardon maman Converge. Il faut dire que
Useless Animal, leur précédent sept pouces, était plus inutile qu'animal, donnant raison à ceux ne voyant qu'en ce groupe fondé par des ex-
Gaza (seul Jon Parkin manque à l'appel), un groupe... fondé par des ex-Gaza, pas désagréable (l'EP
Nothing for Us Here, plutôt réussi), mais sans plus-value particulière et sans la touche personnelle de leur ancien hurleur, son chant névrosé, possédé, manquant clairement aux Ricains.
Ce n'est plus le cas aujourd'hui,
Lightless Walk offrant le visage d'une formation nouvelle, clairement issue d'une généalogie, mais prête à faire marche seule, grâce au parti pris de rendre le hardcore chaotique et sombre rencontré sur
No Absolutes in Human Suffering plus direct et proche des coups qui s'écrasent vers le sol que de la tête et ses idées noires. Si vous pensez que cette simplification fait perdre toute substance à la musique des Ricains, vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu'à la Chine (ça doit piquer) : c'est l'inverse qui se produit, ce premier album se montrant aussi terne et sentencieux que le précédent Gazier tout en ajoutant une dose de fureur raw à la formule déjà connue.
Ce qui suffit, pour l'amateur de hardcore couleur pétrole que je suis, à avoir quelques flashs délicieux du
Early Graves de Goner (l'enchaînement des deux premiers titres qui donne envie de courir le corps en équerre vers le mur le plus proche), d'
Admiral Angry avec une voix d'ours, d'une mixture Cursed/Crowpath remise au goût du jour et à laquelle les tendances fat et dissonantes n'auraient rien enlevé à sa douleur transmise au couteau, bien au contraire. Cult Leader ne donne jamais le temps de respirer et ce, même lors des incartades émotionnelles et froides que sont « A Good Life » et « Lightless Walk », deux titres où un chant clair façon Michael Gira donne à voir une face plus romantique du quatuor mais jamais très loin de l'arme à feu.
Sincérité, urgence, rage et autres clichés inhérents au hardcore (mais qu'on n'a aucunement envie de voir disparaître, pensez-vous !) : Cult Leader possède tout cela sur
Lightless Walk, servi par une production généreuse signée Kurt Ballou et suivant le climat général fait d'orage grondant et température négative. Passés quelques moments où le second souffle se cherche (sur « Walking Wastelands » et « Gutter Gods », moins dévastatrices que le reste mais vite rattrapées par la punitive « Hate Offering »), rien à critiquer sur ces trente-sept minutes, celles-ci possédant tout ce que je recherche dans le genre, plus une personnalité faisant de la bande menée par Anthony Lucero (dont les progrès au micro sont énormes depuis
Nothing for Us Here) une petite anomalie qui, malgré ses intentions cyniques plutôt à la mode, ne donne jamais l'impression de maquiller son propos ou de ne pas se révéler à la hauteur. Un disque à s'envoyer les sourcils froncés, les poings serrés, un sourire en coin balafrant la moitié du visage... Ah ! Content de vous revoir en grande forme, les gars !
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