Dire que j'ai failli passer à côté de lui ! J'étais rapidement tombé sous le charme de Sabbath Assembly à l'époque de sa première sortie, l’enivrant
Restored to One, hommage rendu à The Process Church of the Final Judgment (Google est votre ami). Mais la formation à géométrie variable – beaucoup d'invités et de changements de line-up, on s'y perd – m'avait rapidement semblé être une histoire d'amour passagère, ne parvenant pas à m'émerveiller comme elle l'avait fait quand Jex Thoth était encore de la partie. Pas moins de trois albums m'ayant laissé un souvenir un peu fade plus tard, j'avais presque tiré un trait sur la bande menée par Jamie Myers. Aucun soucis : dans le milieu de la musique, certaines relations sont d'un soir et d'autres pour la vie.
Seulement, malgré une période forte en rencontres donnant envie de multiplier les mariages (Subrosa, Bathsheba et King Woman ont récemment sorti de si beaux disques que la polygamie s'envisage comme projet viable), Sabbath Assembly parvient à retrouver un siège à part dans mon petit cœur de doomster, jamais rassasié quand il s'agit de lui conter des merveilles où la passion se vit comme une épopée. Hé ! N'en déplaise à ceux voyant encore cette féminisation du doom metal d'un mauvais œil caché sous un sourcil épais et dogmatique, ils feraient bien de rendre leurs costumes et apprendre à vivre avec des habits neufs, acceptant enfin que ce genre d'émotions a toute sa place dans le lourd, le lent, le groovy et le langoureux !
Rites of Passage, avec son cachet ancien (on pourra penser aussi bien à Jefferson Airplane qu'à Blue Öyster Cult), les mettra de toute façon en pièces avant de les tirer à quatre épingles, tant il apparaît, même pour qui n'a qu'un lointain souvenir des anciennes œuvres, comme un renouveau pour les Ricains.
Une chose qu'a appuyée Jamie Myers dans diverses interviews (comme
celle-ci) et qui se ressent grandement le long de
Rites of Passage. Sauvage, épique, aussi varié que fluide, ce nouvel essai possède une telle énergie, une telle soif, qu'il donne l'impression d'être un second souffle faisant encore plus tourner la tête que lors du top-départ. Dès « Shadows Revenge » et ses entremêlements de notes où les différents instruments ne font qu'un, Sabbath Assembly emmène avec lui dans son concept, racontant les différents stades marquant une vie jusqu'à des mélodies en mutation constante. Parfois douces et amères (« Does Love Die », magnifique ballade), parfois psychédéliques et enfiévrées (« Seven Sermons to the Dead », corrosif comme du Vhöl en pleine envolée) ou encore pesantes, transmettant le malaise qu'il y a à changer d'état (« The Bride of Darkness », final laissant en suspension un dénouement angoissant), ces quarante-cinq minutes s'assimilent à une pièce de théâtre déroulant ses scénettes comme autant d'actes marquant l'existence.
Une plongée dans le grandiose qui me rappelle le meilleur du Enslaved récent (
Vertebrae et
RIITIIR plus précisément),
Rites of Passage s'avérant si peu timide dans ses peintures qu'il donne la sensation de vivre intensément chaque chose le temps qu'il dure, pris dans une narration dont le sujet principal paraît l'écriture de notre biographie. Il faut dire qu'avec une chanteuse telle que Jamie Myers, transformée par l'exercice, impossible de ne pas être emporté ! Maternelle, séduisante, inquiétante, véritable cheffe d'orchestre, elle guide chaque composition de sa voix aussi grave que naïve, possédant à elle seule une aura à situer, lointainement, entre Grayceon et Subrosa. Une somme de rappels montrant que, auparavant groupe trop transparent, Sabbath Assembly est devenu une nouvelle référence, ses éléments, à commencer par le style sans pareil, aussi intelligent que nerveux, du couple Kevin Hufnagel / Ron Varod, exsudant un parfum capiteux, chargé d'histoire, où la cervelle peine à trouver un semblable.
Il y aurait tant d'autres choses à dire, d'autres moments à citer (« I Must Be Gone », mon Satan !), peut-être quelques mémoires à partager, concernant
Rites of Passage. Gagnant au fur et à mesure en qualité, il finit par devenir « le » disque de doom metal à écouter de toute urgence cette année. Certes, son dernier tiers, se passant un peu moins sur les chapeaux de roues, laisse entrevoir une petite marge de manœuvre pour Sabbath Assembly. Peu importe : parmi les nombreux sentiments qu'il procure, sentiments d'amour, sentiments essentiels, sentiments universels, il donne aussi celui d'être face à des débuts d'un futur grand groupe, de ceux qui transcendent les époques mais surtout transcendent les chanceux les écoutant. On ne dira pas le contraire, les Ricains auront mis du temps à commencer. Mais, bon sang, quel bonheur de les voir enfin partir !
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