« Death Maze doit autant à The Cure qu’à Darkthrone ». Je ne sais pas vous, mais quand une fiche promotionnelle contient ce genre d’affirmations, j’ai tendance à avoir directement la bave aux lèvres, impatient d’écouter cela.
Certes, sans cette annonce affriolante (on n’est pas loin de l’argument publicitaire déloyal me concernant), le groupe belge a déjà de quoi intéresser, notamment par la présence au line up de Gregory Mertz, hurleur d’un certain Daggers qui m’avait époustouflé avec
le transgenre It’s Not Jazz, It’s Blues ainsi que participant aux méfaits des morts-vivants du dancefloor de Necrodancer. Et, avant de faire passer le test de vérité au suspect pour voir si ses réponses collent à celles de Robert Smith et Fenriz, le post punk métallique, foncièrement noir et plein de groove de Deathmaze peut se voir comme un parent de ces deux projets plus que comme une lubie attrapée en cours de route. En effet, à la fois complètement de son temps et pris dans une nostalgie pour des courants datés, son pont entre les années 80 et notre époque actuelle ne paraît jamais opportuniste lors de ces vingt-trois minutes, la chose se déroulant ici avec un naturel, une simplicité, qui vont bien à ce premier essai enregistré en six mois. Des mélodies minimalistes où une guitare, une boite à rythme et une voix font confiance à leur feeling pour emporter l’auditeur.
C’est bien cela qui entête directement chez
Eau Rouge, les compositions attrapant l’oreille par des riffs tournoyants, au grain évoquant une cold wave de cave, au son en oscillation et à la beauté également chancelante. Clairement, les liens avec Darkthrone – pour le côté punk et primaire – et The Cure ne sont pas volés, bien qu’ils soient plus à voir comme des indications que des véritables maîtres révérés le long de ces six compositions. Le musicologue peut donc ranger ses outils d’évaluation, Deathmaze s’inscrivant avant tout dans une certaine esthétique du sombre, le chant grave et rocailleux de Gregory Mertz pouvant aussi bien évoquer les débuts de Amebix que les guitares étouffer de délicieux garrots école Sisters of Mercy.
En résumé,
Eau Rouge finit donc par s’échapper de ses influences revendiquées, marquant par la force de titres dont on a bien du mal à mettre en avant un plutôt que d’autres. Compact, l’album déroule son flot d’un trait, sans aucune envie d’appuyer sur « repeat » malgré des étincelles bien présentes, « The Last Light » et son refrain brumeux, « Flames Eternal » et son humeur maussade donnant envie de rouler la nuit en sa compagnie, le final « Cybercrime » à la majesté modeste touchant directement au cœur, terminant la plongée dans un frisson appuyant que tout cela n’est pas que gratuit... Me laissant à chaque fois épaté sans trop en faire, Deathmaze possède déjà dans son ombre de quoi faire rêver à des œuvres futures grandioses.
Et c’est bien là son plus grand défaut.
Eau Rouge se saborde lui-même par la grande frustration qu’il laisse une fois terminé, son hold-up se terminant si vite qu’il donne l’impression d’être un coup pour rien. Une critique que j’exprime souvent au sujet des sorties du label Throatruiner, décidément doué pour dénicher des formations aussi prometteuses qu’avares dans ce qu’elles nous donnent. Bien sûr, on pourra s’estimer heureux d’avoir ici une œuvre qui fait preuve d’autant d’élégance, mariant les ambiances et influences avec pertinence et émotions, mais avoir la gueule laissée en vrac ne freine pas l'envie de mastiquer un peu plus de cette musique-là. En somme, Deathmaze pourra paraître au passant comme un énième projet mêlant différents courants, le promeneur décidant au final de retourner vers
Okkultokrati pour avoir de quoi alimenter sa visite... mais ce dernier ferait bien de s’arrêter, car si l’on a vu parc plus grand, ce qui s’y passe la nuit tombée est des plus fascinants.
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