Evil Warriors - Schattenbringer
Chronique
Evil Warriors Schattenbringer (EP)
Deux ans et demi après la sortie du remarqué et réussi
« Fall From Reality » revoilà de retour aux affaires le combo de Leipzig via cet Ep qui reprend les choses où elles en étaient restées auparavant, tout en osant s'aventurer un peu plus loin dans la façon d'exécuter sa musique. Evoluant désormais sous la forme d'un quatuor il va proposer ici trois nouvelles compositions (ainsi qu'une Outro à rallonge) dans la droite ligne des précédentes, mais qui vont se montrer à la fois plus longues et plus haineuses qu'auparavant, chose qui semblait franchement difficile à faire, et pourtant... ! Car ce qui avait marqué cet opus c'était cette folie et ce sentiment d'oppression qui ne lâchait pas l'auditeur du début à la fin, tant cette galette se montrait tortueuse, violente et sans compromis, confirmant que malgré un ralentissement qualitatif notable de la part de ses leaders historiques le Black/Thrash avait encore des choses à dire, et savait encore être radical à outrance.
Autant dire que dès le démarrage de « Fliege » on se rend compte que les gars n'ont rien perdu de leur force de frappe et de la rage qui les anime, car la brutalité y est poussée ici à son paroxysme vu que les blasts les plus divers y sont massivement présents de façon quasiment continue. Heureusement quelques courts moments plus lents et lourds sont placés de façon judicieuse afin d'éviter une linéarité regrettable, mais aussi de pouvoir reprendre son souffle et densifier ainsi l'ensemble qui y gagne en nettoyage de cages à miel. Proposant de longues plages instrumentales (ce qui sera également le cas par la suite) le chant se retrouve présent de façon certes discrète mais se révèle être toujours aussi possédé et glaçant, tant le cri surgit du néant de Beast se fait bestial et déchiré afin d'insuffler un sentiment de primalité plus fort. Après cette ouverture explosive place au tout aussi redoutable « Wahrheit » et ses neuf minutes au compteur, qui vont montrer une facette plus froide et hypnotique mais où la vitesse n'est pas absente, loin de là. En effet ici les mecs osent plus jouer sur l'alternance des tempos en laissant de la place aux passages médium et lents pour s'exprimer correctement, et de façon récurrente après des déferlantes de rythmiques jouées à fond la caisse. Là-encore peu de place à la voix du frontman qui préfère se concentrer avec son acolyte guitariste sur des longs riffs déchirants et gelés, comme sortis du fin fond de l'espace à une température proche du zéro absolu, afin de rajouter encore plus de schizophrénie et de perturbation mentale auprès du mélomane averti qui ne sait plus où s'accrocher tant les variations y sont nombreuses. Cela va encore se retrouver dans la foulée via « Schattenbringer » qui enchaîne dans la droite lignée du précédent titre (en y gardant la même construction globale), à la différence près qu'ici les solos vont prendre une part plus importante à la réussite de cette compo qui atteint des sommets. Jusqu'ici forts discrets les leads vont être prépondérants et éviter ainsi toute redondance réelle ou supposée, tant ici on remet à l'honneur l'ensemble des différents tempos des Allemands, qui mélangent ici toute leur palette de jeu pour un rendu toujours implacable, où l'on se surprend à headbanguer et taper du pied avec vigueur, afin de clôturer les hostilités de la plus belle des façons.
Car après ce bijou en bonne et due forme la conclusion instrumentale de presque vingt-deux minutes (« - ») ne va strictement rien apporter, vu qu'on est plus proche d'une ambiance de science-fiction et d'une bande originale de film entre « Alien » et « Blade Runner », où hormis quelques rares notes électriques l'on ne trouve nulle trace de vocalises et de batterie. Du coup il est indéniable que le pari osé est relevé haut la main, et confirme que ses géniteurs sont à l'heure actuelle parmi les groupes les plus intéressants de la scène extrême, qui arrivent toujours à écrire avec une facilité déconcertante (et sans lasser) des morceaux dépouillés qui ne tombent jamais dans la répétition. En attendant un prochain album que l'on espère entendre rapidement on se contentera sans problème de ce court-format particulièrement vindicatif et aguicheur, qui conserve sa forme bas du front et primitive tout en essayant (avec brio) d'aérer et varier son style au maximum, ce qu'il arrive à faire aisément. Bref du tout bon qui défoule et fait du bien, ce qui en cette période de chaleur estivale est toujours agréable et bienvenu, prouvant également que la scène brutale d'outre-Rhin est actuellement une des plus agréables à suivre.
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