Bütcher - 666 Goats Carry My Chariot
Chronique
Bütcher 666 Goats Carry My Chariot
Bien que Bütcher ait ouvert son enseigne en 2002 du côté d'Anvers, je ne n'y avais encore jamais pénétré. Il faut dire aussi que les Belges ne présentaient pas un étal très fourni avec deux malheureux amuse-gueules avant de raccrocher leur tablier en 2007 puis de rouvrir sept ans plus tard pour enfin proposer une première pièce de choix en 2017, Bestial Fükkin' Warmachine, en collaboration avec l'épicerie locale Babylon Doom Cult Records. Le combo remet le couvert début 2020, cette fois avec les voisins français d'Osmose Productions, pour nous en servir une deuxième. Il faudra encore attendre la fin de l'année dernière et un lobbying acharné de pas mal de monde pour que je daigne enfin m'asseoir à la table des Bouchers d'outre-Quiévrain.
Pourtant, illustré par une pochette pareille, appuyé par une maison de disques culte et auréolé d'une étiquette speed metal alléchante, 666 Goats Carry My Chariot aurait dû tomber dans les priorités. D'autant que l'on y retrouve le batteur LV Speedhämmer des excellents Schizophrenia et Skelethal. Depuis l'enregistrement, l'ancien bassiste de Evil Invaders AH Wrathchylde est venu prêter main forte au groupe ainsi que le guitariste Max Mayhem (Evil Invaders). Sur ce 666 Goats Carry My Chariot, c'est toutefois bien un trio qui fait tout ce boucan. En plus de Speedhämmer, nous avons le chanteur R Hellshrieker (ex-Battallion) et la tête pensante KK Ripper (ce pseudo, ça veut tout dire ! ) chargé de la guitare, de la basse, des chœurs et de la composition.
Il n'aura pas fallu longtemps à l'écoute de l'opus pour me ranger derrière l'avis général. "Buzz" complètement justifié pour Bütcher qui fait là vraiment très fort ! Quel pied, ce truc ! Par contre, si modernisme et originalité sont vos chevaux de bataille (peu de risques que vous ayez cliqué sur la chronique cela dit vu le titre de l'album on ne peut plus cliché), vous pouvez d'ores et déjà faire demi-tour. Ici, on se vautre corps et âme dans la nostalgie et le passéisme pour un retour dans les années 1980 à la gloire du trüe metal sur fond de blackened speed/thrash old-school mené la plupart du temps le couteau entre les dents comme dirait un certain collègue. À tel point que l'on a l'impression que chaque plan, chaque riff, a été pensé comme un hommage à un groupe en particulier. Ça c'est du riffing à la Whiplash ("45 RPM Metal", "Metallström/Face the Bütcher", "Sentinels of Dethe"). Là c'est plutôt du Slayer (riff à 2'26 de "Metallström/Face the Bütcher", rythmique vocale des couplets de "Sentinels of Dethe" calquée sur "Reborn"). Ah tiens on entre en territoire black/thrash sur le morceau-titre épique mid-tempo (neuf minutes !) et son intro acoustique à la Desaster enchaîné par un riff 100% Deströyer 666. Hey encore du D666 avec "Viking Funeral" et du Desaster sur "Brazen Serpent" ! "Sentinels of Dethe" à 1'10 et 2'01 ça sent le Nifelheim. Wow du Hellhammer ("Viking Funeral" à 2'02 et "Brazen Serpent" à 4'43) ! Oh ça sonne comme l'intro de "Am I Evil?" de Diamond Head ("Metallström/Face the Bütcher") ! Haha le chanteur imite King Diamond ("666 Goats Carry My Chariot", 5'51) ! Ça fait pas penser à Destruction là ("Sentinels of Dethe" à 0'35) ?! Des séquences comme celles-ci, il y en a tout au long de l'œuvre. On peut aussi rajouter les influences de Agent Steel, Bathory ou encore Venom et rapprocher Bütcher de nos chers compatriotes de Hexecutor et des déglingos norvégiens de Deathhammer. Il est également amusant de noter que l'album commence gentiment en mode heavy metal (la petite lead mélodique sur l'intro instrumentale "Inauguration of Steele"), passe ensuite à du speed plus frénétique à base de tchouka-tchouka endiablé pour finir sur du black/thrash plus extrême avec même une ou deux blastouilles.
Alors oui tout cela fait très patchwork et certains enchaînements s'avèrent un peu mal amenés et manquent de cohérence. Non, Bütcher ne brille pas par sa personnalité. On pourra aussi reprocher une fin en eau de boudin sur l'outro instrumentale acoustique "Exaltation of Sulphur" qui nous propose certes un joli couple de guitares mais trop vite séparé car aussi éphémère que l'intro (1'15). Un peu plus de développement n'aurait pas été du luxe, d'autant que cela partait plutôt bien. Mais comment leur tenir rigueur de ce côté fourre-tout quand le résultat s'avère aussi efficace et incroyablement jouissif ? Les guitares sont aiguisées et abattent un travail formidable avec des riffs inspirés et des solos bien à l'ancienne, le rythme reste saignant quasiment tout du long et il y a un aspect fou-furieux des plus jubilatoires qui s'en dégage, en particulier grâce au chant de possédé au timbre arraché de Hellshrieker qui n'a pas volé son nom. Ce dernier ne se montre peut-être pas aussi habité que le mec de Stälker, autre tuerie speed de l'année précédente, mais son registre varié qui va des montées aigües à du growl, ses intonations enragées et son débit souvent rapide apportent beaucoup de folie à l'opus. Une sacrée performance et si on évoquait le manque de personnalité, le frontman apporte au moins beaucoup de caractère. Il faut prendre 666 Goats Carry My Chariot pour ce qu'il est : un gros kiff rétrograde, une ode aux années 1980. Très tendance ces derniers temps mais parmi la palanquée de groupes s'adonnant à ce type de plaisir conservateur, Bütcher et son nouvel album font très certainement partie de ce qu'il se fait de mieux.
| Keyser 24 Mars 2021 - 2232 lectures |
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1 COMMENTAIRE(S)
citer | Je m'y suis aussi mis récemment et mon constat est le même que le tien, quelle claque ! Première moitié en full speed et seconde moitié plus orientée black "posé", aucune lassitude. Et dans ce contexte-là, le côté cliché au maximum est ultra-plaisant. |
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1 COMMENTAIRE(S)
01/04/2021 14:22