Devotion - The Harrowing
Chronique
Devotion The Harrowing
Si la scène extrême venue d’Espagne semble connaître un second souffle depuis quelques temps elle le doit principalement au Black et au Death dont plusieurs noms intéressants ont émergé ces dernières années, et parmi eux DEVOTION qui est désormais entré dans le giron des locaux de Memento Mori. Si les signatures récentes du label ont été dans l’ensemble assez inspirées celle du quintet de Valence ne va pas faire tâche également, tant son deuxième opus montre un Metal de la mort à l’ancienne, où vitesse et surtout lourdeur sont de la partie, portées par une production bien grasse qui n’est pas sans rappeler les grandes heures du mythique studio Morrisound. Car en un peu plus de trois-quart d’heure le combo nous propose un condensé de gros son 90’s typiquement venu de l’autre côté de l’Atlantique, qui fait du bien par où ça passe même s’il est certain que celui-ci ne concurrencera pas les cultissimes formations américaines.
En effet bien que proposant quelque chose de très sobre et classique la musique des espagnols va montrer certaines limites et carences, à défaut d’être rédhibitoires, mais qui vont limiter l’impact final de ce disque, ainsi que leur marge de progression pour le futur. Néanmoins l’ensemble démarre bien avec la très agréable doublette « God Forlorn » / « Megiddo’s » particulièrement lente et rampante aux accents doomesques affirmés même si les accélérations et explosions de violence ne sont pas absentes, tout comme les nappes de claviers angoissantes et récurrentes, pas forcément du meilleur goût. Si tout cela n’est pas d’une exécution folle ça reste quand même bien foutu et surtout sans excès techniques inutiles, preuve encore sur le très bon « Valley Of Death » plus sombre et obscur dont certains plans au niveau des riffs peuvent faire penser à BOLT THROWER, tant le côté massif et grassouillet (là-encore majoritaire) y est mis en avant, remplissant ainsi parfaitement son rôle. Mais après ce début réussi et fort sympathique l’ensemble va tomber dans un faux-rythme et faire ainsi progressivement décliner l’intérêt, tout d’abord avec « Birth Of Horror » où les mecs lâchent enfin les chevaux côté tempo montrant que leur musique est redoutable quand elle accélère. Si elle offre effectivement un rendu propice au headbanging l’arrivée de cette espèce d’orgue va casser la dynamique générale en ne servant pas à grand-chose et surtout en étant mixé beaucoup trop en avant, donnant de fait un sentiment légitime de gâchis tant le tout partait vraiment bien. S’il va encore faire parler de lui sur « Feast Of Esdras » c’est aussi l’écriture répétitive qui va plomber cette compo au manque d’accroche, point que l’on verra aussi par la suite sur « The Mournful Beam » putride à fond mais où les relents Doom sont poussés à leur paroxysme mais sans jamais en sortir, d’où un sentiment légitime de redondance (dû aussi à des longueurs évitables).
Heureusement après ce coup de mou le dernier tiers va reprendre des couleurs, tout d’abord via l’excellent et entrainant « Demon Sleep » où un long solo tout en mélodie vient apporter de la lumière au milieu de cette ambiance poisseuse et désespérée (confirmant que quand ils osent un peu plus les gars tiennent largement la route), que l’on retrouve enfin avec la longue conclusion intitulée « Virtue Besmirched ». Durant huit minutes la bande nous balance un condensé de tout ce qu’elle a proposé de mieux jusqu’à présent et cela fait mouche (malgré sa durée), via une série de ralentissements et moments de furie qui s’enchaînent sans coup férir et de façon réussie. Du coup au risque de se répéter on ne peut que regretter qu’elle n’ait pas plus joué auparavant sur ces rythmiques rapides au lieu de vouloir s’obstiner trop fortement sur les passages pachydermiques, pas mauvais en soi mais trop récurrents.
Manquant d’homogénéité dans son interprétation (où les instants quelconques succèdent à ceux plus convaincants) et ponctuée d’interludes servant surtout à briser une certaine dynamique, cette œuvre des ibériques ne les placera pas dans le haut de la hiérarchie des formations de leur pays, tant il leur reste encore à faire pour accéder au haut du panier. Néanmoins même si c’est loin d’être parfait il y’a quand même de bonnes choses qui sont présentes tout du long, certes c’est relativement interchangeable et ça s’oubliera très vite une fois arrivé au bout de cette galette, mais le tout bénéficie d’une intéressante fluidité et surtout d’une grande sincérité, même si pour l’originalité on repassera. Aux ibères désormais de gommer les fautes et erreurs entendues ici et là afin de pouvoir espérer mieux qu’une sortie en catimini, vu que ça n’ira hélas pas plus loin qu’un cercle très restreint de puristes en manque de sensations fortes. A voir donc si le troisième volet sera d’un autre calibre car le potentiel est là il ne demande juste qu’à s’affiner plus, à condition cependant de lâcher le frein à main avec lequel ils donnent ici la sensation de jouer beaucoup trop régulièrement, ce qui est regrettable.
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