Il y a quelques mois, lors de ma chronique du premier album de Frozen Soul, j’avais mis une pièce sur la forte probabilité que le prochain groupe issu du roster Maggot Stomp Records a être signé sur un label d’envergure soit les Américains de 200 Stab Wounds. Malheureusement, je n’ai pas su viser juste puisque s’il n’a pas fallu plus d’un mois avant que l’annonce d’une nouvelle signature sur Century Media soit actée, celle-ci ne concernait pas le groupe de Cleveland mais leurs copains de Sanguisugabogg. Une surprise dans la mesure où le groupe qui continue ici de s’inspirer d’Undergang, Disma et autre Mortician, ne respire en effet pas la grande intelligence. Pour autant, le label de Robert Kampf a su rapidement flairer le potentiel de ces quatre garçons plein d’avenir et ainsi les attirer dans ses filets...
Intitulé
Tortured Whole, ce premier album joliment illustré par Nightmare Imagery (Church Of Disgust, Engrossed, Putrid Tomb, Undeath...) propose à l’auditeur expérimenté de reprendre les choses là où la formation de Colombus les avait laissé il y a un petit peu moins de deux ans maintenant lors de leur excellente première démo intitulée
Pornographic Seizures. Pour les novices qui n’ont encore jamais rencontré la formation, sachez que tout ce que l’on peut lire à son sujet est vrai. Oui, le groupe a probablement sorti plus de t-shirts dans sa courte carrière qu’il n’a composé de morceaux et publié de disques. Oui, les membres de Sanguisugabogg semblent avoir des goûts pour le moins douteux, prenant notamment un immense plaisir à se filmer complètement défoncés à la weed en écoutant leurs propres morceaux. Oui, le niveau intellectuel de son Death Metal d’homme des cavernes frôle le néant. Est-ce que cela en fait pour autant un groupe peu fréquentable et indigne d’intérêt ?
Si on laissera bien évidemment à chacun la liberté de se positionner en fonction de ses propres valeurs, convictions et goûts personnels, il n’empêche que Sanguisugabogg n’a pas volé le buzz qu’il suscite. Avec son Death Metal de débiles profonds, ses clips signés Troma Entertainment, son mauvais goût assumé ainsi que son second degré et son auto-dérision pour le moins rafraichissants, le groupe a largement réussi à tirer son épingle du jeu malgré les limites évidentes de son propos. N’attendez donc rien de plus de la part de Sanguisugabogg qu’un Death Metal particulièrement primitif qui brille notamment par l’extrême lourdeur de ses riffs à trois notes, par la qualité de sa production ultra compacte et naturelle (les délices de cette caisse claire casserole qui résonne bien comme il faut, sans jamais trop prendre de place) et par ce groove d’homme de cro-magnon aussi peu subtil que sauvage.
Si la formule reste sensiblement la même tout au long de l’album, on appréciera quand même le fait que Sanguisugabogg ait choisi d’y intercaler deux interludes ("Pornographic" et "Interlude") histoire de rompre comme il faut avec une certaine monotonie pouvant naturellement s’installer à l’issu de quatre ou cinq morceaux enfilés à la suite. Composé de riffs bien épais et "chuggy" plus techniques et alambiqués qu’il n’y paraît de prime abord (il suffit de prêter une attention à ces moments où Cameron Boggs se plaît à tricoter sans en faire des caisses),
Tortured Whole se caractérise par cette dynamique pataude qui confère à ce Death Metal son côté extrêmement limité et bas du front et à ces compositions cette espèce de groove irrésistible idéal pour chiller en fin de soirée dans son canapé. Le growl ultra guttural de Devin Swank ainsi que la basse hyper saturée de Ces Davis viennent rajouter quant à eux de la profondeur supplémentaire à un Death Metal qui pourtant ne manque pas d’épaisseur. Néanmoins, à toutes ces séquences baveuses et chargées, viennent s’opposer quelques accélérations bienvenues ("Gored In The Chest" à 1:12, l’entame entêtante de "Dragged By A Truck" reprise un peu plus loin à partir de 0:50, "Dead As Shit" à 2:17, "Tortured Whole" à 2:28, "Urinary Ichor" et ses atours Brutal Death à 1:35...) qui vont ainsi permettre d’apporter une toute autre dynamique à ces quelques compositions sans pour autant dénaturer le propos particulièrement bas de plafond de Sanguisugabogg.
Toujours aussi prompts à la défonce et à la déconne, les Américains de Sanguisugabogg signent avec
Tortured Whole un premier album dans la droite lignée de leur première excellente démo. Si je ne suis pas certain que le public habitué des sorties Century Media soit particulièrement réceptif à ce genre de Death Metal au QI bien peu élevé, je reste pour ma part sous le charme de cette formule qui n’implique qu’une chose, celle de dodeliner plus ou moins tranquillement de la tête sans se poser de question si ce n’est par exemple de savoir qui est-ce qui est le plus fort, l’hippopotame ou l’éléphant (attention il y a un piège, parce que l’hippopotame il est quand même très très fort!) ?
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