Cold Earth - Your Misery, My Triumph
Chronique
Cold Earth Your Misery, My Triumph
Si certains groupes essaient tant bien que mal de dissimuler leurs influences et de faire comme s’ils ne devaient rien à personne, il y en a d’autres qui au contraire ne s’en cachent pas et font de chaque occasion un prétexte pour rendre hommage à ces formations qui les ont tant marqués. Baptisée Cold Earth en référence au premier album de Judas Iscariot (The Cold Earth Slept Below...), cette nouvelle entité allemande dans laquelle on retrouve des membres de Shores Of Ladon, Thorybos et Stygian Temple fait évidemment partie de la seconde catégorie. D’ailleurs, outre cette reprise de "Spill The Blood Of The Lamb" dispensée en fin de parcours, on trouve dans le livret de ce premier disque la note suivante : "This album is a tribute to Judas Iscariot and the protagonists of the radical late 90’s / early 00's Black Metal movement". Le genre de phrase qui va balayer d’un revers de main n’importe quelle interrogation relative à la sacro-sainte question de l’originalité...
Sorti en mai 2020 sur Sol Records, Your Misery, My Triumph est de ces albums que l’on a envie d’aimer ne serait-ce que pour la qualité de son artwork. Cette oeuvre sur laquelle souffle un blizzard glacial traduit à elle seule tout ce que le nom du groupe et ce titre peuvent évoquer comme images dans l’esprit de ceux qui poseront leurs yeux dessus. Une plongée dans des paysages hostiles et décharnés battus par des vents glacés et implacables où l’homme se doit de lutter pour sa survie... Mais au-delà de cette illustration particulièrement captivante, les qualités premières de cet album sont assurément à chercher du côté de ces quelques compositions savamment composées et interprétées.
En effet, si on laissera volontairement de côté cette notion d’originalité, il faut cependant bien reconnaître à Cold Earth cette faculté qu’il a de se réapproprier des codes d’une autre époque lors de laquelle des groupes tels que Judas Iscariot, Demoncy, Krieg, Abazagorath, Profanatica, Leviathan, Black Funeral et autre Xasthur contribuaient à façonner ce que l’on qualifierait rapidement de vague USBM. Et si Your Misery, My Triumph est un album qui ne réserve effectivement aucune surprise, il a néanmoins pour lui des compositions particulièrement bien ficelées et surtout extrêmement efficaces.
C’est en effet le couteau entre les dents, sans un bonjour ni même un bienvenu glissé en guise d’introduction que les Allemands lancent sans attendre les hostilités sur fond de blast-beats frénétiques et aliénants, de riffs décharnés aux mélodies glacées et de hurlements meurtris soufflant implacablement sur nos oreilles comme ce blizzard sur ces deux pauvres marcheurs bravant les éléments coûte que coûte. Une formule que Cold Earth va s’appliquer à mener tout au long de l’album en y apportant tout de même parfois un brin de nuances comme c’est le cas sur l’excellent "And Then, I Awoke From Deceitful Dreams", seul titre ici à véritablement calmer le jeu avec ses deux premières minutes exécutées sur un ton beaucoup plus posé et contemplatif. Alors on trouve évidemment quelques moments moins tendus tout au long de ce premier album comme par exemple sur "A Harrowing Gaze Of Torment", "Inscriptions At The Cemetery Gates" ou "Thy Tears Of Blood Grace My Eternal Grief" mais ces moments sont tout de même de courtes durées et ne servent que de transition avant que Cold Earth n’embraye sur un nouvel assaut. Pour autant, aussi courtes soient-elles, ces séquences vont quand même permettre d’apporter un soupçon de relief à une musique radicale dont le point faible, enfin surtout pour ceux qui aiment pinailler, pourrait être ce caractère un brin monotone et systématique induit par ce rythme pour le moins soutenu...
Au-delà de cette intensité qui n’est pas sans rappeler celle imposée par les Canadiens de Forteresse et Serment, il faut bien voir que Cold Earth propose des compositions particulièrement bien écrites avec pour chacune une quantité de riffs et de trémolos à vous glacer le sang et de mélodies hivernales et sinistres qui vont naturellement nourrir ces atmosphères délétères et implacables que le groupe se plaît à distiller durant ces trente-et-une minutes particulièrement soutenues. Une formule qui n’a absolument rien de sorcier ni de nouveau mais que Cold Earth va dérouler avec une aisance et une efficacité qui vont ainsi le placer sans souci parmi les meilleurs représentants du genre et, au passage, parmi les meilleures découvertes de 2020.
Classique sur le fond comme sur la forme, Your Misery, My Triumph ne bouleversera pas le petit monde bien souvent figé du Black Metal dont les divers codes gardent naturellement une importance capitale (comme dans n’importe quel style finalement). Pour autant, malgré toutes les références évoquées dans cette chronique ou bien à la simple écoute de ces quelques titres, il ne fait absolument aucun doute que Cold Earth est une formation ayant énormément de potentiel. Ce premier shot offert l’année dernière en est la preuve la plus flagrante et ne manquera pas de combler tous les amateurs de Judas Iscariot auquel les Allemands font ici sans cesse référence et plus généralement aux amateurs de Black Metal d’obédience américaine. Rien de neuf sous le soleil mais un disque foutrement bien ficelé qui possède ce petit goût de reviens-y.
| AxGxB 9 Avril 2021 - 1106 lectures |
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