Markgraf - Markgraf
Chronique
Markgraf Markgraf
J’ai beau répéter à longueur de chroniques que l’originalité n’a en ce qui me concerne que très peu d’importance, il y a toujours un groupe qui débarque de nul part pour me rappeler à quel point s’autoriser à sortir ainsi des sentiers battus peut tout de même être l’une des choses les plus cool que l’on puisse faire en musique... Ce groupe, aujourd’hui, c’est Markgraf. Un trio allemand improbable composé notamment d’un chanteur d’origine brésilienne amateur de Bossa Nova et d’un batteur de Rock et de Jazz qui n’a jamais trempé ne serait-ce qu’un petit doigt dans le monde de la musique extrême...
Sur le papier, il y a donc de quoi s’interroger et surtout ne pas avoir particulièrement envie de poursuivre la lecture de tout ceci. Heureusement, pour vous convaincre d’y jeter quand même une oreille même distraite, il y a cet artwork somptueux signé de l’artiste néerlandais Dávid Glomba (Cult Of Fire, Malokarpatan, Teitanblood, Shrine Of Insanabilis...). Celui-ci signe à l’occasion de ce premier album éponyme disponible chez Blutrausch Propaganda (Cross Desecration, Elderhex, Necromancer...), une oeuvre captivante largement inspirée par le célèbre Trinkhalle de Baden-Baden, ville dont est évidemment originaire le trio et qui va également servir de toile de fond aux histoires racontées par le chanteur Ódio dans les paroles de ces quelques compositions.
Pour ce disque qui servira pour beaucoup d’entre vous d’introduction à l’univers du trio (car certains les ont peut-être déjà découvert grâce à leur première démo sortie l’année dernière), Markgraf n’a pas eu les yeux plus gros que le ventre. Sept titres, une petite trentaine de minutes, rien qui ne puisse effrayer l’amateur de Black Metal capable de sortir de sa zone de confort. Car s’il y a bien une chose qui distingue ce premier album, c’est de ne ressembler à aucun autre. Pourtant, Markgraf n’a rien inventé et sa formule n’est finalement qu’un mélange d’influences diverses et variées provenant cependant d’horizons différents. Et c’est justement cette audace à faire cohabiter des sonorités si marquées et pourtant si éloignées les unes des autres qui fait aujourd’hui toute la singularité de Markgraf.
Aussi, comme je vois que vous n'en pouvez plus d’attendre que je lâche le morceau, la chose la plus remarquable à propos des Allemands et celle qui fait donc toute la différence est assurément la voix atypique d’Ódio. Un chant théâtral et haut-perché calqué à la perfection sur celui de Tim Baker, célèbre chanteur au timbre si particulier des excellents Cirith Ungol. Si les Américains sont considérés par beaucoup comme l’une des références majeures en matière de Heavy/Doom épique, peu de chanteurs se sont pourtant risqués à marcher dans les pas de monsieur Baker. Aussi surprenant que cela puisse paraître lors des premières écoutes, il faut pourtant avouer que le résultat est particulièrement convaincant. D’autant qu’en plus de cette ressemblance saisissante et de l’originalité évidente qu’elle apporte, cette voix va insuffler à ces compositions une atmosphère élégante et aristocratique qui là encore, concours à la particularité de Markgraf.
Un sentiment que l’on va d’ailleurs retrouver jusque dans la musique, notamment grâce à ces riffs dont les mélodies évoquent une certaine noblesse en dépit d’influences citées on ne peut plus à l’opposée de toute idée de bienséance induite par ce statut social (Sarcófago, Archgoat ou Merciless). Si ces groupes ont pu jouer un rôle dans la composition de ce premier album, c’est assurément l’influence des Tchèques de Master’s Hammer qui semble la plus évidente à l’écoute de Markgraf (et par filiation des groupes tels que Malokarpatan ou Krolok). Outre cette production âpre et rachitique qui évoque ces sorties Black Metal du début des années 90 ou ces clins d’oeil nombreux et évidents à la scène Heavy Metal, on va retrouver chez les Allemands ces mêmes compositions grandiloquentes un brin dégingandées et bancales ainsi qu’un certain esprit de liberté bien loin de n’importe quel standard en matière de Black Metal. À cela va s’ajouter un jeu parfois plus Rock si ce n’est Jazz que Black Metal. Pour s’en rendre compte il suffit de prêter attention à certaines séquences de batterie particulièrement variées et non dénuées de feeling (flagrant sur le jeu de cymbales de titres tels que "Der Mummelsee", "Die Nixe Des Wildsees" ou "Der Grafensprung ») ainsi qu’à certains riffs, mélodies et autres solos ("Burkart Keller Von Yburg" à 2:01, l’entame de "Die Nixe Des Wildsees", "Engels - Und Teufelskanzel", "Die Geisterhochzeit Zu Lauf") aux sonorités tout simplement plus accessibles. Bref, tout un tas d’éléments qui font que la musique de Markgraf - bien qu’elle reste indiscutablement encrée dans le genre - s’inscrivent bien au-delà des frontières du Black Metal.
Si tout n’est pas parfait sur ce premier album (quelques riffs moins pertinents, notamment en fin de parcours ainsi qu’une batterie qui manque peut-être un peu de maitrise sur les blasts (probablement dû au manque d’expérience sur le sujet)), on reste tout de même sous le charme de cette musique étrange aux associations pour le moins inattendues. Ce qui est en tout cas certain c’est que l’amateur de Black Metal et de Cirith Ungol risque lui de ne pas en revenir tant le mariage des deux, en plus d’être particulièrement surprenant, fonctionne finalement à merveille. Enfin, si ce disque vous a réjouit, sachez que la suite est d’ores et déjà bouclée et qu’elle ne devrait donc pas trop tarder à arriver. En attendant, il reste encore quelques vinyles chez Blutrausch Propaganda à l’heure où j’écris ces lignes. Si ce que vous entendez vous plaît, je serais d’avis de ne pas trop trainer pour choper un exemplaire !
| AxGxB 21 Décembre 2020 - 1037 lectures |
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