Groupe aujourd’hui défunt ayant constamment navigué en seconde division, Devastation n’a jamais eu la reconnaissance qu’il mérite. Deux raisons à cela, d’abord un premier album particulièrement moyen sorti à une époque ou d’autres groupes de Thrash sortaient des monuments tels que
The Legacy,
Taking Over,
Terrible Certainty,
Pleasures Of The Flesh ou encore
Persecution Mania. Une concurrence particulièrement sévère qui va reléguer les Texans au rang de groupe absolument anecdotique. Ensuite parce que les deux albums particulièrement valables de Devastation sont sortis à une époque où le Thrash avait malheureusement déjà un peu de plomb dans l’aile (1989 et 1991). Il n’y a donc rien de surprenant à ce que le groupe américain soit aujourd’hui peu cité lorsque l’on parle de Thrash. Pourtant,
Signs Of Life et surtout
Idolatry sont tous les deux de petites pépites de Thrash techniques et agressifs comme on n’en fait (presque) plus.
Sorti en 1991 sur Combat Records,
Idolatry a été enregistré au Morrisound Studio en compagnie de l’incontournable Scott Burns. L’album sera réédité pour la première fois en 1999 par Century Media dans une version CD agrémentée pour l’occasion de quatre titres live. Les amateurs de vinyles auront quant à eux la chance de pouvoir se rabattre sur une version toute fraîche (mars 2017) proposée par le label grecque Repulsive Echo.
En dépit d’un certain succès dans sa ville natale de Corpus Christi, on ne peut pas dire que les débuts de Devastation aient été particulièrement convaincants. Le groupe n’aura alors d’autres choix que de travailler d’arrache-pied pour réussir à tirer son épingle du jeu. A ce titre, les Texans feront appel dès 1988 à un second guitariste en la personne d’Henry Elizondo qui, même si je ne connais pas les détails concernant le processus de composition, semble leur avoir été particulièrement bénéfique à en juger par l’énorme saut qualitatif opéré entre
Violent Termination et
Signs Of Life. Cette vigueur tout à fait nouvelle sera également alimentée par une plus large exposition que le groupe doit à plusieurs tournées US en compagnie de Dark Angel (1988), Sepultura (1989) et Death (1990) qui, à la sortie de
Spiritual Healing joue chaque date à guichets fermés.
Si à l’époque de la sortie de ce troisième album, tout a déjà été fait en matière de Thrash, il n’en demeure pas moins qu’
Idolatry a de sérieux arguments à faire valoir. Pour commencer, la production de Scott Burns est ici particulièrement agréable et ne souffre pas, vingt-six ans plus tard, d’une certaine forme d’obsolescence. Moins compact que la majorité des productions Death Metal auxquelles il a collaboré, les instruments respirent à peu près tous même si la basse d’Edward Vasquez est malheureusement ici aux abonnés absents (ou alors présentée de manière particulièrement confuse). Cette production porte donc certains stigmates de son époque mais rien qu’y puisse gêner l’écoute de ce troisième et dernier album.Mais le travail de Scott Burns n’est certainement pas l’atout majeur d’
Idolatry.
Non, ce qui fait principalement tout l’intérêt de ce dernier ce sont bien entendu ces riffs nerveux et particulièrement affûtés servis par le duo Burk / Elizondo. Car sans chercher à en mettre plein la vue, les deux garçons livrent malgré tout une sacrée prestation grâce à un sens de l’efficacité et du rythme particulièrement développé. Certes, ces deux-là n’ont rien inventé, mais qui pourraient le leur reprocher quand on a le talent pour pondre des titres tels que "Deliver The Suffering", "Forsaken Hatred", "Idolatry", "Legacy Of Faith" ou "Subconscious" ? D’autant qu’à défaut de surprendre, le jeu des deux américains se montrent très varié alternant les passages/titres mid-tempo ("Freewill", "Souls Of Sacrifice", "Idolatry") à de délicieuses séquences nettement plus rapides ("Deliver The Suffering" à 1:57, "Forsaken Hatred" à 1:05, "Legacy Of Faith" à 1:12, "Never Believe" et ses attaques frontales). Ces variations de rythmes, nombreuses et systématiques, sont bien évidemment accompagnées d’une batterie elle aussi volontaire. Entre ces breaks/séquences faites pour se rompre les cervicales (les riffs d’introduction de "Deliver The Suffering" et "Legacy Of Faith"...) et ceux tapissés d’une double absolument redoutable ("Legacy Of Faith" à 2:05, "Never Believe" à 0:35...), ces puissantes accélérations menées le couteau entre les dents, ce jeu de cymbale discret mais dynamique et ces moments de tchouka-tchouka effrénés ("Deliver The Suffering"...), l’amateur de Thrash éclairé n’aura clairement pas le temps de s’ennuyer tout au long de ces quarante-quatre minutes. Et puis, cerise sur le gâteau, tous les solos - éléments incontournable d’un album de Thrash digne de ce nom - sont exécutés d’une main de maitre. Fougueux et mélodiques à la fois, ils apportent intensité et panache à des compositions qui pourtant n’en manquent pas surtout avec la voix abrasive et revancharde de Rodney Dunsmore.
Œuvre injustement sous-estimée,
Idolatry mériterait d’être connue de tous les amateurs de Thrash qui se revendiquent comme tel. On y trouve des riffs affûtés d’une nervosité incroyable, des changements de rythmes nombreux mais amenés avec cohérence afin de rendre encore un peu plus intéressant chaque minute de l’album, des solos redoutables au cachet indiscutable et une voix abrasive et arrachée aussi intense que la musique elle-même. Bref, du Thrash dans ce qu’il a de plus simple et efficace, sans fioriture (tout juste quelques arrangements comme ces samples ou cette guitare acoustique sur "Idolatry") mais pourvu d’un sens ultime de l’efficacité qui vous fera regretter de ne pas avoir découvert ce groupe plus tôt. Et si maintenant vous hésitez encore, c’est que vous êtes trop con pour écouter du Thrash. F.O.A.D..
6 COMMENTAIRE(S)
23/04/2021 14:26
29/12/2017 19:06
12/05/2017 21:14
Pas de Bandcamp, j'ai rajouté quelques liens YouTube
Merci
11/05/2017 07:04
Pas de Bandcamp, j'ai rajouté quelques liens YouTube
Et effectivement Keyser, c'est 1999. Je ne sais pas pourquoi j'ai mis 2009. Merci.
10/05/2017 22:04
10/05/2017 20:39