Killfest Tour 2014

Nombre de chroniques en huit années de (j’espère) bons et loyaux services : 400. Nombre de live reports ? Si l’on met de côté les comptes rendus de festoches type Hellfest ou Sonisphere … 2 ! C’est dire l’intérêt que je porte à l’exercice, plutôt fastidieux pour ma part, consistant à décrire une salle, l’atmosphère qui y règne et la prestation des groupes du soir. Ceci étant posé, même si j’ai déjà eu la chance de voir OVERKILL quatre ans en arrière, le caractère exceptionnel de leur venue mérite bien que je martyrise mon clavier de bonne heure, alors que résonnent encore dans ma tête le refrain d’un de leurs titres majeurs, je veux bien sûr parler de cette bonne vieille « Fuck You » !

Arrivé sur place peu après 20h30 avec la ferme intention de rater les deux premières parties (plus les années passent, plus je préfère garder mes forces pour les têtes d’affiche), je ne suis pas loin de réussir mon coup. Après avoir rejoint l’ami Henrik et serré la pogne de Virgil et Striker à l’entrée de la salle, les Suédois d’ENFORCER sont sur le point d’achever un set plus old school tu ouvrais pour SAXON en 1982. Futals en cuir, un frontman blondinet que je prends d’abord pour une chanteuse. Une base heavy metal plutôt pêchue qui passe bien l’espace de deux titres. Tout ça sent fort le revival NWOBHM. Anachronique ? Etant donné mon affection pour le genre stoner, je me garderai bien de porter des jugements hâtifs. Le heavy metal n’étant pas mon genre de prédilection, disons plutôt que ce type de groupes n’est pas fait pour moi. Par contre, bien vu de proposer une affiche variant les genres power, heavy et thrash. Pas sûr que j’aurai goûté deux formations retro thrash avant de voir débarquer la bande à Bobby. Deux bières et un passage dans la smoking zone plus tard (50 mètres carrés entre deux hangars, un parking et un chantier) rappelant étrangement le parquage de zombies dans The Walking Dead, les premières mesures de PRONG nous rappellent à l’ordre. Il est temps de voir de quel bois se chauffe Tommy Victor et ses deux comparses, le groupe évoluant ici sous forme de trio.

Allez savoir pourquoi je ne me suis jamais penché sur leur cas. Le mauvais morceau au mauvais moment, sans doute. Pourtant, le fan de thrash indus que je suis aurait du se douter que PRONG était une valeur sûre. De Tommy Victor, je n’avais pourtant retenu que ses riffs bien violents chez MINISTRY. Il faudra désormais compter avec une prestation sidérante de groove, d’efficacité et, bien sûr, quelques épanchements brutaux du plus bel effet. Le batteur Art Cruz (WINDS OF PLAGUE), impressionnant de maîtrise quel que soit le registre (on a même eu droit à quelques blasts sévères!) n’en met pas une à côté. Un bassiste aux allures de tough guy comme bête de scène (Jason Christopher, STONE SOUR) pour bétonner le set. Pas en reste, Tommy Victor déroule sa science du riff en acier trempé, contrebalançant l’avoine avec un chant clair décalé, pas toujours juste mais renforçant le caractère transe de certains passages. Stylistiquement parlant, c’est l’auberge espagnole des années 90 avec une première partie de set très percutante : passages thrashy à la MINISTRY, son de gratte hérité du EXHORDER de « The Law » et power de rang façon PANTERA époque « Vulgar Display Of Power ». Du lourd ! Moins axée baston de rue, la suite du set sera plus alternative, à base de riffs torturés un rien dissonants (« Carved Into Stone »), un peu comme si GODFLESH faisait soudain l’effort de redescendre sur terre. Carrément hypnotique, cette prestation de PRONG relègue très loin derrière celle d’un CHIMAIRA (pour rester dans le power à l’américaine), groupe que j’avais pourtant apprécié en son temps.

Après cette torgnole inattendue, retrouver ses esprits n’est pas chose facile et comme je le crains, la transition entre modernisme et vieille école demande un léger temps d’adaptation. La différence de son n’aidant pas (c'est du thrash, les aigus prennent le pouvoir), je mettrai trois titres à véritablement rentrer dans le set d’OVERKILL. Un de mes groupes de thrash favori, que je place au même rang que TESTAMENT ou EXODUS, surtout depuis leur retour de flamme post « Ironbound ». Croisés au Sonisphere 2010 dans des conditions apocalyptiques proches de celles d’EMPEROR au Hellfest 2007, les New-Yorkais m’avaient scotché sur place, enterrant les prestations de MEGADETH, SLAYER et ANTHRAX réunis. Qu’en sera-t-il ce soir, en salle et dans des conditions optimales (la scène, pas trop haute et proche du public permet de voir tout le monde de près, à l’exception du batteur haut perché Ron Lipnicki) ? Quoique plus décontracté, un concert du même tonneau mon capitaine ! Si physiquement les Bobby, D.D. et autres Derek Tailer accusent le poids des ans (Bobby tout bouffi, D.D. qui a perdu ses tiffs), musicalement, ça tabasse comme à la première heure avec d’entrée de jeu la speedée « Armory », extraite du dernier album des Américains. « White Devil Armory », un (très) bon album pas prise de tête à la « W.F.O. » que personnellement j'affectionne bien plus que le surcôté « Electric Age », bien représenté avec deux titres dans la setlist ce soir (« Electric Rattlesnake », « Black Days »). Avec 17 albums au compteur (qui dit mieux ?), il est évident qu’OVERKILL a les moyens de varier les plaisirs mais on connaît pas mal de groupes qui se contenteraient d’enquiller les classiques sans trop se fouler (pas vrai KREATOR ?). De retour pour de bon dans le giron old school, OVERKILL n’oublie pas de faire ses gammes sur les indispensables « Wrecking Crew », « Rotten To The Core » et autres « Fuck You », qui achèvera tout le monde de fort belle manière. Mais là où il m’ont eu, c’est en exhumant des vieilleries que je ne pensais jamais avoir la chance d’entendre en concert. Jugez plutôt ! « Overkill », tiré de « Feel The Fire » en deuxième salve, suivi plus tard d’une « End Of The Line » que j’avais carrément oubliée ! Mais le plus beau dans tout ça reste l’enchainement inespéré « Long Time Dyin’ »/« Under One », deux oubliées du milieu des années 90. Plus orientées power thrash que le reste de la setlist, elles ont fait un bien fou entre deux salves thrash punitives (« Elimination », « Ironbound »), les habituelles relectures MÖTÖRHEADiennes survitaminées (« Bring Me The Night », « Pig ») et les hymnes indémodables (« Hello From The Gutter »).

S’ils n’ont pas forcément joué les meilleurs titres de « White Devil Armory » (pas de « Where There’s Smoke There’s Fire » ni de « Freedom Rings »), « Bitter Pill » a fait des ravages durant le rappel, prouvant qu’elle avait le niveau pour figurer sur un album de la trempe de « The Years Of Decay ». Affable, multipliant les poses et délivrant ses lignes de chant particulières à la perfection (faut le savoir, avec Blitz, c’est exactement comme sur album), Bobby a fait le show sans trop forcer, le charisme tranquille de D.D. Verni et Derek Tailer faisant le reste. Seul petit regret, le manque de clarté des soli d’un Dave Linsk que j’avais trouvé plus en forme quatre ans en arrière. Pas de quoi gâcher la fête pour les nombreux fans présents (un vox plus plein que pour LOUDBLAST/BENIGHTED en mars dernier) pour l’occasion. (D.D.) Verni Vidi Vici!

Setlist OVERKILL :

Armory
Overkill
Electric Rattlesnake
Wrecking Crew
Black Days
Rotten To The Core
Bring Me The Night
End Of The Line
Solo Dave Linsk
Long Time Dyin’
Under One
Pig
Hello From The Gutter
Ironbound

Rappel :

Bitter Pill
Elimination
Fuck You