L’album par lequel Satan’s Satyr a laissé présager qu’il était capable de grandes choses – avant de les réaliser et d’exploser en plein vol sur
The Lucky Ones.
C’est par cette formule que l’on pourrait résumer
Die Screaming, deuxième longue-durée succédant au déjà prometteur
Wild Beyond Belief!. La différence est que, là où sa première création affichait fièrement un amour assumé pour Black Flag et – surtout – Electric Wizard, la bande menée par Clayton Burgess, désormais un vrai groupe et non un projet d’un seul homme, suit ici sa propre route, certes pavée par d’autres qu’elle mais striée des traces des cavalcades à moto de la formation.
Il faut mériter tel nom d’album, encore plus telle pochette d’une radicalité à l’ancienne.
Die Screaming s’y adonne avec un plaisir excessif et ce, dès l’introduction « Thumper's Theme », aussi kitsch que prenante, entamant ces quarante-cinq minutes marquée par une folie rock n’roll mélangeant style vintage et métissage aussi cohérent que personnel. A la fois garage dans un son acide et vrombissant, doom dans ses riffs implacables, heavy dans ses envolées où l’héroïsme devient celui d’un punk brisant à coup de boots les portes du temple, il conjugue accroche et ambiance de sale gosse instaurant sa déviances et ses dérives comme un art de vivre.
Au point de croire que Satan’s Satyrs a ici déjà atteint son nirvana particulier, anglais et ricanant malgré ses origines ricaines ? On y pense en entendant ces riffs enlevés, l’atteint même durant les mises à sac complètes que sont « Lucifer Lives! », « Curse of the Corpse » et surtout « One by One (They Die) », ce tube rongé et fiévreux, meilleure présentation de ce dont est capable le projet à son plus haut. Il y a aussi cette voix dénuée d’effets de Clayton Burgess, outrancière et séduisante, sorte de version adolescente et exubérante de celle du traître à la cause du doom Trevor William Church – où les ressemblances entre
Die Screaming et
Inside the Skull ne se situent pas que dans leurs illustrations. Pourtant, une comparaison avec l’indétrônable
The Lucky Ones montre le chemin qu’il restait à parcourir à l’époque : plus inconstant, particulièrement lors de moments cherchant tellement la photographie d’époque qu’ils en deviennent clichés (« Black Souls » par exemple), il laisse épaté tout en regrettant d’encore trop nombreux moments de creux, à l’image de la quasi-tuerie « Show Me Your Skull » malheureusement trop étalée pour emporter en son entier.
Cependant, laisser penser que
Die Screaming est évitable en raison de son petit frère plus étincelant serait clairement induire en erreur. Transpirant un metal encore immature mais moquant déjà ses origines d’une belle insolence, comme un délinquant voulant en montrer à ses parents, il est un plaisir aussi régressif que nécessaire quand il s’impose à notre esprit. Surtout que ses ambitions, si elles ne sont pas toujours suivies de résultats à leur hauteur, sont un bonheur à entendre pour qui voit le metal comme une musique où se rêver plus grand que l’on est : un sentiment que laisse le maladroit et grandiose morceau-titre, ses douze minutes qui n’en finissent plus de haïr et d’appeler le diable, se languissant, auto-satisfaites, dans un occultisme de série B, bouche béante et regard rouge à force de regarder les moins recommandables VHS de films d’horreur oubliés…
Oui, Satan’s Satyrs est ici, tout en s’éloignant de lui sur la forme, déjà un des plus beaux enfants d’Electric Wizard. Et, rien que pour ça,
Die Screaming mérite d’être écouté trop fort et trop souvent, comme escompté avec ce genre de délicieuse bêtise.
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