Abjection - Malignant Deviation
Chronique
Abjection Malignant Deviation (EP)
S’il n’a jamais été le plus réputé ni le plus productif des labels il faut bien reconnaître que depuis le début de l’année Godz Ov War s’est montré prolifique et qualitatif en matière de sorties, que ce soit via ses excellentissimes compatriotes de CHAINSWORD ou encore avec le binôme américain énervé de CULT GRAVES. Et comme on ne dit jamais deux sans trois le voilà qui récidive en nous emmenant cette fois-ci au Canada avec ce quatuor récemment formé et qui nous balance déjà sa première sortie officielle, où l’on retrouve parmi ses membres des vieux briscards locaux avec notamment un actuel et un ancien de WAKE. Si côté vécu et expérience on sait qu’il n’y a aucun souci de ce côté-là on sait en revanche que parfois la superposition de musiciens expérimentés venus de divers horizons n’est pas toujours signe de réussite, mais ici nulle erreur de parcours ou de sortie de route incontrôlée, vu qu’en presque vingt-quatre minutes le combo nous balance un Death Metal à la noirceur absolue et à l’humidité constante, qui va ainsi mettre en avant une opacité redoutable et une herméticité de tous les instants.
Car une fois la courte introduction clôturée c’est à une vraie tornade auquel on va avoir droit où la violence et la lourdeur vont se côtoyer de façon intelligente afin de mettre suffisamment d’espace entre l’une et l’autre, c’est le cas de l’équilibré et tentaculaire « An Illusion Of Sleep » qui met tout cela sur un même pied d’égalité. Laissant de la marge aux blasts pour s’exprimer - tout comme aux parties plus lentes (où le batteur en profite pour sortir nombre de cassures et de roulements en tout genre), cette première compo donne le ton et n’hésite pas à intégrer des ambiances tribales pour casser le rythme, et ainsi mieux densifier son propos. Outre le sentiment d’étouffement qui en ressort (on a l’impression que l’étreinte ne va jamais se relâcher) il faut aussi saluer la qualité de la production à la fois profonde et chaude (la basse mise bien en avant dans le mixage apporte de la masse supplémentaire), ainsi que celle du chant caverneux et inquiétant qui finissent de convaincre les plus réticents sur le niveau impressionnant proposé ici. Sans jamais aller dans l’excès technique (même si la technicité y est particulièrement relevée) la densité et l’homogénéité se côtoient magnifiquement et sans coup férir, et cela va être une constante par la suite, et en premier lieu sur le tout aussi tempétueux « The Black Stag ». Si toutes les ambiances précédemment citées sont encore présentes ici cependant le résultat est ici plus basé sur l’écrasement tant la vitesse est légèrement reléguée au second plan, donnant de fait un groove plus dominant où l’on se surprend à remuer la tête sans que l’on s’y attende, même si les nuages et l’orage en approche ne veulent pas s’éloigner. Si l’explosivité a été un peu mise sur le côté (sans pour autant être absente) elle va revenir littéralement en force sur le court et radical « Nightmares Awoken » au tabassage quasiment continu et intensif, où l’on est presque à retrouver des patterns et riffs du CANNIBAL CORPSE primitif de l’époque « Eaten Back To Life ». En effet pas de quartier ici c’est bas du front, joué de façon ultra-rapide et dépouillée et ça ne débande pratiquement pas (seul un court passage lent est là pour aérer le tout), tout en servant de transition à l’imposant et rampant « The Madness Within » qui va prendre le contre-pied total.
Si le grand-écart est de mise avec les explosions de vitesse c’est néanmoins le tempo bridé qui est à l’honneur et qui amène là-encore un bonus ténébreux où l’on navigue entre trous noirs sidéraux et ouragans imprévisibles, tels les anciens navigateurs sur leurs coquilles de noix au milieu des océans. Jouant sur l’équilibre des forces en présence cette plage montre encore et toujours la puissance des Canadiens qui placent la barre très haut et conservent une accroche continue, sans avoir besoin d’en faire des tonnes comme avec la longue conclusion intitulée « Darkness Unatterable » qui va pousser plus loin la musique et l’écriture en matière de radicalité comme d’étouffement. Si le rythme général y est exacerbé et très élevé il n’en reste pas moins qu’il ne se contente pas seulement de cela et là-encore ça ralentit et ça s’épaissit au bon moment, afin d’écraser un peu plus la tête de l’auditeur qui n’en avait pourtant nullement besoin, même si cela part d’un bon sentiment. En effet le combo nous régale avec ce court-format jouissif où la pochette (magnifique au demeurant) représente parfaitement l’univers dans lequel on se retrouve embarqué, dans un tourbillon de furie sonore et psychologique. A la fois régressive et fouillée l’écriture du combo fait mouche instantanément et va très certainement marquer 2021 de son empreinte maléfique, en attendant la confirmation sur un album complet que l’on va scruter avec impatience. Mais pour l’instant on se délectera de cette furia réalisée avec maestria et qui ne laissera pas indifférent ni indemne tous ceux qui auront eu le courage d’aller affronter ce disque périlleux et viril par tous les bouts, prouvant que la négativité a du bon quoi qu’on en dise.
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