Le 20 avril a toujours été une date un petit peu spéciale pour tous les fumeurs de weed. Notamment de l’autre côté de l’Atlantique où cette date donne lieu chaque année à de nombreuses célébrations à travers tous les États-Unis, notamment dans ses états les plus progressistes comme la Californie. S’il y a bien un groupe qui n’a jamais manqué de célébrer cette occasion comme il se doit c’est bien évidemment Sleep qui cette année a décidé de gâter ses fans avec la sortie d’un double EP intitulé
Iommic Life. Superbement illustré par Dave Kloc (Primus, Foo Fighters, Metallica, Nine Inch Nails, The Melvins...), celui-ci n’a finalement rien de nouveau puisqu’il s’agit effectivement de la réunion de deux précédents EPs parus respectivement en 2014 (
The Clarity) et 2018 (
Leagues Beneath).
En ce qui me concerne, je ne boude clairement pas mon plaisir de retrouver sur un seul et même format (même s’il s’agit d’un double LP) deux sorties proposées jusque-là séparément et dont les artworks (enfin surtout celui de
Leagues Beneath) sont bien loin d’égaler le travail coloré et particulièrement immersif réalisé ici par le jeune illustrateur américain. Car cette oeuvre ne se limite pas seulement à cette pochette que vous pouvez admirer ici à droite de votre écran mais à l’ensemble (extérieur et intérieur) de ce qui nous est proposé sous la forme d’un superbe gatefold dans lequel le collectionneur avisé pourra se régaler du moindre petit détail. À noter également que chaque face B reprend d’ailleurs une partie de cette illustration sous forme de gravure et que les plus chanceux (et rapides) auront mis la main sur une version colorée de toute beauté qui déjà s’échange à prix d’or sur Discogs...
Enregistrés en leur temps par Noah Landis de Neurosis, ces deux morceaux ont bénéficié à l’occasion de cette nouvelle sortie d’un remastering signé Bob Weston (chanteur/bassiste de Shellac ayant déjà collaboré par le passé avec Bell Witch, Neurosis, Jarboe, OM, Steve Von Till et Wino). À vrai dire, même si j’ai déjà écouté ces deux titres plusieurs fois auparavant, je serais bien incapable de vous dire s’il y a du mieux comparé notamment à la première version de "The Clarity". En effet, monsieur Weston n’ayant pas signé le mastering initial de ce titre (dû à l’époque à John Golden connu pour ses collaborations avec des groupes tels que Baroness, Black Cobra, Faith No More, High On Fire, Jesu, The Melvins, Neurosis...) il est fort probable que ce remastering intervienne tout simplement dans le but d’homogénéiser le rendu sonore de l’ensemble. En attendant d’avoir le déclic sur la question, le plaisir reste quant à lui intact et c’est bien là l’essentiel.
Proposé de manière chronologique, c’est le morceau "The Clarity" paru en 2014 qui ouvre la dance. Un titre de près de dix minutes introduit par une boucle hypnotique très vite réinterprétée par un Matt Pike naturellement tout en riffs. Comme toujours avec le guitariste, on est immédiatement saisi par la lourdeur et le grain qui émane de son instrument de prédilection. Alors que la première moitié va dérouler à peu de chose près le même pattern pendant près de cinq minutes (exceptions faites de quelques transitions bien senties histoire de rompre avec une certaine monotonie) avec en sus la basse vibrante et la voix trainante d’Al Cisneros, la seconde moitié instrumentale va laisser place à un Matt Pike toujours très en riff nous gratifiant en premier lieu d’un solo psychédélique au feeling 70’s pour le moins évident avant de reprendre le pattern des débuts en le délitant petit à petit pour laisser place tranquillement au silence. S’il n’a pas bouleversé outre mesure le petit monde du Stoner / Doom à sa sortie et cela même s’il marquait au passage le retour des Californiens après onze ans d’absence, "The Clarity" n’en reste pas moins un excellent morceau, effectivement très scolaire pour un groupe comme Sleep ayant pondu quelques années plus tôt un titre unique de plus d’une heure mais néanmoins d’une efficacité redoutable et doté au passage d’un pouvoir hypnotique particulièrement fort et saisissant. Bref, on est effectivement ici en terrain connu mais force est de constater que c’est une fois encore extrêmement bien composé et interprété.
La suite va se faire avec le titre "Leagues Beneath" sorti en 2018 dans le cadre du Adult Swim Singles Program. Long de plus de seize minutes, on y retrouve un Sleep en très grande forme, quelques mois seulement après la sortie de l’excellent
The Sciences. Moins irrésistible que son prédécesseur qui jouit, il est vrai, d’une certaine immédiateté grâce à ces boucles qui ne vous quittent pas, le trio propose ici une oeuvre bien plus rampante marquée une fois encore par les riffs lourds et abrasifs d’un Matt Pike désormais bien plus menaçant. Tel un prophète perché au sommet de son promontoire, l’homme distille ses riffs à la mesure, se défiant avec insolence du caractère répétitif de ces derniers pour mieux hypnotiser son auditoire d’ores et déjà dédié à sa cause. Il faudra attendre plus de cinq minutes pour qu’Al Cisneros se décide à enfin poser ses lignes de chants si envoutantes et cinq de plus pour enfin lâcher la bride à un Matt Pike qui n’y tient plus et y va de ses lignes psychédéliques toujours aussi jubilatoires. Al fera son retour brièvement à quelques minutes de la fin avant que là encore le morceau se délite au fur et à mesure avant une conclusion que l’on devine inévitable. Moins facile et immédiat que "The Clarity" à cause notamment de ce caractère répétitif et dépouillé beaucoup plus prononcé, "Leagues Beneath" se montre effectivement un poil plus exigeant. Il montre aussi et surtout que Sleep est toujours aussi à l’aise sur ce genre de titre fleuve qui en dépit de ses longueurs excessives n’en reste pas moins toujours aussi pertinent et convaincant et cela peu importe le moment choisi.
À tous ceux qui comme moi n’avaient encore jamais mis la main (je parle physiquement bien entendu) sur ces deux EPs qui pourtant ne datent pas d’hier,
Iommic Life n’a que des atouts à faire valoir : un artwork somptueux et immersif sur lequel on pourrait passer des heures à zieuter tout ce qui s’y trouve, un support unique qui facilite grandement l’écoute de ces deux titres de qualité tout à fait dignes de Sleep et de son héritage et un prix finalement presque plus intéressant que celui des deux EPs achetés indépendamment. Bref, il n’y a là absolument aucune raison de se priver si l’univers enfumé et psychédélique des Californiens a un jour été votre came. Un achat que vous ne regretterez pas et qui au pire fera officie de très bel objet déco sur les étagères de la maison. C’est sûr.
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