Goatess - Purgatory Under New Management
Chronique
Goatess Purgatory Under New Management
On ne le répétera jamais assez : une pochette, ça peut faire la différence. Et au risque de vous étonner, celle de ce nouveau longue-durée de Goatess n'est pas pour rien dans mon intérêt pour ce dernier. Ho, bien sûr qu'elle touche de près la laideur (tandis que l'artwork du précédent essai des Suédois y sautait à pieds joints – on peut donc dire qu'il y a du mieux), mais elle m'a, dès le premier coup d’œil, interpellé avec ses figures ironiques de doomsters fervents, ses couleurs chaudes, son aspect rustre, dénué de recherche esthétique particulière, finalement assez frais au milieu de toutes ces illustrations se la jouant à qui-mieux-mieux question décrépitude, malsain ou explosion de rétines. Souriante, simple, accueillante.
Des termes qui s'adaptent parfaitement à la musique ci-présente. Si le premier album m'avait laissé froid à l'époque – un peu d'honnêteté : je ne l'ai pas réécouté depuis et il peut bien en être autrement aujourd'hui –, Purgatory Under New Management m'a tout de suite charmé dans son naturel naviguant entre doom metal plus vieux que le monde et groove mêlant hard rock et stoner où les compositions s'étalent dans le bonheur. Oui, les amateurs de clichés s'attendant à devoir acheter une corde pour apprécier pleinement ce disque en seront pour leurs frais : Goatess est ici essentiellement positif, chaleureux, content d'être là, avec nous pour l'entendre ! Un plaisir quotidien, sans effusion outrancière, vécu tranquillement, qui me rappelle ce qui peut traverser une œuvre de vieux rockeur telle que le Last Patrol de Monster Magnet.
Et pourtant, ça n'était pas gagné : Purgatory Under New Management donne au départ l'impression d'être passe-partout avec ses morceaux rectilignes, répétitifs au possible. La révélation vient au fur et à mesure qu'il passe dans le lecteur, les premières fois un peu par hasard, par la suite de façon préparée. C'est que derrière ses vieux doomsters ayant auparavant roulé leurs bosses dans des formations dédiées au riff (y a-t-il besoin de rappeler le pedigree impressionnant de Christian Linderson, s'étalant de Saint Vitus et Count Raven à Lord Vicar ?), ce nouvel essai est atmosphérique avant toutes choses, se permettant parfois quelques coups d'éclat (« Shadowland », proche des moteurs de Earthride) mais fonctionnant surtout comme accompagnement au réveil, de préférence un dimanche matin, quand le temps n'est plus à prendre en compte.
Ce qui, si on m'enlève toute obligation à être dans les clous des rappels aux Grands Anciens – Hé ! J'ai même réussi à ne pas citer Black Sabbath ! –, fait que je rapprocherais Purgatory Under New Management du III de Acid King au-delà de toute autre référence, tant j'ai le sentiment de tenir ici une version certes masculine et en pré-retraite, mais pareillement planante, bienheureuse, aussi bien soul que shoegaze dans les sensations qu'elle offre. Ne vous méprenez pas : Goatess est ici un peu trop souvent écroulé, un peu trop souvent satisfait pour rien. Il pourra donner envie d'écouter un autre groupe quand l'attente de se faire botter le cul se fera trop pressante. Mais il n'en reste pas moins un bon disque, lumineux, qu'on a déjà eu l'impression de rencontrer mais qui donne envie à chaque fois qu'on le croise d'aller vers lui. Un bon album, comme un bon matin.
| lkea 19 Avril 2016 - 801 lectures |
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