Dodskold - Ödesriket
Chronique
Dodskold Ödesriket
Fondé l’année dernière quelque part en Suède DODSKOLD aime clairement cultiver le mystère sur sa musique comme sur ses membres, tant on ne sait rien sur eux ni sur l’entité en général qui préfère se concentrer uniquement sur ses morceaux et le collectif qui s’en dégage. Car à peine quelques mois après ses débuts le trio (devenu quatuor après son passage en studio) sort déjà son premier album propice au mystère et aux atmosphères brumeuses, qui restent pile dans ce côté opaque voulu par le groupe. En effet ici nulle trace de violence débridée et de tabassage intempestif, au contraire les gars prennent systématiquement le temps de laisser l’ambiance s’installer sur chacune de leurs compos (qui tournent aux alentours des cinq minutes en moyenne), afin que l’auditeur se retrouve embarqué au milieu de nulle part à l’instar de la pochette parfaitement en raccord avec le contexte musical. Si celle-ci nous montre une ambiance campagnarde inquiétante et humide où règne la solitude et une certaine nostalgie, c’est exactement cela dans quoi le combo va nous embarquer durant presque trois-quart d’heure d’un Black Metal mélancolique et atmosphérique, porté par des riffs répétitifs et hypnotiques qui ajoutent au désespoir et à la tristesse générale.
Il ne faut pas longtemps pour s’apercevoir de tout cela vu que les premières notes de « Sista Ridten » nous envoient directement dans le brouillard du petit matin automnal, où l’on va se demander où l’on a mis les pieds et si l’on ne s’est pas perdu en chemin. Alternant entre des longues parties rapides et d’autres en mid-tempo remuantes et épiques, les riffs et patterns ne s’embarrassent pas de complexité malvenue tant techniquement c’est d’une simplicité et sobriété à toute épreuve, totalement adapté au style proposé et surtout immédiatement accrocheur. Car même si l’on va avoir régulièrement la sensation d’écouter en boucle les mêmes plans le feeling parfaitement exécuté va faire oublier ce point de détail et ce même quand l’écriture se montre plus sombre à l’instar de « Döderskan » plus neigeux et tempétueux (et propice également au headbanging), ou encore via « Misärens Triumf » qui lève nettement le pied et ralentit l’allure, histoire d’être plus oppressant dans ses notes comme dans le chant. Il faut en effet souligner l’importance des deux voix qui amènent une densité supplémentaire dans la violence comme dans la tristesse, tant la criarde et la claire s’entremêlent régulièrement et donnent plus de corps à l’ensemble, notamment dans le mélodieux « Ty Döden Är Lifvets Lön ». Ici plus de place est accordée à la mélodie par l’apport d’un long solo tout en finesse et de notes acoustiques régulières qui créent de fait une froideur supplémentaire et le sentiment d’une époque fantasmée que l’on pourrait retrouver en regardant des peintures comme des vieilles photos en noir et blanc (sentiment que l’on retrouvera également sur le titre de clôture « Ödeskväde Till Riddersmark » - aux claviers apaisants). Néanmoins sans être tout le temps ronflante et un peu pantouflarde la bande sait aussi lâcher les chevaux comme sur le guerrier et entraînant « Jotunhedarna » d’obédience viking, et impeccable pour remuer la tête de par sa rythmique élevée et suffocante, à l’instar de « Myrkskogh » tout en variations et qui joue les montagnes russes entre vitesse et lenteur de façon régulière.
Aidé par une production naturelle mais propre (où la basse chaude amène un vrai supplément d’âme) ce disque qui nous transporte facilement vers les grands espaces de la campagne suédoise et des forêts scandinaves ne marquera pas l’année de son empreinte, de par un côté scolaire parfois un peu trop présent (on aurait aimé parfois un peu plus de folie) et des parties instrumentales qui s’étirent de façon un peu trop longues, cassant parfois la dynamique générale et donnant la sensation de se répéter un peu dans le vide. Cependant bien qu’étant imparfait ce premier jet montre de bien belles choses et passera facilement le cap des écoutes sans mettre le cerveau en surchauffe, une relative prouesse dans un genre pas évident et qui se montre rafraîchissant, confirmant également le retour en forme du royaume de Suède au sein du Metal noir après une période compliquée et d’un manque de renouvellement criant.
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