On n'avait pas parlé de Witching Hour depuis
Past Midnight... en 2011 malgré un EP en 2014,
Where Pale Winds Take Them High..., dernière sortie chez Evil Spell Records sur laquelle j'avais fait l'impasse. Injustement oublié,
...and Silent Grief Shadows the Passing Moon (les points de suspension semblent être devenus une tradition chez eux) date de fin 2018 sur Hells Headbangers. Un troisième album joliment illustré par un Paolo Girardi plus sobre et moins dans le recyclage qu'à l'accoutumée et qui marque une étape importante pour le combo.
En termes de line-up, tout d'abord. Suite au départ du batteur Simon Wender, le guitariste Sascha Bastian troque son instrument à cordes contre les fûts. Le quatuor devient alors un trio à une seule guitare, même si Slaughter (Cruel Force, Witches Sabbath, ex-Nocturnal) et Max Povver (Erazor, Attic), tous les deux membres live depuis 2014, s'invitent sur le dernier morceau "As I Walk Among Sepulchral Ruins". C'est cependant au niveau de la direction artistique que Witching Hour connaît le plus grand bouleversement. Une évolution finalement logique quand on se rappelle celle entre le premier long-format
Rise of the Desecrated, du blackened thrash old-school agressif et son successeur
Past Midnight... qui avait pas mal adouci la donne et accentué l'aspect heavy metal de la musique des Teutons.
...and Silent Grief Shadows the Passing Moon se jette lui corps et âme dans ce retour aux sources du Mal en nous renvoyant au début des années 1980, production ultra vintage à l'appui. Le thrash a quasiment disparu malgré des accélérations en tchouka-tchouka fréquentes qui ont toutefois plus le goût du vieux speed avec ce son plein de réverb' sur la grosse caisse et ce mix en retrait. Le côté blackened première vague (Venom, Bathory) reste présent via les thèmes occultes et la voix du frontman Jan Hirtz, désormais mi-chantée mi-écorchée sur des accents théâtraux. En ce qui concerne la guitare par contre, le riffing s'avère 100% heavy metal. Oui Witching Hour fait du heavy metal maintenant, à tendance epico-progressive qui plus est ! Noirci, avec encore quelques élans speed/thrash, mais bien du heavy metal !
Si cela fait bizarre au début, la baisse d'intensité entre
Past Midnight... et
Rise of the Desecrated m'avait déjà surpris et un poil déçu, c'est un régal une fois que l'on s'est habitué au changement de style et à la longueur largement revue à la hausse des six compositions de l'opus affichant plus de sept minutes en moyenne. Le double-titre d'ouverture, "...and Silent Grief Shadows the Passing Moon / Once Lost Souls Return" nous met tout de suite dans le bain sur plus de dix minutes dont une première moitié entièrement instrumentale. Une lente progression s'ouvrant sur de beaux arpèges tristes et nostalgiques. Classieux et épique ! Une superbe ambiance à l'image des titres poétiques des morceaux. Voilà un des gros charmes du disque que l'on découvre dès le début. Cela sonne vieillot et quelque peu abrupt mais toujours voilé d'une atmosphère mystérieuse, brûmeuse que dépeint justement l'artwork. Il y a une certaine beauté qui se dégage de cette noirceur, se rapprochant, dans l'esprit, du doom. L'ambiance se révèle très prenante et compense le manque de vitesse et de violence. L'intérêt est ailleurs désormais, même si les coups de sang réguliers font du bien. Dans cet excellent riffing à l'ancienne qui tricote malgré tout pas mal. Dans ces mélodies enivrantes qui ne vous quittent plus (foutre Satan ce "From Beyond They Came" à partir de 3'40 !). Dans ces vocaux emphatiques à la fois écorchés et chantés qui donnent une couleur assez originale à la musique des Allemands. Dans ces mid-tempos très efficaces. Dans ces quelques solos classes. Dans cette basse exquise. Dans cette production poussiéreuse qui sent le vieux et donne un cachet supplémentaire, encore plus d'authenticité, aux compositions.
Des compositions longues qui n'ennuient jamais car il y a toujours quelque chose qui capte notre attention. Allez, l'intro du titre de clôture est peut-être tenue un peu trop longtemps. Mais sinon, Witching Hour réussit largement sa transformation déjà entamée sur l'opus précédent et nous offre un des rares cas d'évolution moins brutale dont je ne me plains pas. Même de l'orgue sur "As I Walk Among Sepulchral Ruins" (annonciateur d'un prochain disque prog rock, je n'espère pas quand même !) ! Certains, plus thrash et black que heavy ont dû faire la gueule par contre et rester sur les anciens albums. Tant pis pour eux ! Les autres, si vous aimez le vieux heavy/NWOBHM du début des années 1980 mâtiné de BM première vague et de speed old-school avec un feeling épique, progressif et atmosphérique, c'est du nectar ! On pense un peu à ce qu'est devenu Darkthrone. Le trio d'outre-Rhin fait montre ici d'un feeling rare, que ce soit dans les leads mélodiques ou les riffs tant les guitares font plaisir.
...and Silent Grief Shadows the Passing Moon se bonifie même avec le temps, preuve irréfutable d'un grand album. Faut-il toutefois voir de l'opportunisme dans cette évolution ? C'est tellement bien fait, ça paraît tellement sincère que je ne pense pas. De toute façon on s'en branle, c'est putain d'excellent et au final il n'y a que ça qui compte. Quel con de ne pas avoir chroniqué plus tôt ce disque qui ne passe pas loin du chef d'œuvre. Mais c'est enfin fait, me voilà soulagé du poids de la culpabilité !
1 COMMENTAIRE(S)
03/09/2021 11:13
Je ne connaissais pas...