The Flight Of Sleipnir - Eventide
Chronique
The Flight Of Sleipnir Eventide
The Flight of Sleipnir fait partie de ces groupes que j’apprécie beaucoup, que je suis depuis leurs débuts et dont, ici ou ailleurs, j’ai toujours souhaité assurer les chroniques tant leur originalité m’est apparue comme singulière. A l’occasion de la sortie d’Eventide, leur petit dernier, un coup d’œil par-dessus l’épaule m’a permis de réécouter et de me remémorer combien Saga, Skadi, V. et même Essence of Nine étaient forts. Combien leur doom très stoner, aux accents folks et BM magnifiques, pouvait transporter l’auditeur par delà les cimes et la canopée, le cheval ailé porté par les vents…
En outre, le combo ricain n’a pas son pareil pour proposer des artwork de toute beauté, souvent en adéquation absolue avec le contenu musical, qui participe à renforcer davantage encore l’identité des américains. Eventide s’inscrit naturellement dans cette lignée, la pochette sombre, nocturne et mystique annonçant la tonalité musicale à venir. Le BM est toujours présent, au moins dans les vocaux ; la folk éthérée et mystique aussi. Quant au doom, il arpente toujours les massifs du stoner et ne rechigne pas, de nouveau, à introduire une bonne dose de fuzz là où il faut. Oui, du fuzz et du BM, tout ça dans la même marmite.
Voland ouvre ainsi l’album sur des envolées très épiques, dopées par un son ample et soyeux, ultra confortable. Les mélodies sont au cœur du morceau, comme souvent chez The Flight of Sleipnir, et déroulent leur propos d’une manière très prog’ et psyché aussi. Seule la voix, très black, tranche littéralement la structure en lui apportant une agressivité bienvenue. Comme à son habitude, le combo use et abuse des ponts atmosphériques aux tonalités folks (sur Voland, dès la 2’ par exemple) avant que la grêle ne tombe à nouveau, fruit de guitares lourdes.
Les morceaux sont chargés en informations et en changement de direction. Les enchaînements stoner lourds et les ponts atmosphériques constituent une partie du débat ; l’autre tient dans le mix permanent de l’agressivité des guitares et de la voix qui se mêle à des tonalités heavy au travers des nombreux solis magnifiques qui amplifient la musique et les propos du groupe. Voland mixe ainsi des phrasés ultra lourds et des envolées lyriques incroyables. January démarre sur un entrelacs de riffs sublimes, tournoyant, mêlés à une voix BM qui déchire l’espace. La mélodie occupe toute la structure, comme un gaz rempli une pièce dans son intégralité. En arrière-plan, d’autres riffs s’ajoutent, plus atmosphériques, qui débouchent sur un nouveau pont, plus enlevé, plus dissonant. Déroutante, la musique de The Flight of Sleipnir l’est assurément. La fin de January, tout en poésie aérienne, en guitare sèche déliée mêlée aux chants d’oiseaux est juste de toute beauté.
Même les enchaînements entre les titres sont étudiés. La sortie lourde de Voland et l’entrée aérienne sur January ; la sortie champêtre de January et le départ plus menaçant de Thaw. Tout concourt pour qu’avec le plus grand naturel, l’auditeur suive le chemin tracé par le groupe, un chemin pourtant escarpé, fourmillant de sentiers de traverse, mais dont on ne ressent aucun effort, rien d’autre qu’une béatitude incroyable. Thaw et Harvest reconduisent ainsi les ponts atmosphériques antérieurs mais d’une autre façon, non plus à la guitare sèche mais à la guitare électrique, pour des accents plus « durs » mais tout aussi habités. La raison ? Le pont débouchera sur un passage plus black, plus dissonant, avec une voix totalement possédée… la cohérence encore et toujours, d’autant que les arrangements de fin de titres, comme sur January, sont simplement hors sol, hors du temps, très lourds mais absolument enchanteurs. De nouveau, le lien avec le titre suivant Bathe the Stone in Blood, comme avec Harvest qui le suit, est surprenant : fin sur des accents BM, départ sur des riffs bourrés de fuzz, presque psyché, ultra planants ; fin de Thaw sur des aspérités sombres, départ de Bathe the Stone in Blood sur une mélopée champêtre. Et pourtant, de nouveau, tout s’enchaîne à merveille. Tout est cohérent, à sa place.
Servitude clôture l’album sur des tonalités très proches des premiers Wolves in the Throne Room. On ne va pas s’en plaindre, le groupe montrant encore, s’il le fallait, ses aptitudes en terme de compos prog’ et de mélange quasi parfait des genres.
Honnêtement, que dire de mal de cet album ? The Flight of Sleipnir est un groupe qui ne déçoit jamais, dont la science de la composition est telle que chacun de ses albums est une redécouverte de merveilles qu’on pensait enfouies à tout jamais. La diversité du propos, sa mise en place naturelle, la beauté et la puissance qui se dégagent des compos de Eventide imposent le plus grand respect.
| Raziel 2 Octobre 2021 - 2217 lectures |
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