Bâ'a - Egrégore
Chronique
Bâ'a Egrégore
Gardant son mystère et possédant désormais une certaine aura depuis l’excellent
« Deus Qui Non Mentitur » publié il y’a presque deux ans, le projet ésotérique du sieur Hreidmarr est de retour avec un successeur attendu où les ambiances religieuses sont toujours présentes de fort belle manière, et où la qualité générale se montre toujours aussi constante. Car continuant sur le même chemin tracé par son prédécesseur ce nouvel opus (dont le nom signifie l’ensemble des forces et énergies produites par les personnes lors de travaux en commun) va mettre en avant une violence collective assumée où la lumière divine se mêle à la noirceur psychologique, entre tempêtes déchaînées et passages plus apaisants propices au travail sur soi. Tout cela va être présent en continu sur ce nouveau chapitre, qui tout en étant sans surprises et balisé va néanmoins montrer une densité et une variété encore plus importante, ce qui va avoir pour effet d’éviter la redondance sans pour autant être totalement déboussolé par ce léger changement.
Car débutant par « In Umbra Et Luce » ce second volet du combo va montrer une continuité et stabilité rassurante franchement réussie, où toute sa variété et palette technique ne vont cesser de se mélanger et d’alterner régulièrement sans que cela ne devienne indigeste. En effet débutant par une froideur extrême et une ambiance occulte où résonnent au lointain des percussions dignes d’une messe noire, l’ensemble va ensuite varier entre blasts déchaînés, parties rapides entraînantes et passages lents et rampant où la voix parlée amène un supplément de dévotion et de croyance, notamment via des chants grégoriens qui servent de parfaite conclusion. Entre tout cela la virulence y est intense et l’on est pris dans un tourbillon d’où émerge néanmoins une certaine luminosité de par les riffs coupants et les montées en pression qui viennent et disparaissent au fur et à mesure du tempo proposé. Laissant largement le temps pour développer sa matrice et montrer tout le panel d’influences et de tempos cette plage continue dans la droite ligne de « Procession » (pour le côté mystique) et « Titan » (pour la fureur), qui étaient présents sur le précédent album. Puis progressivement le trio va simplifier sa musique sans pour autant la dénaturer, celle-ci va en effet gagner en intensité sur l’excellent « Domitor » où les cyclones et dépressions venteuses vont prendre une place prépondérante, tant ça va tabasser intensivement. Heureusement quelques petits ralentissements bien sentis comme une éclaircie au milieu du déluge vont permettre de souffler quelques instants (où la voix haranguant la foule amène un soupçon de noirceur en rabe), vu que la force de frappe y est débridée de par sa batterie qui blaste presque en continu comme sur le tout aussi suffocant « Bellum » qui voit également l’ajout de plans épiques et guerriers implacables. Se faisant plus directe cette composition est certainement la plus radicale de cette galette tant tout y est plus frontal mais sans pour autant tomber dans la facilité, même si ici les effets sonores se font plus discrets pour obtenir quelque chose de délicieusement rétro qui sent bon le satanisme de bas-étage, et toujours agréable à entendre.
Néanmoins une fois cet instant nostalgique terminé la formation va retrouver sa vraie personnalité de par un « Fames » hypnotique et glacé, aux accents Doom prononcés et légèrement répétitif sans pour autant ennuyer l’auditoire. Car proposant un rythme bridé qui ne varie pas sur la longueur l’ensemble apparaît différent du reste et semble avoir été inspiré par AU CHAMPS DES MORTS, tout en maintenant sa qualité intrinsèque et mettant le tabassage et l’explosivité légèrement de côté au profit d’ambiances étouffantes et d’un voyage illuminé vers des contrées inconnues. Si tout cela peut sembler traîner en longueur cela n'est pas rédhibitoire tant on est happé vers cet ailleurs mystérieux où le chant et l’ensemble des instruments (où la rapidité est totalement absente) offrent autant une ode à l’obscurité qu’au renouveau solaire, au rendu final totalement à part mais étonnant et surtout réussi à 100 %. Cependant après avoir disparu de façon éphémère les hautes vitesses vont réapparaître dès l’intro de batterie de « Obitusque » qui voit le retour à une écriture frontale, directe et sans concessions, seulement interrompue par un passage au ralenti tout aussi planant que sur le morceau précédent, et dont la fin acoustique amène aussi un sentiment de plénitude au milieu des rafales guerrières qui font du bien par où ça passe.
Se clôturant par le varié et épique « Urbi Et Orbi Clamant » (qui ne traîne pas en longueur et sert de parfait récapitulatif à tout ce qu’on entendu jusque-là) ce deuxième volet des aventures de BÂ’A est une totale réussite, du même niveau que son très bon prédécesseur. Comme lui malgré une facilité de façade il va falloir du temps et de l’attention pour en saisir et maîtriser toutes les subtilités, prouvant que musicalement tout cela est bien plus élaboré et intéressant que ça peut en avoir l’air à la base. Classique tout en étant élitiste cette œuvre s’adresse à tous les publics et fans de Metal noir… que ce soit vers les puristes qui aiment que ça joue fort et vite ou du côté de ceux qui aiment un travail minutieux et d’orfèvre sur les orchestrations et l’écriture, et nul doute qu’elle trouvera comme la précédente facilement son public. En tout cas on y ressent totalement l’expérience et la maturité de ses membres qui arrivent à rendre relativement accessible une création plus complexe qu’il n’y parait, et qui se place à l’instar de ses musiciens dans le haut du panier de la hiérarchie du genre en France, où la concurrence y est pourtant particulièrement relevée. Bref tout cela est le signe du niveau de cet écrin qui se dégustera à chaque écoute qu’elle soit attentive ou non, mais qui procurera du plaisir durant un bon moment et c’est bien cela l’essentiel.
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