C'est un plaisir de retrouver Haunter en aussi grande forme, tout en étant l'un des témoins de leur fulgurante évolution. Les Texans n'ont pas le temps d'avoir le temps, comme dirait la philosophe. Tenez, prenez les six dernières années d'existence du combo. 2016 voit sortir
"Thrinodia", sorte de Screamo vaguement Black, de facture relative - mais probablement du petit lait pour ceux qui apprécient le genre. C'est ce qui succède à ce premier longue durée qui se révèle être le plus intéressant : trois splits successifs, partagés avec Black Vice, Sovereign et Crawl, qui verront Haunter prendre de l'assurance, noircir le trait, devenir plus mordant, aussi... Sans jamais remiser sur l'émotif.
Vient alors le monolithe
"Sacramental Death Qualia", accouché fin 2019 par les transalpins I, Voidhanger Records. Un coup de foudre, disque ambitieux, hybride réussi du meilleur du Black et du Death Metal, noir total et profond transpercé par des fulgurances mélodiques, et un interlude saisissant de beauté. Bref, c'est dire si j'attendais la suite avec impatience. J'en connais un autre qui devait sûrement ronger son frein : Chris Bruni. Le patron de Profound Lore Records fit encore preuve de son pif légendaire, profitant de l'occasion pour signer les quatre larrons pour ce
"Discarnate Ails", dévoilé au public en Mai 2022. Haunter a-t-il réussi à faire encore mieux ?
Sans surprise, la réponse est oui. Pardon :
OUI ! "Discarnate Ails" est le disque de tous les excès, grandiloquent comme un Depardieu entre les mains de Rappeneau : Un roc, un pic, un cap, que dis-je, un cap ? Une peninsule ! Haunter ouvre les vannes, en fait des caisses, s'éclate et nous régale. La sublime pochette, signée d'Elijah Tamu, résume à la perfection le périple qui nous y attend : espaces gigantesques, éléments déchaînés, et formes plus abstraites n'inspirant que crainte et respect. Il est loin, le temps du monochrome à la Soulages de
"Sacramental Death Qualia" ! Haunter est sorti de sa lente flottaison dans le vide pour aller gravir l'Olympe, histoire de botter deux ou trois culs.
Première chose qui frappe, d'entrée de jeu ? Le passage d'Arthur Rizk (qu'on ne présente plus) et Dan Lowndes (du Resonance Sound) derrière les consoles, musclant d'avantage le jeu de Haunter : un son imposant, toujours très juste, jamais artificiel, occupant l'espace sans qu'aucun instrument ne piétine les plates-bandes d'un autre. Encore heureux, d'ailleurs, car des cordes jusqu'aux fûts, chacun tient la baraque et son rôle à merveille tout au long de ces trois nouveaux titres. On retrouve, sur
"Discarnate Ails", tout ce qui avait pu nous charmer sur
"Sacramental Death Qualia", mais en mieux. Les arpèges et guitares claires sont encore plus poignants, les
soli épars concourent à cette ambiance de fin du monde, figurés par chacun des riffs d'Enrique Bonilla et Bradley Tiffin. Les deux larrons tricotent comme jaja, entre tarabiscotage invitant au lever de poing (l'ouverture de "Chained at the Helm of the Eschaton") et duos distorsion / notes claires ("Spiritual Illness") qui faisaient déjà les plus belles heures de l'album précédent. Parce qu'elle est là, la véritable force de Haunter. Dans sa capacité à faire cohabiter deux univers diamétralement opposés : à ma droite, le chaos de guitares ardentes, de percussions rondes, de cymbales qui douchent, maculant littéralement le spectre sonore; Et à ma gauche, la superbe de mélodies fugaces, le panache de ces notes cristallines, dosées avec justesse et
timing.
Au final, je n'aurai qu'un seul grief à l'encontre de
"Discarnate Ails", et de taille. Enfin, si l'on peut dire... Que c'est court ! D'ordinaire peu client de ce genre de découpage en peu de titres qui prennent leur temps, me voilà servi. Trois titres, donc, pour à peine plus de 30 minutes : il me manque au moins un quart-d'heure pour être rassasié, les gars ! Ce n'est pas véritablement de la déception, tant ce qui est condensé dans ces trois compositions m'accroche l'oreille - Il serait plus juste de parler de frustration, tant le palier franchi par Haunter est impressionnant, que ce soit en terme de qualité d'écriture, de composition, ou tout simplement de technique. J'aurais bien repris du rab' !
Reste qu'il faudra très certainement composer avec
"Discarnate Ails" lorsque viendra la fin de l'année, et qu'il faudra se retourner sur les temps forts qui l'auront rythmé. Haunter signe un nouveau sommet dans sa discographie, merveille de Black/Death Metal intelligent, qui aurait bel et bien pu tutoyer les cieux s'il ne lui avait pas manqué quelques centimètres pour atteindre les nuages.
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