Haunter - Sacramental Death Qualia
Chronique
Haunter Sacramental Death Qualia
Soyons honnêtes : je découvre l'existence d'Haunter avec ce second opus. Avant ? Jamais écouté. Oh, j'ai bien du voir passer "Thrinodia" quelques fois, mais l'austérité de sa pochette et l'étiquette "Black/Death" et surtout "Screamo" me laissaient craindre d'abord l'ennui, puis le ridicule (dans l'ordre). J'entends bien : "Mais alors, sombre idiot, qu'est-ce qui te rend légitime pour aborder ce dernier longue durée ?". Je suis comme vous : je me collerais bien des baffes à l'occasion, tant ce que j'ai découvert sur "Sacramental Death Qualia" tient de l'épiphanie - mais à grands coups de pompes dans le derrière. C'est que les Texans sont d'excellents boxeurs ; Ils collent des bourre-pifs à t'en faire décoller du ring, certes, mais la technique, le jeu de jambes, la gestuelle... Tout est ciselé, tout a été bossé avec acharnement, et l'amateur ne s'y trompera pas.
C'est justement ce double-jeu qui rend "Sacramental Death Qualia" aussi intéressant. Au-delà de l'étiquette "Black/Death" revendiquée, qui pourrait ne masquer qu'un énième album sans inspiration, agressif sans jamais être brutal, Haunter pioche dans ses influences, qu'elles viennent du Jazz Fusion (qu'on ne vienne pas m'affirmer le contraire à l'écoute de certains plans de batterie, notamment à 2:39 sur "Spoils Vultured Upon Sole Deletion") ou tout simplement de la musique Prog. Et loin d'être un patchwork cousu à la hâte, l'univers dépeint par ce deuxième long-format est aussi cohérent qu'envoûtant. I, Voidhanger ne s'y est d'ailleurs pas trompé, offrant au groupe un pressage digne de ce nom, et une pochette signée par l'excellent Elijah Tamu (Panegyrist), qui colle à merveille à l'ambiance du disque.
Oui, l'ambiance. C'est bien sur ce point que le groupe tire son épingle du jeu, et qu'il réussit à séduire les sceptiques - moi le premier, qui d'ordinaire ne tarde jamais à piquer du nez en présence d'un disque de Death. Le constant décalage entre le feeling massif de l'ensemble, navire imaginaire fumant, figuré par la pochette, naviguant au beau milieu du vide, et les quelques percées cristallines disséminées tout au long du périple, notamment les quelques notes de piano de la seconde moitié de "Dispossessed Phrenic Antiquity", aussitôt contrebalancées par un riff qui invite à se déboîter les vertèbres. Le chant grave, qui occupe l'espace immense déployé par les instruments, et les hurlements plus rauques qui lacèrent les tympans, jouent à la balançoire et avec nos nerfs. Oui, "Sacramental Death Qualia" se construit sous nos yeux, et le bâti est si grand que le vertige ne tarde pas à nous gagner. Les sentiments qu'il évoque sont bien difficiles à décrire, tant ces cinq titres sont personnels, et tant chacun les vivra comme il l'entendra. Tenez, à titre personnel, mon titre favori est "Abdication", l'interlude acoustique de 7 minutes. Étrange, pour un album de Death, hein ? Pas tant, c'est bien là la force d'Haunter : il est là où on ne l'attend pas. Et la beauté de cette guitare folk, conjuguée à ce motif déchirant et ces chants en toile de fond, forcément, ça me fait fondre.
"Sacramental Death Qualia" est grand. Grand par la taille, grand par ce qu'il peut figurer, grand par le talent de ses cuisiniers. Haunter livre ici un disque mature, maîtrisé de bout en bout, certes pétri d'influences mais qui réussit à ne jamais les rendre trop évidentes. Un disque d'une puissance et d'une beauté comme on aimerait plus souvent qu'il nous en passe par les oreilles - et qui ne dépareille pas au sein du catalogue d'I, Voidhanger, loin s'en faut. J'en ai assez dit, un galette pareille, ce n'est pas en lisant qu'on la savoure, mais bel et bien en l'écoutant. Qu'est-ce que vous faites encore là ?
| Sagamore 15 Janvier 2020 - 1481 lectures |
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