[ A propos de cette chronique ] Je suis chanceux, je te l’ai déjà dit, il me semble. J’arrive à un âge où je peux à peu près choisir très librement de ne chroniquer que ce qui me plait sans m’embarrasser de choix drastiques, sans égard pour la quantité, les records ou je ne sais quoi d’aussi absurdes, mais juste en sélectionnant à l’extrême ce qui me paraît être digne d’intérêt pour toi, auditeur averti.
Et cela tombe bien car dans mes sélections sévères, c’est aujourd’hui le célèbre Grand Belial’s Key que je vais te donner à écouter. Tête de gondole de la scène black ricaine, qui a traversé un certain nombre de galères sans jamais sombrer totalement, Grand Belial’s Key appartient à cette catégorie de groupes pour qui quantité rime avec qualité. C’est rare, tu le sais comme moi. Les groupes de cette trempe se comptent sur les doigts de la main d’un lépreux.
J’avoue n’avoir jamais été déçu des productions du combo ricain. Si Kosherat m’a toujours semblé être le sommet de leur carrière, ce dernier album a aussi sonné leur traversée du désert, contraint par le décès de Grimnir Heretik, leur vocaliste, en 2006. Plus de 16 ans plus tard, les voici donc de retour. Pour le meilleur, mon ami, rassure-toi.
Kohanic Charmers reprend là où s’en est arrêtée Kosherat, jusque dans la pochette typique des productions du groupe. Le mimétisme est fort, l’ambiance de nouveau prenante. Prayer Shawl of the First Born Donkey et Serpent Bibliomancy ouvrent d’emblée sur des sonorités connues, ces guitares tranchantes où la mélodie est littéralement rivée à la structure, coulée dans la masse avec une science que presque seul le combo américain détient. Mid-tempo, comme à l’habitude, le thème déroule ses lead mi-agressifs, mi-mélodiques avec passion et nombre de cassures / ponts qui enrichissent le propos. C’est rythmé, tantôt enlevé, presque punk (les accélérations sur Serpent Bibliomancy ou sur Fiscus Judaicus), tantôt lourd et pesant, le morceau change de direction sans jamais perdre son fil directeur : cette mélodie qui sert de fil rouge, comme le liant dans une bonne recette de cuisine, tel l’élément fédérateur entre tous les instruments.
Précisément, c’est la faculté de mêler des guitares relativement raw avec des mélodies aériennes et des soli diaboliques (proprement hallucinants sur The Door Is Marked with Sheep's Blood), le tout au sein d’une ambiance blasphématoire, mystique et brutale à la fois, qui impressionne. Comme est parfaitement étonnant, près de 20 ans après, de retrouver ces arrangements fantastiques qui accrochent l’oreille, parfois immédiatement, parfois à la seconde écoute, où l’on se surprend à découvrir une arabesque incroyable tapie en fond sonore, comme placée à l’arrière-plan du morceau mais qui lui donne une dimension, une épaisseur nouvelle proprement magnifique. Par exemple, sur Crud Drips from the Shofar, une merveille de titre, les guitares ultra thrash déchirent littéralement l’espace mais pourtant, lors d’une cassure brutale, en pont central, une gratte acoustique vient tisser un riff ultra léger, très doux, qui tranche absolument avec la brutalité du titre, lui octroyant une profondeur incroyable. Sans compter le riff central, repris à intervalle régulier, qui, de nouveau, alterne violence et mélodie dans un maelström chaotique pourtant parfaitement maîtrisé. De même, l’instrumental, Adrift in the Viscera of She'ol, est étrange, un peu electro, un peu spatial, bizarrement agencé mais toujours menaçant, sombre et mystique.
La voix demeure emplie de haine, comme pouvaient l’être celles de The Black Lourde of Crucifixion ou de Grimnir Heretik. Le mimétisme est là encore relativement fort, même si certains confrères ou certaines consœurs considèrent que la haine déversée n’est pas du même acabit. Honnêtement, la différence n’est pas si évidente à l’oreille, le timbre de Unhold (qui officie aussi dans Absurd) étant juste un peu plus death dans l’esprit (par exemple, sur The Door Is Marked with Sheep's Blood, autre titre incroyable, où les soli portent la structure dans un flot de violence ultra aérien).
Turbans Nailed to Their Heads vient clôturer l’album en opérant une synthèse du style du groupe, mélange de violence mélodique, de soli merveilleux et d’arrangements haut de gamme.
Kohanic Charmers est un album essentiel, comme le fut Kosherat. Ce retour en force, à un tel niveau, n’était plus espéré. C’est pourtant le cas, ce nouvel album ne souffrant aucune faiblesse, aucun temps mort, aucune répétition. Si tu veux entendre du black metal, du vrai, de l’essentiel, n’hésite pas un instant. Tu y trouveras tellement plus de satisfaction que dans les vieilles gloires qui reviennent faire n’importe quoi…
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