Lamashtu - Plaque Des Enfers
Chronique
Lamashtu Plaque Des Enfers
Formé en 2014 par un certain Sen Wieczny, Lamashtu n’est pas tout à fait né de la dernière pluie. Pourtant, il y a a priori peu de chances pour que vous ayez déjà croisé le chemin de ce one man band polonais pour la simple et bonne raison que celui-ci n’avait encore rien sorti avant juin de l’année dernière. En effet, c’est à cette date qu’est paru Plaque Des Enfers, premier album auto-produit disponible tout d'abord sur Bandcamp et autres plateformes de streaming avant un pressage CD en bonne et due forme grâce à l’implication sans faille de Malignant Voices, emblématique structure polonaise dotée depuis toujours d’un certain flair en la matière (Anima Damnata, Cultes Des Ghoules, Death Like Mass, Furia, Mgła, Doombringer...).
Composé entre 2014 et 2020, Plaque Des Enfers a été enregistré au studio Antisound de Tarnowskie Góry entre 2019 et 2020. Deux années supplémentaires auront donc été nécessaires avant que celui-ci voit enfin le jour. Alors évidemment, je ne connais rien à la vie de ce Sen Wieczny mais a première vue le bonhomme semble avoir été soit très occupé ailleurs, soit pas vraiment pressé de mettre un terme à cette première étape pourtant cruciale. En attendant de percer ce mystère, ces années de composition et d’enregistrement sont aujourd’hui derrière lui et même si cela aura été extrêmement long, on peut tout de même affirmer que cela en valait la peine.
Pourtant, du haut de ses trois titres et seulement vingt-huit minutes, Plaque Des Enfers n’impressionne pas vraiment. Il plane par contre un certain mystère autour de cette modeste première sortie. D’abord à cause de cette illustration énigmatique signée des mains d’un/e certain/e Witch Slaughter. Ensuite à cause de ce titre en français qui, entre les origines géographiques de Lamashtu et ses liens avec Malignant Voices évoquent forcement le cas des excellents Cultes Des Ghoules. Alors je le concède, cela peut sembler un petit peu tiré par les cheveux à ce stade de ma chronique mais une fois la lecture de ces trois titres lancée vous ne pourrez qu’abonder dans mon sens.
En effet, ce parallèle s’inscrit bien plus profondément et fait écho à d’autres éléments plus probants pour ne pas dire indiscutables. Certes, cette production abrasive qui drape de son voile rugueux ces quelques titres y est naturellement pour quelque chose mais ce sont surtout ces compositions au long cours, ces structures tortueuses et torturées, ces changements de rythmes soudains et ces intonations vocales malades et possédées qui participent principalement à dresser cette comparaison. Puisant son inspiration du côté de la mythologie mésopotamienne (Lamashtu est en effet le nom d’une divinité particulièrement malveillante provoquant notamment cauchemars et fausses-couches en plus de se nourrir du sang et de la chaire des hommes), le one man band polonais évite l’écueil de la pâle copie dénuée d’inspiration en allant explorer d’autres territoires et horizons. On appréciera ainsi de pouvoir entendre tout au long de l’album de manière relativement, brève ces nombreuses sonorités aux couleurs moyenne-orientales. De ce gong imposant à cette cithare entendus sur "Amuleth I" en passant par ces successions de cloches sur "Amuleth II", cette longue introduction acoustique sur "Amuleth III" et autres petits éléments plus discrets, Lamashtu accompagne effectivement l’auditeur dans un voyage au coeur de contrés lointaines et ancestrales marquées par la présence menaçante de divinités infernales. Ainsi à travers cette quête d’identité aussi ténue soit-elle, Lamashtu offre à ses compositions un soupçon de consistance supplémentaire qui aide à l’assimilation de ses influences pourtant évidentes.
En effet, comme évoqué plus haut, l’impact de Cultes Des Ghoules sur la musique de Lamashtu semble absolument évident. En choisissant de s’exprimer à travers des compositions relativement longues comprises entre six et dix minutes, le one man band polonais entretien ce caractère généreux, alambiqué et souvent insaisissable qui qualifie le groupe de Marek Górecki. Ainsi au sein d’un même morceau les séquences se succèdent mais ne se ressemblent pas, le groupe alternant fulgurances au riffing simple et répétitif mais ô combien efficace ("Amuleth I" à 0:58, 2:40 ou 5:38, "Amuleth II" à 3:27, "Amuleth III" à 1:52 et 8:57), passages nettement plus sinueux ("Amuleth I" à 1:24 et 3:11, "Amuleth II" à 0:52 et 5:42, "Amuleth III" à 2:46) et même de courtes plages purement ambiantes ("Amuleth I" entre 5:06 et 5:37 et "Amuleth II" entre 4:39 et 5:26). Une variété dynamique mais également atmosphérique puisque les ambiances proposées tout au long de ces vingt-huit minutes se font tantôt menaçantes, tantôt processionnaires et funestes, tantôt sournoises... Enfin, impossible de ne pas évoquer évidemment le chant de Sen Wieczny marqué d’une manière tout de même moins appuyée, intense et radicale par quelques uns des gimmicks vocaux utilisé par l’incroyable Mark Of The Devil. Une voix aux identités multiples qui semble porter en elle les masques d’une folie dérangeante et consumante. Bref, vous l’aurez compris, quitte à puiser son inspiration du côté de Cultes Des Ghoules, autant y aller franco.
Premier album modeste, notamment par les quelques chiffres qu’il avance, Plaque Des Enfers n’est est pas moins une première sortie particulièrement convaincante, du genre de celle qu’il ne faudrait pas sous-estimer. Effectivement, difficile de ne pas évoquer Cultes Des Ghoules à l’écoute de ces trois compositions mais l’entité polonaise à parfaitement su les digérer allant même jusqu’à cultiver par le billet de thèmes et de sonorités moyen-orientaux une certaine identité. Une fois encore, Malignant Voices ne s’y est pas trompé et si vous êtes un amateurs de Black Metal polonais abrasif et habité aux atmosphères chargées, vous seriez effectivement bien avisé de ne pas faire l’impasse sur ce premier album fort réussi.
| AxGxB 14 Avril 2023 - 721 lectures |
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