Voyager - Fearless In Love
Chronique
Voyager Fearless In Love
« Born… to be better… »
Voyager m’a mis un bon paquet de tannées en peu de temps depuis ma découverte récente du groupe grâce à un éminent collègue de votre webzine préféré. Suivant les conseils de ce bon Neuro, j’ai d’abord saigné Colours In The Sun (2019) comme il se doit, très efficace dans ce registre metal progressif teinté d’influences pop et electro que pratiquent avec grande intelligence les Australiens depuis 1999. Première claque. Avec V (2014), sans doute leur opus le plus marquant, j’en prenais une deuxième. Impossible de me sortir « Hyperventilating » de la tête. Il y a une mélodie digne d’un single de diamant sur ce refrain. Tant et si bien que Voyager s’est invité de plus en plus régulièrement dans mes écoutes quotidiennes, au point d’en devenir quasiment un incontournable. Merci Neuro. Lorsque je les ai vu en première partie de VOLA au Backstage By The Mill dans la capitale un soir de septembre, j’étais déjà en terrain conquis, tant la connivence entre ces Danois dont j’avais réceptionné le dernier opus Witness (2021) sur Thrashocore et ces fantasques Australiens coulait de source. Tous deux sont des fers de lance de cette nouvelle scène progressive qui fait tout pour sortir des sentiers battus et renouveler un genre un brin engoncé dans ses codes. La dernière claque en date fut la révélation de « Promise », premier single du huitième opus et surtout porte-drapeau des Australiens lors du concours de l’Eurovision, auquel ils finirent à une neuvième place imméritée, tant - sans objectivité aucune - ils volèrent le show ce soir-là. Il faut dire qu’il n’y avait pas grand chose en face… mais même si j’ai l’impression d’écrire un Kamoulox, ils furent la seule et unique raison de mon visionnage et de mon vote, occasionnant la perte de quelques heures et de quelques centimes. Pas grave, j’étais déjà convaincu que Voyager me rembourserait au centuple avec Fearless In Love, une paire de mois plus tard. Et puis c’est quand même pas tous les jours qu’un groupe signé chez Season Of Mist participe à un télécrochet en mondovision.
Alors, y a-t-il eu un effet Eurovision pour la bande à Daniel Estrin (voix, claviers) ? Un paquet de nouveaux venus a du se jeter sur cette dernière sortie. Ils ont parfaitement raison! Il faut dire que le groupe s’est sacrément bien vendu avec cette performance mémorable et ce tube explosif capable de tout déchirer en radio. Vendu mais pas perdu. Malgré cette brève surexposition médiatique, Voyager a su rester lui-même, tout en lissant et en faisant progresser sa formule. Aux côtés de Simone Dow et Scott Kay (guitares), Alex Canion (basse) et Ashley Doodkorte (batterie), l’étincelant vocaliste et fondateur du groupe s’est échiné à composer une nouvelle salve de morceaux cohérents, toujours solidement ancrés dans cette base metal progressif teintée de sonorités modernes et catchy. Les Australiens sculptent à nouveau ce savant mélange entre leur ying, une pop sucrée impulsée par des vagues de claviers rétro bien senties et bien représentées par cette direction artistique flashy à base de keytar rouge et leur yang, une violence guidée par les coups de semonces ravageurs des guitaristes, toujours très inspirés dans leurs diatribes maîtrisées. Voyager cultive ce contraste sur l’ensemble des onze morceaux de Fearless In Love, à l’image de cette dualité bleutée du meilleur effet qui orne sa pochette. Il suffit d’entendre le tempo sautillant d’un « Dreamer » au feeling electro-variétoche eighties s’échouer sur un bon gros break massif et surpuissant pour considérer la grande maîtrise des Australiens dans ce registre bipolaire toujours sous tension, entre deux eaux. Et oui…
« We are pure
Our manner so demure
And you can taste the tension
but there's only one dimension
So stand up and shout it out
But you can take your knives out
Have I already mentioned that I had the best intentions?
I had the best intentions… »
… le langoureux morceau d’ouverture ne dit pas autre chose : Voyager, à l’image de sa sirène Daniel Estrin à la tessiture aérienne, est plus que capable de surprendre son monde et de conquérir instantanément. Et bordel, qu’est-ce que ça marche bien! La tracklist alterne judicieusement entre les bangers absolus, à l’image des singles promotionnels qui en furent extraits, comme « Promise », tube intergalactique conjuguant à la perfection les codes de la pop séduisante et du prog moderne avec sa rythmique ciselée absolument chirurgicale et ce refrain qui ne fait pas de prisonnier. Passer après cette tuerie nécessite d’avoir les reins solides. « Twisted » et son petit côté Paradise Lost époque Symbol Of Life (2002) les a sacrément. « Ultraviolet » aussi, avec son tempo ravageur, son clip léché et l’intervention d’un Sean Harmanis (Make Them Suffer) venu défoncer la porte et les frontières de genre musical. Elle dévoile aussi de véritables cartes au trésor, morceaux à tiroir comportant des surprises qui se révèlent après moult écoutes. Dans ce camp-là, on compte le turbo-mélancolique « The Lamenting » qui atteint le cœur crescendo après plusieurs répétitions ou encore « Gren (Fearless In Love) », pépite qui prend son temps pour évoquer la maestria d’un Devin Townsend, tout comme l’ouverture « The Best Intentions » et la fin énorme de « Submarine ». Un « Prince Of Fire » constitue la synthèse parfaite entre ces deux pôles, culbutant les auditeurs entre l’efficacité primaire de son clavier obsédant et les saccades ravageuses des guitares de Simone Dow et Scott Kay. En définitive, la force de Voyager est de parvenir à faire des choses simples, évidentes mêmes, avec un niveau technique et une exigence toujours irréprochables. Leurs créations qui ne dépassent que rarement les quatre minutes savent aller à l’essentiel tout en contentant au passage les amateurs de prouesses techniques : les contretemps, les soli emblématiques de guitare ou de keytar viennent offrir du grain à moudre. Le charisme éclatant du vocaliste fait le reste. Malgré - forcément - quelques passades plus anecdotiques (« Listen », « Submarine »), les Australiens proposent systématiquement un contenu varié, presque universel, qui trouvera toujours un amateur quelque-part. Ce n’est pas à la portée du premier venu…
Une fois encore, donc, Voyager me malmène, me fait passer par plusieurs émotions contradictoire, entre l’euphorie libératrice et l’introspection solitaire. Nul doute que les Australiens sont parvenus à élargir substantiellement leur audience avec le gigantesque coup de projecteur qu’ils ont offert à leur carrière. Avec Fearless In Love, prolongement opportun de cette expérience et porte d’entrée idéale vers une discographie qui regorge de tubes et de morceaux emblématiques, l’essai est transformé. Après cette noble prise de risque, Voyager mérite plus que jamais de prendre une nouvelle dimension. À très vite pour une nouvelle claque, donc.
| Voay 17 Juillet 2023 - 1402 lectures |
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