J’avais conclu ma précédente chronique de l’EP
« Magie, ténèbres, amertumes » par ces mots : «
A présent, je n’ai qu’un seul souhait : que Sans-Visage trouve le temps d’écrire un album complet qui permette de développer toutes les idées, l’homme semblant parfois tiraillé entre des oxymores musicaux que le format court ne permet pas de totalement résoudre ». Je n’aurais pas eu bien longtemps à attendre puisque le voilà, ce tout premier album, intitulé «
Le départ » : six morceaux (que l’on espère de choix), un peu moins de quarante minutes (la durée quasi idéale), un mastering une nouvelle fois confié à
Borie de la Combe Noire, l’homme seul derrière
PRIEURÉ rassemble ses gars sûrs pour ce qui est sans doute l’accomplissement de ces trois années d’existence.
Depuis ses débuts,
Sans-Visage a considérablement allongé la durée de ses compositions. Lorsque l’on a de nombreuses de choses à exprimer, il n’y a pas trente-six solutions : soit tu écris plus de titres pour aborder davantage de sujets, soit tu les densifies pour mieux développer tes propos, option retenue ici. Du côté de l’esthétique, rien n’a changé, nous retrouvons le lettrage gothique et le choix du noir et blanc pour une illustration une nouvelle fois très médiévale qui me fait me souvenir de Chrétien de Troyes ou des Lais de Marie de France (« Les années fac » aurait dit Jean-François Porry), c’est évidemment totalement cohérent avec le style de
black metal que pratique le groupe.
Justement, ne nous laissons pas tromper par les aspects rock rudimentaire de l’instrumental introductif qu’est « Priusquam », même si son étrangeté ne détonne pas tant que cela dans la globalité de l’album. En effet,
PRIEURÉ ne fait une croix ni sur son héritage
punk (« Du haut de la tour ») ni sur sa ruralité, cet attachement à la simplicité terrienne s’exprimant à travers la production rêche, brute et sans fard de «
Le départ ». Cela n’en fait pas pour autant un disque sans subtilité, il a juste le caractère bourru des hommes du terroir (putain, je nage en plein cliché là non ?), le pragmatisme franc de ceux qui ont beaucoup à dire et rarement l’occasion de s’exprimer publiquement. Car c’est bien là l’une des choses qui me séduit particulièrement dans la musique de
Sans-Visage : l’esthétique médiévale que l’on retrouve dans les visuels ou encore les titres des chansons ne transparait que peu dans la musique, cette dernière privilégiant donc un
black metal pur et sobre dont la seule concession mélodique serait peut-être l’utilisation d’une guitare acoustique, dans « Les deuss » par exemple.
Quant à l’album pris dans sa globalité, il a l’homogénéité stylistique qui faisait encore légèrement défaut aux productions passées. Les deux pieds fermement plantés dans le lisier, la voix éructe, noyée dans un flot d’effet réverbe, surplombe des amoncellements de riffs secs, spectres faméliques enflammés par la rage. La batterie a, il me semble, elle aussi gagné en densité, notamment sur les passages les plus rapides (« Du haut de la tour ») et si son jeu reste assez peu démonstratif, il se prête admirablement à tous les tempos. Au final, il n'y a guère que la basse qui pâtit un peu du choix de ces sonorités très claires, pour ne pas dire stridentes. Elle a du mal à se faire une place, son rôle étant plutôt d’assurer la densité des passages instrumentaux en suivant scrupuleusement sa ligne rythmique, ce n’est assurément pas l’instrument roi de cet enregistrement.
Pour conclure, je pourrais dire que
PRIEURÉ semble enfin être parvenu à définir le périmètre de sa vision du
black, ou tout du moins à lui avoir donné sa forme la plus aboutie à ce jour. Je n’entends plus du tout l’influence des vieux
PESTE NOIRE, la formation affirmant totalement son positionnement à la fois « raw black » mais également punk, la dimension « metal » n’étant en fait presque pas présente et c’est peut-être bien là la spécificité de ces chansons venues d’Armorique : une hybridation totalement réussie de genres extrêmes dont seule la moelle, riche, a été conservée. Il est là, le véritable « hymne de nos campagnes » : il sent la gnôle et l’étable, se bat à coups de fourche, parle en patois, se fout des modes et des mouvances.
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