Sans vouloir épiloguer outre-mesure sur le post-hardcore se rêvant sludge (qui n’est pas sans rappeler la fable de la grenouille se rêvant bœuf mais passons), je ne comprends pas le terme « sludge atmosphérique » quelque fois utilisé pour qualifier les Isis et compagnie. Cette dénomination liant le style d’Eyehategod à une certaine idée d’élévation, cette mise en relation de l’horizontalité de l’un et la verticalité de l’autre, me paraît absurde, les deux étiquettes n’ayant pas grand-chose à voir au final.
Sauf chez Palehorse. Ce dernier parvient à donner un semblant de sens à l’expression, prenant le parti de dégueuler à ciel ouvert en mettant côte-à-côte les terrassements du sludge et les respirations hallucinées du post-hardcore – ancien comme… moins ancien – par des compositions évoquant aussi bien Fugazi ou June Of 44 que Mare, Khanate et Admiral Angry (à qui je pense beaucoup lors de « Don’t Bitch My Shit » par exemple). Une formule que les Londoniens ont magnifié sur
Soft As Butter; Hard As Ice, deuxième essai faisant suite à des débuts plus hésitants avec
Gee That Ain’t Swell.
Et il n’y a pas à se demander longtemps comment ce groupe (trop) méconnu s’est retrouvé signé par Candlelight – label décidément dans les bons coups cette année après les excellents Woe, Altar Of Plagues et Crown – lors de la création de ce troisième longue-durée puisque
Harm Starts Here reprend avec application les talents d’illusionniste de
Soft As Butter; Hard As Ice. Cette musique est-elle celle d’une bande de postcoreux plus viscérale que d’autres ou simplement un sludge sublimé ? Palehorse semble une nouvelle fois ne pas vouloir donner de réponse claire, préférant osciller entre pesanteur et contemplation avec une nudité constante servant de fil conducteur, une simplicité épatante pour un rendu aussi personnel. Aucune guitare chez les Anglais, que des basses et leurs cordes efflanquées juxtaposant riffs affamés et grésillants, titillant à la fois les limites du drone et du hardcore (« What Is Wrong With You People »), et bouffées d’oxygène à l’effet proche de l’hyperoxie, cette surpression pulmonaire survenant après de trop profondes plongées.
Mélanger climats méditatifs et agressifs avec autant de naturel n’est pas tout à fait rien. Pourtant, cette tendance qu’a Palehorse à se situer sur la crête sans jamais risquer le vol plané lui donne un air irrésolu durant « Bird Feed » et la première partie de « Five Grown Men », vagues dans leurs intentions. En effet, c’est dans ces moments où les Anglais se montrent à leur plus frontal qu’ils déçoivent, non pas par excès de gentillesse (rien que le chant, trop éraillé pour être sain d’esprit, fait vite oublier toute critique possible les accusant d’être une formation de post-hardcore maquillée de sludge) mais à cause d’une violence trop basique comparée à leur précédent jet,
Soft As Butter; Hard As Ice, bien que plus éclaté, étant plus convaincant dans son jeu sur différents tableaux.
Pour autant,
Harm Starts Here ne se destine pas qu’aux amateurs de curiosité, ne serait-ce que pour ses deux derniers morceaux où l’épuré vient claquer de sa gifle propre et nette. En une année 2013 plutôt avare en surprises, le retour inattendu de Palehorse aux affaires vaut bien de s’arrêter quelques temps vers ce disque constamment au bord de l’incohérence et pourtant dessinant sans prétention aucune un pont entre ambiances sociale et mystique, arrachée et rêveuse, sludge et post-hardcore. Décidément, il n’y a qu’en Angleterre que se réalise ce genre de tour de passe-passe !
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