Tout le monde connait
NASUM évidemment. Les Suédois jouissent d’un statut totalement culte dans le milieu
grindcore, voire au-delà, tant et si bien que nous pourrions nous interroger sur la pertinence de continuer à chroniquer leurs albums alors que tout a déjà été dit sur leur carrière, par des personnes mieux renseignées que moi… Pourtant, cela me fait mal au cœur de constater que
Human 2.0 est absent de ces pages, d’autant plus que ce disque est un peu l’une de mes madeleines de Proust, acheté en CD lors de sa parution, incompris au début puis poncé jusqu’à plus soif ensuite. Il faut dire qu’en 2000 ce genre musical m’était encore assez étranger et que ces vingt-cinq titres m’ont littéralement carbonisé la cervelle (ainsi que celle de ma famille devant subir le LP par murs interposés…). Attends : un album de
grind qui dure près de quarante minutes ? Bah oui mon con,
Inhale / Exhale (1998) avec ses trente-huit compositions faisait déjà près de quarante-cinq minutes et si
Helvete (2003) puis
Shift (2004) remirent la formation sur les rails de temporalités davantage en cohérence avec l’ultra violence musicale, cela n’avait alors rien de choquant. C’est plutôt payer cent francs un skeud de vingt minutes qui m’aurait foutu les glandes à l’époque.
Même si je suis conscient que les fans du groupe ainsi que les amateurs de
grind ne mettent pas forcément
Human 2.0 sur un piédestal, me concernant c’est leur équivalent du
Prowler in the Yard de
PIG DESTROYER ou leur
Harmony Corruption, soit la performance de référence qui a définitivement inscrit le son suédois au patrimoine mondial de l’UNESCO. En effet, au-delà des guitares qui croustillent comme des putains de petits pains dorés à souhait, tout l’album est une leçon d’alternance entre des pièces
overspeed allant de quelques secondes à la minute avec des titres davantage construits qui font alors étalage d’un
groove absolument monstrueux, fortement teinté de
hardcore radicalisé. Ainsi, au registre des fessées d’ampleur gargantuesque, il ne sera pas trop compliqué de faire entrer « Fatal Search », « Sick System » ou encore « Riot » au panthéon du massacre, tant les tapis de blasts sont lessivés jusqu’à la corde par un ping-pong vocal dantesque d’agressivité. Pourtant, au-delà de cette machine à broyer les biscottes, tout le disque se présente comme une machine à hits. Simple constat : alors que cela doit bien faire dix ans que je n’ai pas réécouté
Human 2.0, je le connais encore quasiment par cœur aujourd’hui. De la branlée ultime du riff initial de « Corrosion » aux vocaux ravagés de « Sixteen », du swing imparable de « The Professional League » aux breaks géniaux de « Resistance » en passant par le final incroyable de « The idiot Parade » (il sort d’où ce riff de gros bâtard ?), tout fait clignoter en lettres rouges sur la pochette l’étiquette « disque indispensable ». Bon sang, ce trio…
Anders Jakobson atomise sa batterie sans pitié, s’autorisant en grand prince des séries de
growls inhumains, parfait équilibre avec l’hystérie vocale absolue de
Mieszko dont la capacité du coffre laisse perplexe. Je ne parle même pas de son
riffing de damné, certains vendraient leur âme au diable pour accoucher ne serait-ce que de dix secondes de musique au niveau de ce qu’affiche ici
NASUM. Me concernant, son chant reste l’une des performances les plus intenses que j’ai pu entendre. Et comme dans tout bon trio, il y a un bassiste d’enculé,
Jasper Liveröd qui, sous ses faux airs de gentil garçon, délivre une performance olympique.
Il y a vraiment des gens qui adressent des reproches à cette bête ? Mais c’est quoi exactement qui ne convient pas ? Les tentatives de mélodies (« Words to Die For ») ? Ou alors c’est la présence de ralentissements qui dérange (« Sometimes Dead is Better ») ? Peut-être encore les accroches
hardcore qui, effectivement, font retomber la vitesse moyenne des BPM ? Me concernant, je ne déniche absolument aucune faille dans cette incarnation de l’extrême qui définit la personnalité profonde de
NASUM là où la furie d’
Inhale / Exhale ne faisait que démontrer des envies de prise de pouvoir, évidemment convaincantes mais à la sonorité encore trop générique là où ce travail a définitivement codifié (je pense) le son du
grind suédois : grésillant comme un
crust brûlé au napalm, capable d’écrire des chansons mémorisables (un comble) traversant les époques tout en conservant une démarche anti-commerciale, la présence sur le catalogue
Relapse Records, du moins à cette période, étant un marqueur fort en ce qui concerne l’avant-gardisme en matière de saloperies sonores.
Par conséquent, si je comprends parfaitement que les efforts ultérieurs puissent être vus comme supérieurs à
Human 2.0, peut-être parce que l’on n’y retrouvait pas les quelques « accalmies » qui font les gorges chaudes des puristes, il demeure que cette sortie, loin d’être une excroissance amputable, a clairement influencé la suite de la discographie, à commencer par
Helvete, un disque étrangement riche en mélodies en dépit de son penchant marqué pour la tachycardie. Mais je suis probablement peu objectif tant ce LP m’a permis de repenser mes canons de brutalité, m’ouvrant alors sur un monde dont je ne faisais que soupçonner l’existence.
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