Heathen - Victims Of Deception

“Good Morning Ladies & Gentlemen, c'est votre cap'tain, Mr Tod Deacon, qui vous parle. Welcome on board du vol T555 … If you're 5-5-5, then I'm 6-6-6 … hum, sorry: … du vol T555 de la compagnie TRIVIUM Airlines, à destination de TrendCity. Notre heure d'arrivée sera approx…
- ON NE BOUGE PLUS, ON LA FERME, ON RESPIRE A PEINE : JE VEUX POUVOIR ENTENDRE LES TENIAS BAILLER DANS LES GROS COLONS !! Au cas où t'aurais pas compris Mr Tête de Con …
- Euh, sorry : c'est Deacon, Tod Deacon …
BAFFE !!!!
- … Au cas où t'aurais pas compris – disais-je – pine d'huître, ceci est un détournement d'avion. On met le cap sur la Bay Area, année 1991, pour un atterrissage d'urgence à Heathen City … compris McFly ? (Tout mélange de références culturelles serait ici tout à fait assumé …) Et si y en a un qui moufte, je diffuse du DIAM'S en boucle dans tout l'avion !!
- Oh my God, noooooooo …. »

Bon, arrêtons là ce docu-fiction qui part en vrille (!!) avant d'être soupçonné de sympathie pour le terrorisme aérien … et puis franchement, on en aurait fait quoi de ceux-là ? Un crash sur la mairie de Des Moines, Iowa ?
Plus sérieusement, contrairement à ce que pourrait laisser présager ce début de chronique nimpornawakesque, point de harangue virulente contre les nouveaux groupes de d'jeunes pré pubères à l'horizon :
* d'abord je dois dire que j'aime beaucoup « Ascendancy » de Trivium (euh … n'oubliez pas de refermer la porte en sortant de cette chronique, merci)
* de plus, malgré mon âge avancé (‘fin bon …), j'ai découvert HEATHEN sur le tard, à l'occasion de la mise à disposition par le groupe de l'intégralité de ses 2 premiers albums sur son site officiel.
C'est donc sans l'épais vernis de la nostalgie respectueuse que j'ai abordé cet album, en replaçant l'œuvre dans le contexte de son époque, certes, mais également sans bienveillance exagérée - en dépit de la « pression » induite par les multiples critiques élogieuses lues ça et là.

Heathen pratique donc un thrash dans la plus pure tradition « made in Bay Area », mais en s'inscrivant dans une démarche ambitieuse, portée par une excellence technique sans faille. On retrouve ici tout le catalogue des gimmicks incontournables. Tout d'abord un chant heavy/thrash typique, hargneux bien sûr, mais qui n'oublie pas d'où le thrash vient … et là je fais référence au heavy, hein, pas au punk ! On pense parfois à un Neil Turbin en moins aigu, ou à un Bruce Dickinson reconverti au thrash. Ensuite, on retrouve les cavalcades rythmiques de rigueur, emmenées par des guitares leads brillantes. Les solos sont légions (on en reparle très bientôt) et les riffs livrés en packs de douze. Pour compléter l'imagerie d'Epinal, on a le droit aux habituels lyrics « socialy aware », ainsi qu'à l'instrumental (« Guitarmony ») et à la power ballade (« Prisoners of Fate ») que beaucoup aimaient encore garder au menu de leurs albums à l'époque. Tout y est vous dis-je !

Le gros point fort de l'album, ce qui le hisse au-dessus du vivier thrash de l'époque, ce sont les soli : TOUS les morceaux sont truffés de ces gratouillages de manche, avec l'obligatoire passe d'armes où s'enchaînent 2, 3 - voire plus ! - soli successifs sur fond de grosse rythmique qui bourre à donf'. Lee Altus et Doug Piercy, les deux chirurgiens guitaristes du combo, sont véritablement impressionnants, et les amateurs du genre vont mouiller leur petite culotte de plaisir à l'écoute des 10 démonstrations de virtuosité qu'offre l'album.

Le problème que j'ai néanmoins avec « Victims Of Deception », c'est un manque d'originalité flagrant dans les plans alignés – et ce à de nombreux endroits –, le groupe devant beaucoup (BEAUCOUP !!) à Testament, et surtout à Metallica : sans vous en faire le tour exhaustif (il serait long), on voit comme le nez au milieu de la figure les emprunts sur « Opiate of the Masses », à partir de 0:23, sur « Heathen's Song », à 8:08 - où on retrouve le pattern de « The call of Cthulhu » en acoustique - , sur « Fear of the Unknown » à 0:49 – et là c'est de la repompe éhontée (j'ai pas le courage de rechercher le titre des 4 horsemen … « Orion » peut-être ?) - , sur « Mercy is No Virtue » à 3:04 … J'avoue en plus me faire un peu chier sur certains titres – en dehors des passages où brillent les soli -, quand le groupe pratique le mid-tempo : ainsi « Opiate of the Masses », « Prisoners of Fate », « Heathen's Song » ou même « Morbid Curiosity » - qui est plus virulent mais teeeeeeeeerriblement classique – me perdent bien souvent en route. Peut-être que si les titres avaient été moins longs … ?

Bref, les musiciens sont excellents (encore une fois, je suis à genoux devant les gratteux !!!), quelques morceaux essaient de développer des atmosphères sympas, la prod' est bonne pour l'époque, mais je n'ai pas trouvé les morceaux qui ont un goût de reviens-y (à part l'instrumental peut-être), les mélodies entêtantes, les hymnes ravageurs, … bref, tout ce qui fait un grand album. Au final, un peu comme cela avait déjà été le cas pour moi lors des découvertes tardives de « Eternal nightmare » (Vio-lence), ou dans une moindre mesure de « Game Over » (Nuclear Assault), je ressors un poil déçu de l'écoute de cette galette.
N'empêche, au vu de l'efficacité des plans thrash déployés, et du niveau divin des plans de gratte, je ne peux décemment pas mettre moins d'un 7/10 à cet album. Allez-y maintenant, défenseurs de la cause éternelle du « vrai » thrash : vous pouvez lâcher les chiens !

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