Hegemon - Contemptus Mundi
Chronique
Hegemon Contemptus Mundi
Putain, cinq ans. En cinq ans, le PIB de la Chine a quintuplé, le Pôle Nord a fondu, Georges Bush a mené trois guerres, Carla Bruni a eu vingt nouveaux amants, Marduk a sorti huit albums… bref, il s'en sont passées des choses en un lustre. Mais cinq ans, c'est aussi et surtout le laps de temps qu'il aura fallu à Hegemon pour sortir un successeur à l'excellent By this, I Conquer. Et je peux vous dire que cinq ans à attendre, c'est très, très long.
Hegemon c'est bien sûr ce groupe de quatre inconnus (même si un ou deux noms ont pu filtrer ça et là), qui malgré le fait qu'ils jouent tous dans divers groupes français, ne souhaitent pas se faire connaître pour que l'on se concentre sur la seule chose importante : la musique. Et vu la qualité des sorties du groupe, ils pourraient bien tous jouer dans Pleymo qu'on leur pardonnerait fort volontiers (rassurez-vous toutefois, ce n'est pas le cas), car il est une constante depuis l'an 2000 : chaque album qu'Hegemon fait tue. Si j'ai toujours eu une préférence pour le premier opus Chaos Supreme en grande partie grâce au chef d'œuvre qu'est « The Ring Of Wisdom », je ne peux pas pour autant dire que By This, I Conquer m'ait déçu, il s'inscrivait dans la droite lignée de son prédécesseur en proposant un black metal froid, mélodique et parfois franchement technique, surnageant loin de au dessus du commun des autres groupes de black metal.
Alors, quid de ce Contemptus Mundi, en cinq ans de réflexion, Hegemon s'est-il mis au suicidal black, au bal musette, ou le groupe a-t-il continué sur sa lancée ? Suspens insoutenable.
Et encore une fois, Hegemon ne déçoit pas ses fans. Sans nous pondre une pâle resucée des deux premiers albums, le groupe conserve son style et son identité propre, tout en proposant une légère évolution, et notamment un usage plus fréquent de passages ambiancés avec les arpèges de rigueur. Le début de « Because Of War, because Of Men » et ses guitares en son clair appuyées d'un instrument folklorique (biniou, cornemuse, ou tout autre instrument à vent bizarre peu courant que je ne sais pas identifier, que l'on retrouve à plusieurs reprises tout au long de l'album) m'a même franchement surpris. Bref le renouvellement nécessaire est là pour que Contemptus Mundi soit immédiatement différencié de ses prédécesseurs, sans pour autant dépayser ni a fortiori contrarier les fans de toujours.
On retrouve donc avec bonheur la recette miracle du black metal toujours aussi froid, mélodique, et ambiancé de Hegemon. Les vocaux criés au débit parfois extrêmement soutenu collent toujours aussi bien à aux riffs de guitares qui enchaînent avec talent les passages véloces et plus posés très souvent en arpèges, et l'on peut encore savourer les fantastiques lignes de basse toujours aussi aériennes qui font la marque de fabrique du groupe.
Il est plutôt difficile de rapprocher le style d'Hegemon d'un autre groupe, mais l'on y retrouve le sens de la mélodie d'un Thy Primordial de la grande époque, et un sens de l'épique parfois proche de Cirith Gorgor. Alors que le groupe pratique un black metal au sens le plus commun et noble du terme, car il n'est ni brutal, ni dépressif, ni mélodique, mais admirablement bien proportionné, jamais vous ne vous direz : « tiens, on dirait du Endstille, et ça on dirait du Sacramentum, et ça on dirait du Annie Cordy ». Bref, Hegemon fait du Hegemon, de la première à la dernière note, et l‘on ne peut que savourer cet album sans se poser de questions, car il n'y a aucune ombre à ce tableau idyllique.
« Pff, c'est même pas possible que ce soit si bien que ça, il doit bien y avoir un truc qui cloche, espèce de sale hippie » me direz-vous. Et pourtant de la production ultra limpide et pourtant assurément black metal (comprendre sombre, et propice à développer les ambiances inhérentes au style) au rendu final de chaque morceau, tout est quasi parfait dans ce Contemptus Mundi, à tel point que j'ai bien du mal à définir un « tube absolu » comme ce fût le cas pour « The Ring Of Wisdom » sur Chaos Supreme. Chaque morceau a sa spécificité et son optique propre, sans pour autant qu'il y ait un mid-tempo ou un morceau plus brutal qu'un autre. Il y a peut être un tout petit effet de redondance bien vite oublié par l'extrême qualité des compositions, mais en trois quarts d'heure, la lassitude n'a pas l'occasion de s'installer. Tout au plus peut-on regretter que cet album ne révolutionne pas le genre du black metal, mais ce n'est clairement pas ce que l'on attendait de Hegemon, donc là encore, il ne peut y avoir déception.
Si il y a peut être un défaut absolument mineur dans cet album, dont l'évocation relève plus de la sodomisation de diptères non consentants que de la nécessite due à un défaut qui saute aux oreilles, c'est que parmi un chanteur à la maîtrise vocale magistrale, un bassiste quasi-divin et un guitariste phénoménal, la batterie qui n'est elle qu'excellente fait un peu figure de parent pauvre de l'album. Oh je vous rassure tout de suite, le batteur remplit parfaitement son office et son jeu ne saurait souffrir de critiques, mais il manque ce petit éclair de génie dont les autres membres du groupe (et particulièrement le bassiste) peuvent nous gratifier de temps à autre. Voilà peut être le minuscule défaut de ce magistral Contemptus Mundi
Une fois n'est pas coutume, Hegemon arrive à sortir un petit chef d'œuvre et, si la recette ne change pas, cet album apporte assez de fraîcheur à son style grâce à des ambiances plus développées, et nous livre là son album de plus haute qualité, sans aucun morceau bouche trou. Contemptus Mundi réussit donc haut la main son pari, en s'imposant comme un très grand album de black metal, et ce 9/10 qui peut paraître sévère au vu de la chronique que je viens d'écrire n'est dû qu'à un système de notation étriqué (faut que j'arrête d'attaquer le patron, je vais encore avoir une retenue sur salaire moi) qui fait que je réserve les 9,5/10 à des albums plus surprenants et révolutionnaires, et les 10/10 à des chefs d'œuvre. Mais c'est bel et bien un gros 9/10 que je mets au meilleur album de black metal sorti depuis bien longtemps (personnellement, je dirais depuis euh… By This, I Conquer).
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