Avec un blaze issu du parler Hmong (
ethnie vietnamo-laotienne chez qui Kunamaka voudrait dire « moi manger toi avec du riz » … l'histoire ne dit pas si c'est avec des baguettes ou non), une musique entre autre influencée par les améro-arméniens de
System of a Down et un humour par moment très british (
cf. dans les remerciements: « Always look on the bright side ooooof life … »), rien d'étonnant à ce que ce groupe nous vienne tout droit de … Clermont-Ferrand. Eh oui, voici encore que débarque un de ces groupes francophones improbables qui font de l'excellence et de la singularité le Graal de leur quête musicale. Avec déjà
Unexpect,
Sebkha-Chott,
Pin-Up Went Down,
Ufych Sormeer et
Ilkhah, il ne nous reste plus guère qu'à attendre une reformation de
Carnival in Coal pour pouvoir tenter de mettre sur pied le pendant musical de l'Etrange Festival.
Quelle forme prend donc cette nouvelle offrande sur l'autel du non-conformisme musical? Eh bien, comme c'est souvent le cas – mais en même temps comment réussir à contourner cette référence de l'inétiquetable ? – l'empreinte Pattonienne est bien là, plutôt sous son incarnation soft FNMesque que sous ses atours
Bunglesques les moins fréquentables (
quoique), le Big Orchestra ayant un pied fermement ancré dans l'univers metal rock. Néanmoins, comme cela était évoqué en préambule, l'autre touche caractéristique récurrente de la musique du groupe, c'est une démarche musicale qui emprunte beaucoup aux joyeux arméniens dont les noms font rien qu'à finir en
–ian. Ce rapprochement se fait assez naturellement quand on considère:
1) ces attaques vocales à 2 voix, dont l'une d'elle évolue régulièrement dans des chevrotements nasillards à la limite de la rupture, élément caractéristique du chant de Daron Malakian (
1:36 sur « Monolythic woman », 0:51 sur « Spider's Waltz » …)
2) la dynamique des mélodies alternant le chaud et le froid entre des parties ambiguës douces mais tendues et des pétages de câble en règle
3) des mélodies imparables construites plus sur le feeling et des riffs binaires que sur un raffinement harmonique extrême et une technique débridée
Mais au-delà de ces 2 références évidentes, on sent que le groupe embrasse bien plus. On trouve ainsi du
Opeth acoustique vers 2:47 sur « Megashit In The Woods », et puis une guitare typée U2 qui participe à l'aspect radio friendly de « I'm Fine » - morceau qui commence par ailleurs avec une voix parlée à la Leonard Cohen. On trouve aussi à 0:40 sur « Lord Gomez's Diner » des extravagances vocales qui peuvent rappeler celles du « The Trial » de Pink Floyd. Et puis rappelons encore que le groupe reprend du Elvis Costello en fin d'album.
Au final, de la diversité, mais peu d'outrance dans l'originalité Kunamakienne. Non, même si beaucoup d'éléments divers sont impliqués dans cette grande fresque sonore, c'est autour d'un noyau rock standard, agrémenté il est vrai d'un clavier et d'un violoncelle occasionnel, que tout s'écrit. C'est plus dans la façon – dynamique, mouvante, variée, non-conformiste - dont sont accommodés ces éléments que le groupe se construit sa propre « patte », cet orchestre hors norme ayant un certain talent pour poser en chacun de ses morceaux des ambiances particulières et y insuffler une forte personnalité qui en fait des pièces uniques et distinctes les unes des autres. Il est vrai que de petits emprunts à des univers externes aident aussi à nuancer les couleurs de certaines parties: un passage un peu black vers 1:40 sur « Spider's Waltz », du hip hop sur « Megashit In The Woods », une ambiance disco sur le dansant « Demon Club 666 », des samples en introduction de « Your Highness » puis plus loin des touches fortement funky, de l'électro sporadique vers la fin de « Lord Gomez's Diner ».
En parallèle de l'aspect purement musical, il semble que le groupe accorde une grande importance au rendu visuel du concept – élément qui semble d'ailleurs caractéristique de cette « scène » nawak metal barré. Le fil rouge de cet univers est la mouche, si si, que ce soit à travers les superbes compositions arcimboldo-esques de la pochette de l'album (
d'ailleurs l'ensemble du digipack est superbe), sur le site web du groupe ou lors des prestations scéniques – représentations où Sa Majesté Guy la Mouche volette tel le Mr Loyal de la soirée. Pourtant le groupe ne semble pas diffuser les odeurs caractéristiques attirant ce type de bestiole (
en même temps je n'ai pas essayé Kunamaka en odorama).
Je finirai en répétant lourdement (
oui oui, je m'en rends compte) que cet album propose des morceaux superbes (
mentions spéciales à l'épique et protéiforme « Megashit In The Woods », au lumineux et pattonesquement funky « Your Highness » et au fourmillant « Lord Gomez's Diner »), qu'il est varié mais cohérent, accrocheur et pas prise de tête. TBRKO est un groupe qui réussit à faire le grand écart entre un metal rock potentiellement radiophonique mais non putassier et un côté inclassable et iconoclaste qui lui permettrait de figurer sans trop dénoter sur un catalogue comme celui de Ipecac Recordings ou The End Records.
Et donc au cas où vous n'auriez pas compris, j'adhère complètement à ce que font ces gars.
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