C'est toujours un plaisir de découvrir un nouvel album de Cattle Decapitation. Surtout depuis que le combo de San Diego a trouvé sa marque de fabrique et est entré dans la cour des grands. C'était en 2006 avec
Karma.Bloody.Karma. D'un goregrind sans intérêt puis d'un brutal death correct mais pas transcendant, la formation était enfin passée au stade supérieur sur cet opus personnel et ambitieux.
The Harvest Floor confirmait trois ans plus tard que Cattle Decapitation, c'était du sérieux désormais. Deux très bons albums de suite dans l'escarcelle, le groupe avait donc la pression pour cette nouvelle tranche de barbaque étiquetée
Monolith Of Inhumanity et livrée début mai sur Metal Blade, label qui croit dans les végétariens pro-animaux depuis leur premier full-length
To Serve Man en 2002 quand personne ou presque ne les connaissait. Alors, jamais deux sans trois?
Bah si, des fois. Comme je le dis souvent, tous les groupes finissent un jour par décevoir. C'est au tour de Cattle Decapitation qui après deux tueries marque le pas sur ce
Monolith Of Inhumanity pas déplaisant mais clairement inférieur. On remarque déjà que les Américains et leur nouveau bassiste Derek Engemann (Unmerciful, Covenance) ont renoué avec les pochettes moches alors qu'ils avaient fait un effort pour
The Harvest Floor. Bien sûr, les causes de ma déception sont tout autres. Je m'y attendais après la mise en ligne du premier extrait sur la Toile, le son de batterie s'avère disgracieux, surtout la caisse claire. C'est ce qui m'a marqué en premier et m'a fait grincer des dents plus d'une fois. Notez que je me plains uniquement du son tout sauf naturel, pas de la performance du batteur. Blast-beats, gravity-blasts foudroyants ("The Carbon Stampede" à 2'05, "A Living, Breathing Piece Of Defecating Meat" à 0'35, "Do Not Resuscitate" à 0'17), rafales de double-pédale dévastatrices ("Dead Set On Suicide"), séquences plus groovies, passages plus techniques (le break limite jazzy de "Do Not Resuscitate" vers 2'50), le jeu de David McGraw est irréprochable si on omet ces "semi-blasts" exaspérants, notamment à cause du son de la caisse claire. Un très bon batteur rapide, endurant et diversifié qui soutient parfaitement les compositions de Cattle Decapitation. Et ce n'est pas une mince affaire vu le joyeux bordel auquel nous invite une nouvelle fois le combo. On le sait, les Américains aiment bien le chaos. Ça part donc dans tous les sens à un rythme effréné en enchaînant les passages aux influences diverses et variées comme le brutal death, le death moderne, le slam death, le grind ou encore le black. Mais tout cela reste parfaitement maîtrisé. Le groupe a acquis beaucoup d'expérience ces dernières années et ça se ressent, le groupe gérant tout aussi bien la technicité (ça maîtrise grave!), la brutalité (ça bourre!), la mélodie (sweeps et solos au programme) et le groove (rapide, pas plan-plan) pour nous offrir onze titres bien distincts qui ont chacun leur âme. Qu'on se le dise, pas un groupe ne sonne comme Cattle Decapitation. Et ça, c'est cool. Le problème, c'est que
Monolith Of Inhumanity n'est pas toujours très inspiré. L'excellent côtoie ainsi souvent le banal. La faute notamment à une modernisation de la musique encore plus prononcée qu'avant. Des riffs modernes et saccadés comme ceux de "A Living, Breathing Piece Of Defecating Meat" à 1'58, "Gristle Licker" à partir de 0'34 ou "Projectile Ovulation" à 1'53, je n'en veux pas. Le groupe vaut bien mieux que ça!
Niveau riffs, c'est en fait un peu tout ou rien, un problème récurrent sur ce nouvel opus. Heureusement, tout un tas de riffs viennent rappeler que Cattle Decapitation n'a pas complètement perdu sa verve. Certains accélérations en particulier, blastées ou non, avec un riffing souvent sombre, se révèlent jouissives à mort comme sur "The Carbon Stampede" à 2'52, "Forced Gender Reassignment" à 2'40, "Projectile Ovulation" à 2'12, "Lifestalker" à 0'59, "Do Not Resuscitate" à 1'22 ou encore "Your Disposal" à 1'44. Et la liste pourrait être plus longue. Comme quoi tout n'est pas mauvais sur ce
Monolith Of Inhumanity, juste que la qualité globale a baissé. On notera d'ailleurs un gros déséquilibre entre une première partie d'album moyenne qui fait régulièrement le yoyo et une seconde beaucoup plus convaincante. Il y a bien quelques bons titres au début comme "The Carbon Stampede" sur lequel tous les musiciens de Cephalic Carnage (ainsi que des ex-membres) sont invités pour les chœurs, "Dead Set On Suicide" ou l'excellent "Forced Gender Reassignment", l'une des meilleurs pistes, mais sinon, des morceaux comme "Gristle Licker", trop mou, et surtout "Projectile Ovulation" avec un featuring tout naze de Mike Majewski de Devourment, ne sont pas au niveau. C'est vraiment à partir de "Lifestalker" que Cattle Decapitation trouve sa vitesse de croisière avec un enchaînement de tueries qui relève la note. On a même droit avec "The Monolith" à un quasi instrumental très ambient (John Wiese à la baguette comme sur
The Harvest Floor) à l'atmosphère dark et torturée qui me fait penser à du Shining. Et d'ailleurs, pour continuer dans les bonnes nouvelles, Cattle Decapitation a insufflé des influences black metal à ses compositions comme il l'avait fait sur
Karma.Bloody.Karma qui reste mon album préféré du quatuor. Des influences que le groupe distille intelligemment comme sur les riffs de "Forced Gender Reassignment" à 1'35, "Projectile Ovulation" à partir de 0'24 (comme quoi même la piste la plus faible de l'album a des bons côtés!), "Lifestalker" à 1'08, "Your Disposal" à 0'53 et 2'21 et "Kingdom Of Tyrants" à 0'25 et 3'50. Dans le même ordre d'idée, Travis Ryan utilise davantage sa voix "black", que je qualifierais plutôt de "reptilienne". Encore mieux, il nous sort avec cette même voix du chant clair aussi particulier que charmant sur des passages parmi les plus intéressants de l'album: le refrain de "A Living, Breathing Piece Of Defecating Meat", "Forced Gender Reassignment" à 2'09, le break calme et mélodique génial à 1'32 de "Lifestalker", le refrain blasté énorme de "Your Disposal" et "Kingdom Of Tyrants" à partir de 1'22 sur un très bon riff lourd et lancinant. Le frontman délivre sans doute sur
Monolith Of Inhumanity sa meilleure prestation grâce à un registre original et tellement varié qu'on n'est pas loin d'un cas psychiatrique de personnalités multiples. Non seulement ses shrieks tuent mais son growl le plus guttural impressionne, à la manière d'un Angel Ochoa et ses raclements de gorge glaireux au possible. Bon appétit! Ryan utilise régulièrement ces gutturals sur les passages slammisants, de plus en plus nombreux dans la musique de Cattle Decapitation. Mais à la différence de la plupart de groupes de slam death pur et dur, ceux-ci restent utilisés avec parcimonie pour un maximum d'effet.
Du bon et du moins bon, voilà qui résume bien ce nouvel album de Cattle Decapitation.
Monolith Of Inhumanity reste un disque très correct dans l'ensemble mais sa qualité en dents de scie déçoit après les deux tueries
Karma.Bloody.Karma et
The Harvest Floor. Trop moderne par moment, moins inspiré que d'habitude et affublé d'un son de batterie atroce, j'attendais mieux d'un groupe pour lequel j'ai toujours eu beaucoup de sympathie. Reste heureusement un album plus intéressant que la moyenne de la part d'un combo au caractère et à la personnalité bien trempés. Les influences black metal pimentent en plus des compositions chaotiques aux rebondissements incessants qui atteignent leur apogée lors d'une deuxième partie bien plus convaincante que la première. On se consolera aussi sur le fait qu'en live, Cattle Decapitation reste une tuerie absolue!
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