Candlelight a eu du flair en prenant le relai de Relapse. En effet, il n'aura fallu que deux albums à nos Américains pour se forger un nom au sein de la scène doom/death majoritairement fréquentée par les scandinaves, un nom qui sert aujourd'hui de référence. Sorti seulement deux ans après l'excellent
"Dismantling Devotion", "Lost To The Living" a changé la donne en ce qui me concerne. Moins abouti, moins passionnant, ce dernier a amorcé un changement majeur de direction musicale laissant de côté la beauté et la grandeur d'antan pour un style plus noir, plus rugueux, plus hétérogène. Pour son quatrième album, Daylight Dies a cette fois-ci pris le temps qu'il lui fallait, respectant leur cycle de production de 4 ans, une sortie sur laquelle je projetais beaucoup d'espoirs et de doutes... pour un résultat encore en demi-teinte.
Si
"Dismantling Devotion" balançait à la face du monde tout le mal-être enfouit dans ses mélodies à travers des hymnes doom/death imparables,
"Lost To The Living" marquait une véritable évolution vers un style plus froid et hermétique, comme si le groupe s'était refermé sur lui-même pour mieux savourer son malheur. Et de ce bloc de noirceur si parfaitement muré, seul un sentiment de profond désespoir filtrait, frustrant nos émotions autrefois si malmenées. Ceux qui espéraient un retour en arrière devront se faire une raison car "A Frail Becoming" continue sur la lancée de son grand frère, sculptant avec une ardeur maladive les contours d'un coeur desséché par la vie. Vous n'y trouverez aucune once de lumière, d'espoir ou d'un quelconque sentiment positif. A l'instar de
"Lost To The Living", l'atmosphère qui s'en dégage est la véritable force de cet opus, d'une incroyable dureté et d'une rare exigence pour le genre. Ceci dit, rien d'étonnant à ce constat : Daylight Dies fait partie de ces quelques formations qui n'ont rien lâché sur la forme et qui s'astreignent à un régime drastique, sans aucun écart. Pas d'instrument exotique ni de claviers pour atténuer la souffrance, un chant clair utilisé avec parcimonie malgré la beauté de la voix d'Egan O'Rourke, ici tout se joue sur le sempiternel trio guitare / basse / batterie, orchestré par les hurlements charismatiques d'un Nathan Ellis impressionnant de justesse. Le style reste également reconnaissable entre mille, alliance d'arpèges de guitares, d'écrasantes rythmiques hachées, de mélodies lancinantes et dissonantes, de changements de tonalités.
Comparé au précédent album, les Américains ont toutefois mis un peu d'eau dans leur vin. Bien que les compositions contenant du chant clair restent nettement plus calmes que les autres ("Sunset", "A Final Vestige" et "Ghosting"), elles ne sont pas aussi marquées et prévisibles qu'elles ne l'étaient sur
"Lost To The Living". La remarque vaut également pour les autres morceaux, globalement plus variés et qui intègrent notamment plus de passages atmosphériques. Un mieux assurément même si l'on reste très loin de l'homogénéité de
"Dismantling Devotion", à se demander si le groupe sait encore ce qu'il veut faire de certaines facettes de son identité. On observe également un retour à des mélodies plus évidentes et à un véritable hold-up des guitaristes Barre Gambling et Charlie Shackelford sur le temps d'expression. Jamais un album de doom/death n'a compté autant de leads et de solos, et personne ne s'en plaindra vu leur qualité. La plupart du temps, ils apportent d'ailleurs le quotat de temps forts qui fait défaut à certains titres. Mais en ce qui me concerne, c'est surtout la fin que j'ai retenu de ces 50 minutes, où l'enchainement "Hold on to Nothing", "Water's Edge" et "An Heir to Emptiness" vous entraine inexorablement vers le fond, une conclusion quasi-parfaite dont la lourdeur et les airs tirent sur le funeral doom d'un Shape Of Despair.
Malgré ses qualités, "A Frail Becoming" manque pour moi de l'étincelle qui faisait la différence auparavant. Malheureusement, si rien n'est à jeter, rien ne sort non plus de l'ordinaire. L'expérience qu'offre ce quatrième album est prenante, intéressante, mais je l'aurais espéré plus marquante ou traumatisante. Et bien qu'il me soit difficile de lui trouver de réel défaut, je suis resté sur ma faim car l'impression d'ensemble ne grave en fin de compte que peu de chose dans votre esprit. Dommage.
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