Cryptopsy - Cryptopsy

Rappelez-vous, en 2008. Cryptopsy sortait The Unspoken King. Tremblement de terre dans le landernau death metal. Un de ses plus estimés représentants venait de gâcher quinze ans de bons et loyaux services par un album de deathcore opportuniste et sans saveur. Ennuyé d'être d'accord avec tout le monde, je m'étais toutefois fait l'avocat du diable en lui évitant la peine capitale, lui accordant même un tolérant 5/10. Depuis, beaucoup de choses ont changé. Outre Morbid Angel et son Illud Divinum Insanus qui ont fait passer The Unspoken King pour un chef-d'œuvre, la claviériste Maggie Durand n'a pas fait long feu, le bassiste Éric Langlois a été remplacé par Olivier Pinard (Vengeful, Neuraxis) et surtout, Jon Levasseur a fait son grand retour en lieu et place d'Alex Auburn. Autre surprise, les Québécois ont lâché leur label de longue date Century Media pour se lancer dans l'auto-production. De quoi espérer un retour aux vraies valeurs sur ce nouvel album éponyme?

Les espoirs étaient légitimes mais il n'en est rien, ou si peu. Effectivement, Cryptopsy revient ici à une musique plus brutale et plus technique, bref plus brutal death technique et chaotique comme par le passé. Flo Mounier est déchaîné derrière les fûts, enchaînant blast-beats, gravity blasts, rafales de double et rythmiques thrashies. Matt McGachy a lui abandonné le chant clair et se limite désormais à du growl bien gras et quelques hurlements arrachés. Quant à la paire de gratteux, on sent là-aussi une envie de se montrer plus incisif.

Ne vous-y trompez pas toutefois, il s'agit en fait d'un faux retour aux sources. Car Cryptopsy pue encore le core à plein nez, avec toujours des touches Despised Icon et deux-trois passages qui n'auraient pas dépareillé sur un album de War From A Harlots Mouth. Il y a juste ajouté un peu de folie à l'ancienne. On se retrouve ainsi avec des compositions, aux titres des plus farfelus, qui sonnent comme des empilements sans cohérence de riffs pour la plupart inintéressants. Les Canadiens étaient passés maîtres dans le chaos contrôlé, ils ne contrôlent désormais plus grande chose. Ici, ça vient de partout mais ça ne va nulle part. Aucune ambiance, la musique de Cryptopsy ne dégage rien. Il faut dire que la production ultra plastifiée sonne complètement artificielle, en particulier la batterie, ce qui n'aide pas à faire ressentir quoi que ce soit si ce n'est un profond ennui. On aurait aussi pu croire que l'absence de chant clair et la "gutturalisation" du chant de McGachy aurait apporté plus de couilles au disque, ils la rendent juste plus monotone. Sorte de sous-Sven d'Aborted, le frontman porte ici bien son nom. Quant aux deux-trois breaks jazzy plus aventureux comme sur "Red-Skinned Scapegoat" à 4'37, sympathiques dans l'absolu, ils sont mal intégrés aux morceaux et contribuent à l'impression de structures à l'emporte-pièces. Même la pochette est moche!

Décidément, le groupe rate presque tout. Presque, parce que malgré une liste de défauts longue comme mon bras, il y a toujours dans chaque titre un ou plusieurs riffs/passages/mélodies réussis qui font mieux passer la pilule en nous rappelant brièvement que Cryptopsy était un bon groupe: le riff death mélodique de "Two-Pound Torch" à partir de 1'25, les tremolos épileptiques de "Shag Harbour's Visitors" à 2'36 et au début de "Cleansing The Hosts", les sympathiques solos sur "Red-Skinned Scapegoat" et "Damned Draft Dodgers" ou encore le riff blasté à 3'15 de "Ominous". Des séquences salvatrices qui, si elles ne permettent pas de faire de Cryptopsy un bon album (loin s'en faut!), lui évitent au moins la purge totale. J'arrive même à trouver deux morceaux à peu près corrects: "Red-Skinned Scapegoat" (si on oublie la mosh part saccadée douteuse) et surtout le dernier titre "Cleansing The Hosts", le plus proche du old-Cryptopsy et meilleur morceau de l'opus haut la main. Ce qui a le mérite de terminer l'album sur une note positive.

Au bout du compte néanmoins, je me demande si je ne préfère pas The Unspoken King ou si du moins, je ne le déteste pas moins. Cryptopsy avait pris une nouvelle direction que je n'appréciais tout simplement pas. Ce nouvel album ressemble lui à une tentative ratée de faire revenir les anciens fans tout en conservant les nouveaux. Ce qui me paraît encore pire. Le retour de Jon Levasseur n'aura ainsi servi à rien. Sorte de mélange entre du mauvais Aborted, du Despised Icon pas inspiré et quelques traces du old-Cryptopsy, cet album chiant, brouillon et insipide ne mérite pas qu'on s'intéresse à lui. Gardez votre argent, il y a bien mieux en death metal cette année!

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