Merde, encore une galette de Trap Them. Vous savez, le cuisinier parmi tant d’autres passés dans l’émission MasterCursed, qui fait son beurre sur une recette culinaire mêlant une pincée de crust et un zeste de grind, le tout recouvert d’une pâte hardcore à la saveur bien bourrative signée le chef de brigade Ballou. Forcément, dit comme ça le rendu final tout chaud sorti du four paraît assez indigeste, après en avoir déjà ingurgité une bonne plâtrée de ce type. Mais cette fois, la bande originaire de Salem – non, pas celui des sorcières – nous force à garder de la place pour le dessert. Si Early Graves nous avait plutôt mis un grand coup de pelle à tarte – et à tartes – en travers du museau avec
Goner un an plus tôt, Trap Them a compris qu’il était peut-être temps de lâcher la course à celui qui propose le plat le plus épicé, vu que le gagnant a déjà été cité dans cette phrase même, et qu’on a encore le cul en feu en repensant à cette monumentale calotte. A la place, ces petits malins se sont dit que s’ils n’étaient probablement pas de taille à lutter dans la bagarre pour le plat de résistance, il y avait peut-être un créneau à prendre rayon sucreries et pâtisseries. Et boom, voilà que la pop dégouline sur leur musique habituellement peu ragoutante.
Darker Handcraft est bourré de riffs saccadés et alambiqués qui donnent envie de gesticuler comme un demeuré, on en a la preuve dès le premier morceau « Damage Prose » emmené par un batteur à quatre bas qui n’a rien à envier à monsieur Colère. On trépigne, les jambes ne tiennent plus en place et l’appel du dancefloor se fait irrésistible. « Every Walk A Quarantine » enchaîne passages chaloupés digne de la période récente de Converge, et parties lourdes de routier venant du plus rock’n’roll des albums d’Entombed. C’est le bazar : parce que Trap Them n’a peur de rien, il prend donc tous les ingrédients qui lui passent sous la main pour réaliser sa tambouille, avec un air de je-m’en-foutisme complètement punk. On ne sait plus sur quel pied danser, mais impossible de s’arrêter en route tellement le côté tubesque du disque est imparable. Tout s’enchaîne de façon désordonnée, le bourrage grind de « Saintpeelers » qui arrache la tronche au blast laisse place à « Manic In The Grips » et son two-step sportif d'une minute.
Ne vous inquiétez tout de même pas trop de la tournure des événements, ce n’est pas parce que Trap Them distribue des sucettes qu’il a rendu son tablier de boucher pour autant. Amateurs de gros riffs gras et grassouillet qui brisent la nuque, vous trouverez au menu les trente dernières secondes de « Sovereign Through The Pines », ou bien l'efficace « Evictionaries », durant lequel l’influence suédoise se fait plus marquée que jamais. On peut dire que ces gars-là savent tirer droit et parler franchement, si je puis dire. Dans un registre plus soutenu rythmiquement, je vous laisserai écouter « Slumcult & Gather », sa cavalcade amenant une montée finale intenable qui vous fera courir en rond les bras en l’air. Le chant de Ryan McKenney pas original pour un sous dans ce style, participe pourtant à l’enthousiasme général car il sait y faire pour ajouter la touche pop’n’roll qui colle au disque, là où il avait tendance à dégueuler plus simplement ce qu’il pouvait sur leurs précédentes sorties.
Ce qui place
Darker Handcraft bien au-dessus des autres Trap Them et de bon nombre d’albums de wannabe-Cursedcore, c’est deux enchaînements absolument dévastateurs qui démontrent toute la palette d’influences dont se sont servis les piégeurs en chef pour ce sale coup. Le premier commence par « Sordid Earning » qui nous offre une facette lente et « mélodique » qu’on n’avait rarement l’habitude de voir chez ces désosseurs-là. Mais bon, n’allez pas vous faire des idées, Trap Them ça bourre et voilà le meilleur titre de leur discographie « The Facts » pour en attester. La synthèse parfaite de ce qu’ils ont accompli sur cet album : une intro pour dévoiler son talent de danseur dans le pit, des couplets qui en foutent partout et surtout, un refrain au tempo enlevé qui transforme le morceau en véritable tube hit-parade et qui marque dès la première écoute. Ecoutez McKenney hurler à la mort ces « I am that goddamn son of a bitch, in the dead of the night / I want the cancer, I want the famine, I want the flood, I want the plague ».
L’autre enchaînement en question est-celui des deux dernières pistes. On débute par une complainte qui nous ferait presque verser une petite larme sucrée, si ces salauds ne nous plantaient pas de grosses tronçonneuses dans le dos l’air de rien à la fin. De la fin il n’est pas vraiment question, par contre de tronçonneuses ça l’est toujours, puisque l’ultime « Scars Align » est le plus grand hommage à Entombed que Trap Them puisse faire. S’il vous reste des cervicales, ce tube mid-tempo se chargera de vous en débarrasser. Encore une fois, j’insiste sur le refrain – c'est définitivement un truc pop, les refrains, non ? – et son riff de bûcheron scandinave dopé à la Boss HM-2. A croire que le groupe n’est jamais aussi bon que quand il abandonne le style épileptique pour jouer lourd, lent, et gras.
Je me rends compte que j’ai pratiquement cité tous les titres de cette fameuse galette, c’est parce que le bac à bonbons de Trap Them est tellement varié qu’on a envie de tous les goûter. Chacun d’eux à son petit quelque chose, sa petite saveur qui rend le tout si délicieux. Je ne peux que conseiller cet album aux amateurs de suédoiseries pour voir ce que donnerait leur style préféré remixé façon top50 par des gamins un peu trop irrespectueux de leurs aînés. Je ne peux que le conseiller aux déçus du groupe, restés sur leur faim avec les albums précédents qui manquaient de personnalité ; cette fois vous aurez à boire et à manger, à condition que vous ne craigniez pas le sucre et les caries. Je ne peux que le conseiller enfin à tous ceux pour qui « pop » n’est pas un gros mot ; ceux qui voudraient se faire fendre la poire le temps d’une demi-heure sur un son tout en souplesse et décontraction derrière sa production pourtant bien léchée et professionnelle à souhait.
Goner est un monument du furie, et bien celui-là est un monument de fun, les deux s'opposent et illustrent pour moi le summum de directions opposées qui s'offrent à la branche hardcore/crust. Décidément, les Trap Them sont des salopiots qui portent bien leur nom : l’album s’appelle
Darker Handcraft alors qu’ils n’ont jamais autant donné dans le swing… Plus aucun respect, moi je vous le dis.
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