Infestus - The Reflecting Void
Chronique
Infestus The Reflecting Void
The Reflecting Void est le quatrième album d’INFESTUS, mais le deuxième seulement à être chroniqué dans ces pages. La première chro date de 2008, et elle était signée par un certain Xenocidist. Les anciens de Thrashocore s’en souviennent peut-être, moi je viens de le découvrir. Il avait été élogieux à propos du deuxième opus de l’Allemand, Chroniken des Abledens dont il disait : « Le Black Metal sous sa forme la plus pure, tel qu'il aurait dû rester (…). S’il était sorti dix ou quinze ans plus tôt, il serait aujourd'hui considéré comme un classique. ». Difficile de faire plus flatteur, vous en conviendrez ! Et pourtant je ne suis pas totalement d’accord.
Sur la qualité, j’approuve mon ancien confrère, mais il me semble évident que cet album était déjà de son temps. Sur une base black des débuts, il reprenait des éléments modernes, certes légers, mais bel et bien présents. On reniflait une odeur des années 2000 à travers l’utilisation légère et en retrait des claviers, à travers les cris plaintifs qui apparaissaient ici ou là et surtout à travers une construction de morceaux plus alambiquée que chez les pionniers du genre. En fait, derrière la grosse couche de black direct, il y avait énormément d’apports vicieux plus actuels et surtout bien mis en valeur par une production chaude à souhait.
Et ces petites manies se sont faites plus importantes par la suite. Le troisième album qui sortait encore chez Debemur Morti en 2011 enfonçait profondément le clou. Son black inspiré par la haine était encore plus magnifié par ces petits ajouts discrets mais décisifs, qui rendaient le groupe plus intéressant que la plupart de ses confrères.
3 ans ont encore passé, et l’évolution suit son cours. Le nouvel album est une suite évidente. On y retrouve 8 morceaux d’excellente facture, maîtrisés de bout en bout et sachant toujours allier force et finesse. INFESTUS est ingénieux et trouve à chaque fois le petit élément qui rend un titre réussi. Il peut se présenter comme un petit frère de SHINING, faisant tout autant appel aux changements de rythme, aux guitares acoustiques et aux trémolos jouissifs. La ressemblance est évidente, au point qu’elle pourra en agacer certains. L’influence se fait encore plus forte sur « Constant Soul Corrosion », titre sur lequel on se frotte les oreilles tant les vocaux et riffs semblent émaner de Niklas Kvarforth. Même les cris pleurnicheurs et petites voix susurrées sont des copies conformes.
Et sur tous les autres titres, on trouve des ressemblances avec les Suédois. Le black y porte les mêmes croix, le même jeu flirtant avec le dépressif, mais refusant de s'y complaire. Il s’emporte et s’effondre, essaie de se relever péniblement pour donner un dernier coup mais se retrouve à cours de force. Il ne s'abandonne pas à la défaite, il veut vivre, il veut poursuivre, il n'est pas sur le point de mettre fin à ses jours lui-même. Et c'est ce qui fait qu'il semble à la fois terrifié et terrifiant. Dans le style, « Devouring Darkness » est un excellent exemple, il nous trimballe d'un sentiment à l'autre avec efficacité. C'est l'un des meilleurs titres de l'album, et ce malgré un long final instrumental, ennuyeux chez tant de groupes, indispensable ici car lui aussi chargé en émotions.
Et parfois c’est à un autre groupe phare des années 2000 qu’il fait des emprunts, BLUT AUS NORD ! L’intermède « Fractal Rise of the Fall » et les structures de « Inner Reflexion » sont des hommages évidents aux sons malsains des Français ! L’homme derrière INFESTUS sait vraiment faire les bons choix. C’est un maître compositeur très malin et son talent est évident. On a du mal à imaginer qu’Andras est réellement seul car même s’il n’est pas un technicien hors pair, il a suffisamment de compétences pour s’occuper de chaque instrument de manière crédible. On se laisse même berner par la batterie, qui est normalement le point faible dans ce genre de groupe à membre unique. On retrouve bien le professionalisme des Germaniques, leurs côtés carré et rigoureux.
The Reflecting Void a une dernière qualité, celle de pouvoir plaire aussi bien à la première écoute qu’à la quinzième. Les mélodies font mouche tout de suite et l’on découvre peu à peu des détails attachants. Plus on écoute cet album, plus on l’apprécie et plus on a envie d’y revenir. Il est vicieux et force le respect. Il ne manque pas grand chose pour avoir une meilleure note, peut-être que les ressemblances avec les groupes cités sont trop fortes pour qu’on puisse vraiment dire tenir un album de l’année...
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