The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble - From The Stairwell
Chronique
The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble From The Stairwell
Jazz et Metal sont souvent associés. Et souvent à tort. Hormis dans quelques cas (le bienheureux et libre Shining norvégien ou encore le premier opus de The Phantom Carriage), quand on lit le mot « Jazz » quelque part à propos d'un disque de Metal, on en revient souvent à l'écoute à une sorte d'ambiance façon ascenseur. Que ce soit chez Lantlôs (le soit-disant jazzy « .neon ») ou chez d'autres groupes plus mainstream (même Nightwish se réclame de passages jazzy...), on est très souvent déçus du résultat qui ressemble bien plus à une bande-son de sitcom télévisuelle qu'à une véritable patte Jazz.
Mais, The Killimanjaro Darkjazz Ensemble n'est pas de ceux-là, non monsieur. Débutant comme un trio formé pour modeler des Bandes Originales de films muets (« Metropolis » et « Nosferatu » en tête...), ils finissent par évoluer en un collectif changeant de line-up très fréquemment. Signée chez les excellent teutons de Denovali Records (connus pour Celeste, bien évidemment...), la formation néerlandaise persiste et signe dans un univers Doomy, Ambient, Post-Rock et vraiment Jazz. Croyez-moi, on a rarement connu plus plombant. Dès le troisième titre « White Eyes », l'envie d'aller pécho une corde pour en finir dans le couloir se fait sentir. Si « Blackjazz » de Shining reprenait le côté agressif et violent du free-jazz pour l'incorporer à un Metal rapide et dissonant, « From The Stairwell » fait son tri pour ne reprendre que ce qu'il y a de plus triste dans les styles qu'il mélange.
Des boîtes à rythmes lentes ou un batteur sous morphine ? Les deux, mon capitaine... Et avec ça, on se doute que ça ne va pas donner envie de sauter partout dans son salon. On note aussi des guitares claires, parfois jouées en « reverse », parfois livrant des arpèges déprimés. En y ajoutant une basse profonde, lourde et étouffée on se retrouve déjà avec un cocktail de base très « Dimanche après-midi sous la pluie »... Mais ce n'est pas tout. Dès lors qu'arrivent ces voix féminines presque déshumanisées, ses synthétiseurs tournant en boucle, ses coups de distorsions Doom et ses saxophones qui tournent en boucle, on finit par ne plus avoir envie de croire en l'humanité. Et ce ne sont pas les quelques étincelles de beauté (« Celladoor ») qui vont sauver notre âme de ce naufrage annoncé dans les abysses.
The Kilimanjaro Darkjazz Orchestra fout la pression, à tel point que face à tant de tristesse, on se sent vite tout petit. Vraiment, je vous jure... Il y a de quoi faire passer le DSBM pour des rigolos. Même le sublime touche du doigt le moche, les recoins du plombé humain. On y retrouve souvent d'ailleurs des similitudes avec les ambiances des derniers disques du géant norvégien Ulver. La différence ce que ce post-jazz-ambient et plus bas que terre enfonce plus qu'il ne regarde. Comme un Silver Mont Zion couvert de suie, « From The Stairwell » déroule une suite de paysages ravagés et usés, gris et décapés... « Over and over again » comme dirait ce sbire parlant dans la chanson « Cotard Desilusion », avant de finir enfoui sous les violoncelles. Alors évidemment, on peut toujours essayer de se raccrocher à quelque chose mais ce n'est pas évident même si on retrouve quelques accointances dans les sons électroniques qui rappellent de temps à autres un Son Lux ou une instrumentale du premier Zola Jesus. Même si quelques longueurs rendent le disque parfois un peu lourd, les passages moins efficaces sont d'office compensés par d'immenses envolées post-apocalyptiques.
Nous ne sommes pas ici en présence d'un truc facile, écoutable sur le pouce entre deux stations de tramway. Non, ce disque redoutable demande définitivement une grand application pour en saisir toutes les subtilités mais il finira par atteindre son but sans même que vous vous en rendiez compte. « From The Stairwell » sent la boîte en sapin, les valises sous les yeux et les nuits que l'on était à se morfondre, dans quelque pub anglais du cœur de Londres. The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble donne ses menstruations à l'auditeur qui se retrouve à pleurnicher pour rien. Feutré, sobre et lointain à la manière d'un « Tutu » passé à la moulinette occulte puis plombé à grands coups d'urbanisme et d'une modernité définitivement bien terne. Le Kilimanjaro n'est plus ici une dominante blanche surplombant une nature sauvage. Il est une masse grise écrasant un Serengeti en flammes.
Le jazz en reconstruction 28 semaines plus tard.
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