Intégrité. Beaucoup aiment utiliser ce mot bien pratique, toujours dans un sens positif, pour parler d’un groupe qui n’est pas vraiment original mais qui parvient à reproduire un style avec efficacité. Et on le retrouve aussi employé pour louer les albums qui se suivent tout en gardant le même style ou la même qualité.
KRIEG est un groupe intègre. Malgré les années qui passent et ses 20 ans d’existence il ne s’est jamais trahi, il a toujours les mêmes braises dans son feu, principalement porté par un seul homme, N. Jameson alias Lord Imperial. Cette figure du black américain en a traumatisé plus d’un, connu pour son travail dans
WELTMACHT,
THE ROYAL ARCH BLASPHEME,
TWILIGHT,
NACHTMYSTIUM et j’en passe. Il contrôle tout dans
KRIEG, et change juste de temps à autres d’entourage. Cette fois-ci encore, il y a eu du ménage et les 4 autres membres sont tous nouveaux, mais comme d’habitude aucun n’est débutant, ayant au moins joué pour trois formations différentes jusqu’à maintenant. Les changements de lineup sont bien plus difficiles à suivre que l’évolution de la musique du groupe. Car la discographie a beau être particulièrement fournie avec une ribambelle de splits, d’EP, et bien sûr les albums, au nombre de 7 désormais, on peut écouter le premier et le dernier album et comprendre que ce sont les mêmes mains qui sont derrière eux. Malgré quelques ajouts, l’esprit profondément black démoniaque a toujours perduré.
Les débuts étaient effectivement plus bornés, avec un
KRIEG extrêmement cru et dévastateur jusqu’en 2003 comme en témoignent les
The Church,
Destruction Ritual ou encore
Kill yourself or Someone you Love. Un exemple :
« To Wander the Stars »,
Destruction Ritual (2002)
Puis c’est avec
The Black House, sorti en 2004, qu’Imperial a compris que les mélodies pouvaient apporter un plus à sa musique. Pas des mélodies dans le sens symphoniques ou nostalgiques qui ramollissent les ambiances, mais des riffs accompagnant idéalement l’apocalypse. Ces riffs sont comme le sourire narquois de Satan, celui qu’il doit afficher quand il enfonce sa fourche dans les tripes des vierges tout en honorant leur anus étroit (C’est beau ça, hein !). Ainsi le charme d’un « Fallen Princess of Sightless Visions... » est toujours intact 10 ans après. Superbe changement de rythme et apparition de vocaux torturés sur la troisième minute.
« Fallen Princess of Sightless Visions... »,
The Black House (2004)
Mais là où l’Américain a été fort, c’est qu’il n’a jamais abusé de cette formule à la
JUDAS ISCARIOT. Il a constamment intégré des morceaux très durs sans aucune concession. Il a toujours continué à ajouter des accents plus punk. Et si la dose de riffs entrainants a été plutôt grandissante jusqu’à
Blue Miasma en 2006, un album sublime, il a opéré un retour en arrière par la suite, sur
The Isolationist. Mais chaque album a eu ses perles et mérite d’être dans une collection. Pour le plaisir, des exemples de titres où les mélodies sont immanquables :
« An Empty Room, a Forgotten Funeral »,
Blue Miasma (2006)
« ... And the Stars Fell On »,
The Isolasionist (2010)
Le nouvel album,
Transient, arrive après 4 ans de fausse absence, ponctuée par plusieurs EP et splits. Et
KRIEG a encore une fois trouvé les arguments pour me rendre fou. Il prouve encore qu’il peut mettre le feu aux poudres en lançant une musique apparemment dénuée de sentiments et intégrer l’élément qui tue. Beaucoup de parties sont ainsi très radicale d’apparence mais contiennent un élément salvateur. Il y a des sons intrigants rajoutés en fond sur « Circling the Drain ». Il y a un final excellent sur un « Return Fire » qui commence cependant dans une impression de chaos total. Il y a un tempo plus lent, plus vicieux et rampant sur « To speak with Ghosts »... Et pourtant on retient surtout des six premiers titres le côté rentre dedans.
KRIEG ne rigole pas encore, le suscité rire démoniaque ne se fait entendre qu’à partir de la 7ème piste, une reprise de « Winter » d’
AMEBIX que je laisserai les connaisseurs commenter. Tout ce que je peux dire, c’est que ce titre ne dépare pas du tout dans le monde de
KRIEG.
Et les 3 pistes suivantes, si l’on omet l’étrange « Home » qui semble plus faire office d’intermède tardif, explosent tout. La triplette « Walk with Them Unnoticed », « Ruin Our Lives » et « Gospel Hands » parvient à recréer un dosage parfait. L’auditeur est plongé dans un marais hostile, terrifiant, visqueux et malodorant. Il essaie de patauger dans cet air irrespirable et ne survit que grâce à quelques poches d’air pur. Ce ne sont pas des « lumières guidant vers la sortie des abysses », mais simplement un moyen de ne pas y crever.
KRIEG prend plaisir à lâcher de telles poches pour nous tirer encore plus fortement par la suite dans les eaux écœurantes.
Transient est ainsi un véritable album de
KRIEG, un album qui sait transmettre des émotions et qui se découvre petit à petit. Les fans de
LEVIATHAN ou de
JUDAS ISCARIOT qui seraient passés au travers de ce groupe doivent vite combler cette lacune.
L’album sera disponible le 2 septembre 2014 aux États-Unis, le 6 octobre en Europe.
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