Abkehr - In Asche
Chronique
Abkehr In Asche (EP)
Ce nom ne vous dit peut-être rien et il ne serait pas juste de vous en vouloir. Récemment formé (2015), ce duo allemand a fait son entrée cette année avec un premier EP en guise de présentation. Réalisé en digital auto-produit – cf. Bandcamp –, In Asche a rapidement été édité en format cassette par le label Sentient Ruin Laboratories qui a bien su flairer le potentiel de la formation. Et grand bien lui en a pris, les exemplaires se faisant très rares. Il faut dire que le black metal délivré par Abkehr a de quoi séduire bon nombre brassant différents courants (raw, dépressif ou encore atmosphérique) pour un résultat des plus subtils et convaincants. Un succès underground amplement mérité donc, que les sorties prochaines des versions vinyle (Sentient Ruin Laboratories/Sick Man Getting Sick Records) et CD (Embracing Darkness Records) ne devraient que renforcer.
« Profondément, chaque pas dans la vie est un pas dans la mort, et le souvenir un rappel du néant. »
En effet, le metal noir distillé par Abkehr est telle une lame glissant lentement sur votre peau avant de pénétrer les chairs. À la première écoute, il semble plutôt agréable et inoffensif avec son côté très froid et caressant – notamment lors des passages mid et low tempos. Vous captez pas mal d'influences puis commencez à lâcher des noms machinalement. Joli, esthétique, mais... Ce n'est qu'au fil du temps que In Asche se dévoile et produit son effet. Le choix porté sur une production raw y est d'ailleurs pour beaucoup, apportant de la rugosité à l'ensemble. Un contrebalancement bienvenu qui évite l’écœurement et donne aux parties agressives (comme sur l'excellent « II ») davantage d'impact. La paire Raash/H (impérial à la batterie) vous ouvre, ni plus ni moins, la voie vers le vide absolu. Du noir, du noir et encore du noir. Les Allemands en étalent sans vergogne, durant les 26 minutes que dure le court format, s'appuyant sur le chant habité au possible et typé dépressif de Raash. Très éraillée, réverbérée et en retrait dans le mix comme sortant de l' abîme, sa voix vous oppresse par ce qu'elle égraine de mal-être – l'apogée étant atteint lorsqu'il pousse ses plaintes déchirées vous pétrifiant sur place (« IV »). Des sonorités à la fois brutes et âpres qui prennent racine dans la seconde vague black metal, en particulier la scène norvégienne (sens de la mélodie, riffs entêtants et terriblement efficaces posant le décor).
« S'il est vrai que ce qui périt n'a jamais existé, la naissance, source du périssable, existe aussi peu que le reste. »
La froidure fond sur vous et vous fige, que ce soit par la violence implacable avec laquelle vous malmène le duo mais aussi ces notes plus contrastées et aériennes – comme le laissait présumer le début du premier paragraphe. Un aspect qui est particulièrement mis en relief par les riffs racés et éthérés parcourant ce EP et lui conférant une aura singulière. Les samples ou effets qui viennent se greffer ça et là aux compositions (comme sur la conclusion de « III » ou encore l'introduction de « IV ») ne font qu'accentuer ce trait ainsi que magnifier les ambiances dressées par la formation. Il se dégage une certaine beauté de In Asche. Une beauté impalpable, inquiétante mais saisissante. Car si la noirceur inhérente à l’œuvre de Abkehr reste intacte, elle revêt néanmoins différentes déclinaisons. Les nombreuses subtilités et émotions dégagées prennent peu à peu sens au gré des écoutes, à commencer par les variations effectuées par le vocaliste. Crachant sa bile et sa misanthropie à la face du monde, Raash montre une facette plus fragile et maladive dans la seconde partie du disque. Ce basculement s'effectue de façon naturelle accompagné par un changement de ton perceptible amorcé par le groupe. Comme si l'irréel cédait sa place à quelque chose davantage terrien et l'épique au viscéral. Comme si le groupe vous portez aux nues pour mieux vous en laissez tomber. Une montée crescendo dans le sentencieux sans pour autant élever le rythme, laissant d'autres influences entrer en jeu (Ash Borer pour ne citer qu'eux). Un aspect plus moderne afin de mieux éveiller en vous les tourments.
Weakling, Nyktalgia, Cornigr – ...ajoutez un autre nom ici –, beaucoup de références surgissent une fois In Asche lancé et dans lesquelles Abkehr puise afin de délivrer sa propre marque et éviter la redite. Un univers sombre au possible que les Allemands développent sur des titres plutôt longs – aucun ne passant en-dessous la barre des 6 minutes. Si j'avoue que ma préférence va pour les deux premiers morceaux, ce premier essai des Allemands n'en reste pas moins une réussite et laisse augurer de belles choses pour la suite.
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