Krieg - The Isolationist
Chronique
Krieg The Isolationist
Imperial nous avait abandonné avec un Blue Miasma des plus réussis en 2006, opus qui atteignait une qualité artistique telle que l'homme avait pris la décision de supprimer définitivement son groupe des circuits du Black Metal. Cet être torturé, instable, sans cesse en proie à la folie, fondateur d'IMPERIAL en 1995, promptement renommé KRIEG en 1997, s'est fendu de plusieurs bons opus tels que sa première déferlante du nom de Rise Of The Imperial Hordes dès 1998, ou encore le mini culte Patrick Bateman, célèbre ode à la schizophrénie en 2004 –année pendant laquelle notre homme accouchera également du fort bon The Black House, considéré aujourd'hui comme le meilleur opus de ce groupe phare du genre opportunément nommé USBM en référence au pays porteur des MASOCHIST, HAVOHEJ, PROFANATICA et autres JUDAS ISCARIOT, combos ayant sévis dans les années 1990 et pour certains encore actifs aujourd'hui (avec notamment le Disgusting Blasphemies Against God pour la bande à Paul Ledney).
2010 annonçait le retour en grandes pompes de KRIEG, avec la réédition de l'intense Patrick Bateman et surtout un nouvel album barré du nom énigmatique The Isolationist que personne n'attendait, si ce n'est via le nouveau split avec CAINA en 2009, porteur d'un nouveau titre, « Photographs From the Asylum ». J'étais moi-même très sceptique, comme tout un chacun a le droit de l'être face à un groupe qui revient après avoir annoncé son split, procédé on ne peut plus classique dans le Black Metal.
Qu'est-ce que Lord Imperial a encore à exprimer avec ce nouvel opus, qui plus est annoncé chez la grosse écurie Candlelight Records ? Lui qui semblait avoir vidé toutes ses forces avec le très bon Blue Miasma, lui qui semblait en avoir définitivement fini avec KRIEG, voilà qu'il nous revient avec un opus on ne peut plus sobre du point de vue de l'artwork. Pochette blanche marquée par un petit cadre noir dans lequel on semble distinguer une forêt aux arbres sans feuilles et une cabane en bois et quelques phrases sinistres dans les deux pages qui constituent la pochette, voilà un retour bien minimaliste. Il faut noter que KRIEG a toujours joué avec le mystère, les paysages mystérieux, il s'agit ici de perpétrer cette tradition, la pochette apparaissant comme une sorte de mélange entre The Black House et Blue Miasma. Force est de constater que l'homme possède toujours sa voix si atypique, qu'il jette à la face du monde avec moins de force que sur les précédents bons opus (Rise Of The Imperial Hordes notamment étant un phénomène d'aliénation vocale rarement égalé). Son organe se déploie sur un riffing dissonant, catalysé par les bons instrumentistes dont il a su une fois de plus s'entourer, à l'image d'un batteur portant à bout de bras un rythme sans cesse rompu, entre blasts très propres et lenteur pesante, appuyée par une basse bien lourde qui se fait sentir avec pertinence sur quelques moments. On retrouve aussi des passages burnés au possible, propres à KRIEG et à la scène dont il est le porte-drapeau, avec notamment « Ambergeist » qui évoque un « The Sick Winds Stir the Cold Dawn ».
A l'évidence, l'homme se concentre plus sur les passages sinistres avec quelques ambiances nauséeuses, notamment « Depakote » et son passage énigmatique, son rythme étrange… et Imperial parvient sans peine à amener cette atmosphère qu'il avait su instaurer sur ses albums précédent, cette poisse flippante au possible qu'il semble encore maîtriser à la perfection sur ce The Isolationist. « Depakote » s'impose comme un des morceaux légitimant le retour de l'homme et de son groupe, sa force insondable étant là pour déranger en permanence un auditeur, exposé aux couloirs sombres d'un asile dont on imagine que l'être qui en compose la symphonie connaît chaque recoin par coeur : l'inspiration est donc au rendez-vous. La plongée dans la folie et la moiteur continue avec « Religion III » : force est de constater que les pistes sont parfaitement agencées les unes par rapport aux autres, pour un résultat cohérent et homogène.
La frénésie qu'on connait au personnage sulfureux joue à plein régime : notre homme gueule à plein poumons sa rancœur et vomit sa lassitude, sa force de frappe restant intacte lors de passages véhéments et cataclysmiques (« No Future », « Dead Windows ») ou de moments contemplatifs, mélancoliques et rampants, avec un tempo lent associé à une puissance évidente (« All Paths To God » évoquant le monumental « Under An Uncaring Moon », ou encore « …and the Stars Fell On »). The Isolationist se targue de compositions alambiquées visiblement très travaillées, ponctuellement parsemées d'un soupçon de claviers et autres bruits divers renforçant bien cette ambiance d'aliéné inhérente à l'album (« Remission »).
Cet album se révèle pourtant assez indigeste. KRIEG nous enferme, une petite heure durant, dans un asile dont lui seul possède les clés, et on peine à voir le bout du tunnel, croulant sous cette atmosphère étouffante et peu accessible. Le claustrophobe ne survivra pas aux quelques longueurs préjudiciables (« Blue Of Noon », « Inhalation Decays ») de cet album qui peine à démarrer et qui peine à finir. Un album pénible à assimiler, surtout à cause de compositions trop envahies par la dissonance. Moi-même je m'étais laissé prendre à ce piège tendu par le damné Imperial, piège de la théorie du « retour raté », de l'album de trop. Mea culpa, avec le recul il n'en est rien : Imperial brouille les pistes et revient en 2010 avec un disque dans l'ensemble réussi, homogène mais doté de quelques faiblesses que le fan de KRIEG oubliera rapidement. Il n'est en tout cas pas question découvrir le groupe avec ce disque, qui en porte certes le label de qualité, mais qui force un peu trop le trait à certains passages.
| Voay 15 Février 2011 - 2521 lectures |
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