Le Soleil n'a pas eu de chance en 2014. Dès le début de l'année, Lvcifyre a voulu le bouffer tout cru pour instaurer sur Terre une nuit éternelle. À peine remis de ses émotions, le revoilà la cible d'un autre affamé à l'approche de 2015. Cette fois, ce sont les Américains de Job For A Cowboy qui ont décidé de s'attaquer à l'astre du jour. Un choix de titre malheureux pour son quatrième album, toujours chez Metal Blade, qui place le combo dans une position délicate de concurrence avec l'une des meilleures sorties death metal de l'année. Mais sans doute la formation de l'Arizona n'a-t-elle aucune idée de l'existence des Anglais. Cela n'aurait rien d'étonnant car si les deux groupes font du death metal, leur approche s'avère complètement différente, prouvant une fois encore la richesse d'un style aux multiples facettes. Plus surprenant par contre, l'évolution proposée ici par Job For A Cowboy, qui, comme à son habitude depuis son premier EP
Doom, ne sort jamais le même disque.
Du deathcore sur
Doom, du death moderne sur
Genesis, du brutal death sur
Ruination et du death plus technique sur
Demonocracy. Difficile de ne pas cataloguer de girouette le désormais quatuor de Glendale, le talentueux batteur Jon Rice ayant déserté, remplacé par un membre de session, Danny Walker (Intronaut, Murder Construct, ex-Phobia et Exhumed), qui semble changer de style au gré du vent. Si ces critiques paraissent légitimes, il n'en demeure pas moins que Job For A Cowboy sait surprendre son auditoire. Il sait aussi et surtout sortir des opus de qualité, son seul faux pas restant l'insipide
Genesis.
Mais je n'avais jamais été aussi surpris par les Américains qu'à l'écoute de ce
Sun Eater! Si bien que ma première rencontre avec l'œuvre m'a carrément décontenancé. L'album s'ouvre sur "Eating The Visions Of God", long et lent morceau de plus de six minutes posé et dissonant accompagné de lignes de basse superbes et illuminé par un solo splendide à mi-parcours. On reconnait le groupe grâce au chant caractéristique de son frontman Jonny Davy, seul membre originel du combo formé en 2003, à base de growls bien gras accompagnés d'intonations hurlées plus criardes. Ce n'est pas non plus la première fois qu'on salue la qualité des solos du combo. Mais l'ambiance et le feeling dégagés sont nouveaux pour le groupe. Je me dis qu'il s'agit sans doute là d'une introduction et que la batterie va blaster dès le début du deuxième titre. Pas du tout puisque "Sun Of Nihility" reprend sur le même rythme tranquille avant de passer la seconde, sans aller au-delà. Job For A Cowboy serait-il devenu un groupe de death technico-progressif désormais? Aurait-il écouté Fallujah, Gorod ou découvert Cynic et Atheist? Eh bien il y a un peu de ça, oui! On se dit alors que cette pochette magnifique détaillée aux couleurs chatoyantes signée de la main d'un très inspiré Tony Koehl illustre à merveille cette évolution inattendue vers un son plus progressif, mélodique, atmosphérique et technique.
Demonocracy montrait déjà des élans plus technico-mélodiques à la Obscura mais rien d'aussi radical.
Alors forcément, en bon gros bourrin, je n'ai pas trop goûté à cette nouvelle direction. Du moins au début. J'ai eu une réaction épidermique, criant à l'arnaque face à cet énième retournement de veste, cet émasculation éhontée d'un groupe me refourguant un album avec très peu de blasts et du mid-tempo voire moins largement majoritaire. Mais une fois la nouvelle assimilée, force est de constater que le résultat se révèle tout à fait convaincant. Si le manque de brutalité continue de me chagriner malgré quelques bonnes rasades de blasts sur "The Stone Cross", "The Synthetic Sea" (avec Corpsegrinder de Cannibal Corpse en guest), "A Global Shift" ou "The Celestial Antidote",
Sun Eater offre d'autres qualités. Une très bonne production au son cristallin déjà, même si la batterie mixée un peu trop en avant paraît vulgaire quand elle arrive avec ses gros sabots sur les parties posées. Une ambiance assez froide, dissonante, astrale, post-apocalyptique et désespérée prenante également, instaurée par des musiciens de plus en plus sûrs de leur technique et leur talent de composition et bien résumée sur le titre de fin "Worming Nightfall". Sans oublier des lignes de basse (fretless?) divines de Nick Schendzielos, certainement le plus gros point fort de ce nouveau full-length. Avec le feeling mélodique sur les leads (et même les riffs) bien sûr. Car, c'est la qualité première de
Sun Eater, les solos s'avèrent de toute beauté, belles démonstrations de technique, de fluidité (ça sweepe pas mal!) et de sens de la mélodie ("Eating The Visions Of God", "Sun Of Nihility" par Jason Suecof, "The Stone Cross", "The Synthetic Sea", "Encircled By Mirrors" (fait penser à du Loomis!), "Buried Monuments"...).
S'il n'y avait pas eu cet aspect mélodique prononcé, nul doute que j'aurais eu plus de mal avec ce
Sun Eater, étant souvent réfractaire aux évolutions moins brutales et plus "cérébrales" en matière de death metal. Mais Job For A Cowboy a bien digéré cette évolution, nous offrant un nouvel album étonnant et très appliqué, plus orienté du côté progressif de la Force, plein de bonnes idées, avec une vraie ambiance, un sens prononcé de la mélodie et une belle technique. Les Américains n'oublient heureusement pas le groove (un peu tech à la Gorod sur "The Celestial Antidote avant la première minute) et l'efficacité (ça envoie quand même un peu!), les morceaux restant assez prenants et pas non plus d'une complexité folle, même s'il faudra quelques écoutes pour tout assimiler. Et puis cette putain de basse qui file des frissons! Alors bien sûr,
Sun Eater n'est pas l'album de l'année, certains passages encore un peu trop modernes (notamment en ce qui concerne la batterie), des longueurs sur les plus longs titres (trois quarts d'heure quand même la bête!) et des riffs pas toujours intéressants sur les parties death classiques banalisent les efforts du groupe. On pourra aussi reprocher au combo de changer encore de style, de suivre les modes et de n'avoir donc aucune personnalité. Mais dans l'ensemble, je dis chapeau à Job For A Cowboy pour nous avoir pondu cette galette ambitieuse. Pas mon style préféré mais quand c'est bien fait comme ici, il n'y a pas de raison de s'acharner. Du coup par contre, le nom du groupe, déjà sujet à toutes les moqueries, s'avère encore plus inopportun. Car Job For A Cowboy n'a jamais été aussi sérieux que sur ce
Sun Eater.
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