Malgré sa très bonne réputation au sein de la scène underground, Teitanblood fait partie de ces groupes que je découvre sur le tard. Mes quelques écoutes succinctes d’un ou deux morceaux tirés, de mémoire, de la compilation
Black Putrescence Of Evil ne m’avaient pas bousculé plus que de raison et j’avais donc préféré en rester là, imaginant bêtement que la suite ne pourrait m’intéresser. Et bien quelle erreur car si j’avais su,
Death, dernier album du groupe sorti en mars 2014, aurait facilement pu figurer en haut de mon bilan annuel.
Pour ce qui est des présentations, Teitanblood est donc un groupe espagnol qui compte déjà derrière lui douze années d’existence, deux albums, deux EP, deux splits (en compagnie de Proclamation et Necros Christos), une démo ainsi qu’une compilation regroupant l’ensemble des titres de ces trois plus anciennes réalisations. Le groupe évolue depuis 2007 sous la forme d’un duo avec NSK (ex-Proclamation, ex-Ofermod) au chant, à la guitare et à la basse et J à la batterie (ex-Bloodoline).
Collaborant ensemble depuis 2009 et la sortie de son premier album intitulé
Seven Chalices, c’est une fois de plus sur le label français Norma Evangelium Diaboli qu’est paru ce deuxième essai longue durée de Teitanblood. Longue durée, c’est le cas de le dire puisque
Death culmine tout de même à plus de soixante-huit minutes! De quoi décourager plus d’un curieux à se lancer dans ce périlleux voyage. Heureusement, ce n’est pas le genre de détails sur lequel je m’arrête personnellement. Et puis de toute façon, comment ignorer un album illustré par Timo Ketola (Dead Congregation, Kaamos, Murder Squad, Verminous...) qui, pour l’occasion, s’est tout de même montré moins cradingue que d’habitude?
Sept titres, soixante-huit minutes et vous êtes toujours là à lire ces lignes? Alors c’est que vous êtes bien courageux et surtout prêt à en prendre plein la tronche pendant une heure et huit minutes particulièrement intenses et éprouvantes. Car si les compositions des Espagnols sont plutôt longues (entre quatre et seize minutes - même si les huit dernières minutes de "Silence Of The Great Martyrs" ne comptent pas vraiment), n’allez pas croire pour autant qu’elles laissent place à de longues séquences lumineuses, mélodiques ou aériennes. Non, non, vous vous trompez lourdement si vous imaginez que Teitanblood joue dans la cours de ces groupes de Black shoegaze contemplatifs! Au contraire, le duo se situe plutôt à l’extrême opposé avec une musique particulièrement radicale et oppressante qui ne laisse que bien peu de place aux passages moins tendus. Un Black/Death sauvage dont les premières secondes sont à l’image de tout l’album : agressif, excessif, punitif, jouissif.
Tout ce bordel, on le doit à une section rythmique particulièrement expressive à commencer par une batterie survoltée. Derrière ses fûts, J impose son rythme sans broncher une seule seconde. Une cadence particulièrement épuisante à base de blasts et autres séquences meurtrières dont le niveau d’intensité ne faiblit que très rarement, à l’occasion de quelques moments de répits providentiels où il vous sera possible de sortir la tête de l’eau pour enfin respirer. Sur ces passages massifs, Teitanblood va alors jouer la carte du contre-pied (à l’image du court "Unearthed Veins") comme pour mieux mettre en relief ces assauts incessants et quasi ininterrompus qui viennent saigner nos oreilles. Cette sensation est d’ailleurs renforcée par quelques conclusions abstraites (la transition entre "Plagues Of Forgiveness" et "Cadaver Synod" a de quoi vous faire faire un arrêt cardiaque) capables elles-aussi d’instaurer un climat tout aussi étrange et oppressant. Rien de bien nouveau mais une mise en exergue de l’atmosphère complètement schizophrène, presque hallucinée, qui règne à l’écoute de cet album tout à fait inquiétant
Et si la batterie semble tenir le rôle principal de cette section rythmique, celui des guitares n’est pourtant pas à oublier. Bien qu’assez compacte, la production signée Javier Félez (guitariste de Graveyard) offre une pleine lisibilité de ces riffs obscurs et tout aussi intenses. Un brin étouffée (donc légèrement en arrière dans le mix comparativement à la batterie), la guitare de NSK semble suivre le rythme imposé par J et son instrument de torture. Ces riffs aliénants font leur travail de manière peut-être moins évidente mais avec pourtant autant d’efficacité. Car si la batterie donne le sentiment de mener la dance, ce sont bien ces riffs tourbillonnants qui créent cette atmosphère de vide étouffant. Un jeu extrêmement bas du front néanmoins illuminé par de nombreux solos biens foutraques et agressifs.
Pour accompagner ces instruments de terreur, la voix arrachée et possédée d’un NSK en transe. Car finalement, c’est bel et bien lui qui mène la messe d’une voix fétide et maladive puant le souffre et la mort. Cet état de schizophrénie évoquée un peu plus haut est ici mis en avant par un chant aux intonations multiples qui ne servent qu’un seul et même but, celui d’établir une atmosphère sinistre et fuligineuse. Entreprise réussie sur toute la ligne. A noter également la participation discrète mais toujours fort sympathique de Chris Reifert d'Autopsy sur le titre "Burning In Damnation Fires".
Si les écoles néo-zélandaise et canadienne jouaient principalement à huis-clos dans le registre du Black/Death intense et blasphématoire, force est de constater que d’autres trublions se sont invités à la fête. Entre l’Amérique du Sud, l’Italie et maintenant l’Espagne, on compte un nouveau contingent de pays bien décidés à prendre leur place sur l’échiquier. En l’état, Teitanblood vient de marquer un sacré coup à la concurrence grâce à un deuxième album furieux et parfaitement maitrisé malgré une durée totale qui a de quoi effrayer et décourager. Car au-delà de la puissance pure de ce
Death, c’est aussi son caractère presque "abordable" et le fait de ne pas subir cette durée a priori excessive qui surprend. Quoi qu’il en soit
Death est du pain-béni pour les amateurs de Black/Death obscur, intense et furieux. Un disque qui aurait aisément mérité sa place dans mon bilan 2014.
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